La mise en conformité des Associations Syndicales Libres après la loi ALUR du 24 mars 2014 (fr)

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Auteur : Thierry Vallat,
Avocat au barreau de Paris
Rédigé le 16/04/2014 sur le blog de Me Thierry Vallat



Antérieurement soumises aux dispositions de la loi du 21 juin 1865, les Associations Syndicales Libres (ASL) sont désormais régies par l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires, ratifiée par la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004.

L’article 60 de cette ordonnance, laquelle a abrogé la loi du 21 juin 1865, exige en effet que les associations syndicales de propriétaires, ainsi que les associations foncières mentionnées aux articles L 322-1 du code de l’urbanisme (AFU) et l’article L 131-1 du code rural, mettent en conformité leurs statuts avec le nouveau dispositif légal.

Or, cette mise en conformité des statuts, notamment s’agissant des Associations Syndicales Libres, posait depuis cette date de nombreux problèmes aux praticiens.

Aux termes de l’article 7 de l’ordonnance susvisée, les statuts de l’association doivent définir son nom, son objet, son siège et ses règles de fonctionnement.

Ils doivent comporter la liste des immeubles compris dans son périmètre et préciser ses modalités de financement et le mode de recouvrement des cotisations.

L’article 9 dispose par ailleurs que l’ASL est administrée par un syndicat qui règle, par ses délibérations, les affaires de l’association.

Tels sont donc les éléments qui doivent se retrouver impérativement dans les statuts, afin qu’ils soient conformes aux prescriptions de l’ordonnance de 2004.

L’ordonnance précise à cet égard que les associations de propriétaires disposaient, selon l’article 60-I, d'un délai de deux ans pour se mettre en conformité à compter de la publication du décret prévu à l'article 62 de l'ordonnance de 2004, qui est intervenue le 5 mai 2006: de fait, la date butoir pour cette mise en conformité était le 5 mai 2008.

La plupart des ASL créées antérieurement à 2004 n’ont cependant pas mis leurs statuts à jour dans le délai préconisé.

S’est donc posée une difficulté au regard de la publication des modifications statutaires qui seraient intervenues postérieurement au délai de deux ans visé par l’ordonnance.

En effet, l'article 5 de l'ordonnance réserve la possibilité d'ester en justice pour les seules associations syndicales en règle de leurs formalités de publicité et de conformité.

Or, la jurisprudence, et notamment un arrêt rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation du 5 juillet 2011 interprétait très strictement l’article 60 en sanctionnant les ASL défaillantes.

Il résultait de cet arrêt du 5 juillet 2011 (Cass. 3ème civ. 5 juillet 2011 pourvoi n° 10-15.374) que les ASL aux statuts non conformes au 5 mai 2008, si elles conservaient leur existence juridique (alors que celles non déclarés n'ont aucune existence jusqu'à leur déclaration publiée), ne pouvaient agir en justice, et donc notamment étaient dans l'impossibilité de recouvrer judiciairement leurs charges impayées ou d'effectuer quelque procédure que ce soit, faute de capacité pour agir.

L'arrêt du 5 juillet 2011 était même allé plus loin dans la rigueur de la sanction puisqu'en approuvant la Cour d'appel d'avoir décidé que faute pour l'association oublieuse d'avoir publié ses statuts modifiés au 5 mai 2008, la Cour de cassation suggèrerait implicitement que cette régularisation aurait été donc désormais impossible !

Un nouvel arrêt rendu le 11 septembre 2013 (Cass. 3ème civ. 11 septembre 2013 pourvoi 12-22.351) était venu enfoncer le clou : la 3ème chambre civile de la Cour de cassation avait considéré, si l’absence de mise en conformité des statuts de l’ASL ne remettait en effet nullement en cause l’existence légale de cette association, qui résultait du consentement unanime de ses membres constaté par écrit, qu’à défaut de l’accomplissement des formalités de publication nécessaires pour acquérir la capacité d’ester en justice, l’ASL ne pouvait intervenir à une procédure.

Heureusement, un récent arrêt de la Cour de Cassation du 13 février 2014 (Cass. 3ème civ 13 février 2014 pourvoi 13-22.383) était déjà venu adoucir la rigueur jurisprudentielle en précisant que les associations syndicales libres avaient la possibilité de recouvrer leur droit d'ester en justice en accomplissant, même après l'expiration du délai prévu par l'article 60, les mesures de publicité prévues par l'article 8 de ladite ordonnance.

Et depuis la publication de la loi pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové (ALUR) du 24 mars 2014, les choses sont enfin devenues limpides.

L'article 59 de la Loi ALUR modifie en effet l'article 60 de l'ordonnance du 1er juillet 2014 qui est désormais libellé comme suit: " I. - Les associations syndicales de propriétaires constituées en vertu des lois des 12 et 20 août 1790, 14 floréal an XI, 16 septembre 1807, 21 juin 1865 et 8 avril 1898 sont régies par les dispositions de la présente ordonnance. Toutefois, leurs statuts en vigueur à la date de publication de la présente ordonnance demeurent applicables jusqu'à leur mise en conformité avec les dispositions de celle-ci. Cette mise en conformité doit intervenir dans un délai de deux ans à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 62. A l'exception de celle des associations syndicales libres, la mise en conformité est approuvée par un acte de l'autorité administrative ou, à défaut d'approbation, et après mise en demeure adressée au président de l'association et restée sans effet à l'expiration d'un délai de trois mois, l'autorité administrative procède d'office aux modifications statutaires nécessaires. Par dérogation au deuxième alinéa, les associations syndicales libres régies par le titre II de la présente ordonnance, qui ont mis leurs statuts en conformité avec les dispositions de celle-ci postérieurement au 5 mai 2008, recouvrent les droits mentionnés à l'article 5 de la présente ordonnance dès la publication de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, sans toutefois que puissent être remises en cause les décisions passées en force de chose jugée."

En résumé, les modifications apportées aux statuts, même publiées après mai 2008, valident rétroactivement la mise en conformité et permettent aux ASL de recouvrer leurs prérogatives et leurs droits : un éclaircissement salutaire s’il en est.

Reste que nombre d’associations syndicales n’ont toujours pas accompli ces formalités indispensables à leur bon fonctionnement et qu’on ne peut que leur conseiller de s’en préoccuper sans tarder.

Voir aussi

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