Droit à indemnisation des passagers si la compagnie aérienne ne peut pas prouver qu’ils ont été informés à temps de l’annulation du vol

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Auteur: Thierry Vallat, Avocat au Barreau de Paris

Mai 2017



Un transporteur aérien qui n’est pas en mesure de prouver qu’un passager a été informé de l’annulation de son vol plus de deux semaines avant l’heure de départ prévue est tenu de l’indemniser.


Tel est le sens de l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne rendu le 11 mai 2017 dans l'affaire C-302/16 Bas Jacob Adriaan Krijgsman/Surinaamse Luchtvaart Maatschappij NV


Ceci vaut non seulement lorsque le contrat de transport a été conclu directement entre le passager et le transporteur aérien, mais également lorsqu’il a été conclu par l’entremise d’une agence de voyage en ligne

M. Krijgsman a effectué une réservation par le biais d’une agence de voyage en ligne pour un vol aller-retour Amsterdam Schiphol (Pays-Bas) – Paramaribo (Suriname), opéré par la compagnie aérienne SLM.


Le décollage du vol aller était prévu le 14 novembre 2014. Le 9 octobre 2014, SLM a informé l’agence de voyage de l’annulation de ce vol.


Le 4 novembre 2014, M. Krijgsman en a été informé par un courrier électronique de l’agence de voyage. Invoquant le règlement de l’Union en matière d’indemnisation des passagers en cas d’annulation de vol ( Règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) n° 295/91 (JO 2004, L 46, p. 1) , M. Krijgsman a réclamé à SLM le paiement de la somme forfaitaire de 600 euros.


Ce règlement prévoit notamment que les passagers ont droit à une indemnisation de la part du transporteur aérien, à moins qu’ils n’aient été informés de l’annulation du vol au moins deux semaines avant l’heure de départ prévue.


SLM a toutefois refusé d’indemniser M. Krijgsman au motif que l’information relative à la modification de la date de départ avait été transmise à l’agence de voyage le 9 octobre 2014. De son côté, l’agence de voyage a fait savoir à M. Krijgsman qu’elle déclinait toute responsabilité, étant donné que son mandat se limitait à la conclusion de contrats entre passagers et transporteurs aériens et qu’elle n’était donc pas responsable des modifications d’horaires. Selon elle, la responsabilité d’informer les passagers dans une telle situation incombait au transporteur aérien, auquel était transmise, dans le dossier de réservation, l’adresse électronique du passager.


Par la suite, M. Krijgsman a saisi le rechtbank Noord-Nederland (tribunal du Nord, Pays-Bas) afin d’obtenir la condamnation de SLM au paiement de l’indemnisation. Estimant que le règlement européen ne précise pas les modalités selon lesquelles le transporteur aérien doit informer les passagers en cas d’annulation de vol dans l’hypothèse d’un contrat de transport conclu par l’intermédiaire d’une agence de voyage ou d’un site Internet, ce tribunal a décidé d’interroger la Cour de justice.


Dans son arrêt du 11 mai 2017, la CJUE rappelle que, conformément au règlement, il incombe au transporteur aérien de prouver qu’il a informé les passagers de l’annulation du vol ainsi que le délai dans lequel il l’a fait. Dès lors que le transporteur aérien n’est pas en mesure de prouver que le passager a été informé de l’annulation de son vol plus de deux semaines avant l’heure de départ prévue, il est tenu de verser l’indemnité prévue par le règlement.


La CJUE précise qu’une telle interprétation vaut non seulement lorsque le contrat de transport a été conclu directement entre le passager et le transporteur aérien, mais également lorsque ce contrat a été conclu par l’entremise d’un tiers, tel qu’une agence de voyage en ligne.


En revanche, la Cour relève que les obligations acquittées par le transporteur aérien en vertu du règlement le sont sans préjudice pour celui-ci de son droit de demander réparation, conformément au droit national applicable, à toute personne à l’origine du manquement de ce transporteur à ses obligations, y compris des tiers.


En effet, le règlement ne limite aucunement le droit du transporteur aérien de demander réparation à un organisateur de voyages ou une autre personne avec laquelle le transporteur aérien a conclu un contrat.


Retrouvez l'arrêt de la CJUE du 11 mai 2017 http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=190586&pageIndex=0&doclang=fr&mode=req&dir=&occ=first&part=1&cid=960021


(Source: CJUE)