La permanence garde à vue (fr)

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La permanence garde à vue — compte-rendu de la Commission "Défense pénale d'urgence" du barreau de Paris du 18 novembre 2014
Compte rendu rédigé par Aziber Seid Algadi, Docteur en droit, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo — édition professions



Mots Clefs : section P12, garde à vue, auditions, permanence des délits et des crimes commis par des majeurs, loi du 27 mai 2014, société "Alphadial"



La Commission ouverte «Défense pénale d'urgence» du barreau de Paris tenait, le 12 novembre 2014, sous la responsabilité de Maîtres Frédérique Guimelchain et Tabet Koraytem, Avocats à la cour, une conférence sur le thème "la permanence garde à vue", à laquelle intervenaient Madame Mireille Fourmaud, responsable de la garde à vue au bureau pénal, Monsieur Cesar Esteve, PDG de la société Alphadial et gérant la plateforme téléphonique, Maître Emmanuelle Hauzer Phelizon, ancien membre du conseil de l'Ordre, responsable du bureau pénal, Monsieur Alexandre Nascioli, commissaire de police, chargé de mission auprès du procureur de la République de Paris, Monsieur Samuel Eutizi, Capitaine de police à la sûreté territoriale de Paris et, enfin, Monsieur Arnaud Faugère, vice-procureur du P12 (permanence des délits et des crimes commis par des majeurs, au tribunal de grande instance de Paris) et chargé de formation à l'ENM.



Propos introductifs, par Maître Frédérique Guimelchain

Cette nouvelle Commission ouverte s'intéresse aux questions juridiques et pratiques en rapport avec la défense pénale d'urgence. Représentative de la profession dans son ensemble, la profession d'avocat est exercée par une diversité de personnes venant d'origines sociales diverses. On note, par exemple, une plus grande difficulté pour les enfants d'ouvriers, entre autres, dans l'exercice de la profession. Ceux qui sortent nantis de leur certificat d'aptitude à la profession d'avocat ne trouvent pas toujours une collaboration (une durée de trois ans environ s'écoule en moyenne entre l'obtention du diplôme et la collaboration). C'est ainsi que certains deviennent juristes ou se mettent à leur compte. Parmi ces derniers, ceux qui souhaitent s'adonner à la défense pénale ont alors pour interlocuteur le bureau pénal qui tente de les accompagner dans l'accomplissement de leur projet. Ils rejoignent en cela d'autres confrères qui ont également pour passion ladite défense pénale. Face à un sentiment d'opprobre et de colère contre une image souvent négative, le barreau de Paris a entrepris en 2014 une réforme du Bureau pénal. C'est dans un tel cadre qu'a émergé cette nouvelle Commission "Défense pénale d'urgence". Outre des réunions régulières de formation continue, orientées principalement vers la pratique des permanences pénales, il est également envisagé à terme la mise en place d'un fil d'informations sur un site internet de ladite Commission à créer.


Nouveautés juridiques sur la garde à vue

Par Maître Tabet Koraytem


S'agissant des dernières nouveautés relatives à la garde à vue, il convient de rappeler deux lois récentes : la première est la loi n˚ 2014-535 du 27 mai 2014, portant transposition de la Directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales, entrée en vigueur le 2 juin, date limite de transposition de la Directive. Cette loi a également fait l'objet d'une circulaire en 2013 et d'un rapport, dénommé "Beaume", qui contient notamment des éléments concernant l'évolution de la garde à vue ; la seconde est la loi n˚ 2014-896 du 15 août 2014, relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales. Concernant la garde à vue, un arrêt rendu par la Cour de cassation, le 20 novembre 2013 (Cass. crim., 20 novembre 2013, n˚ 13-84.280) est, de ce point de vue, très intéressant car il a cassé un arrêt de la chambre de l'instruction ayant annulé une audition, suite au refus opposé à l'avocat de poser des questions. La Cour de cassation relevant, qu'en l'espèce, le gardé à vue a mis un terme à l'audition sur conseil de son avocat et non l'agent, a estimé qu'il revenait en lieu et place à celui-ci à saisir lui-même le Procureur, en lui transmettant ses observations écrites et, s'il le souhaitait, les questions refusées, comme le permettent les dispositions de l'article 63-4-3 du Code de procédure pénale. La conclusion pratique à en tirer pour l'avocat dans un tel cas est, dès lors, de s'abstenir de conseiller à la personne gardée à vue de demander la fin de l'audition, à charge pour le fonctionnaire de police de le faire.

En substance, s'agissant de la loi du 27 mai 2014, il convient de relever les éléments suivants.

— Il y a une indéniable avancée du principe contradictoire : l'article 63-1, 2 ˚ du Code de procédure pénale mentionne, à cet effet, l'obligation d'indiquer, dans le formulaire de notification à la personne gardée à vue, la qualification, la date et le lieu présumé de l'infraction qu'elle est soupçonnée avoir commise ou tenté de commettre ainsi que des motifs mentionnés aux 1˚ à 6˚ de l'article 62 -2, justifiant son placement en garde à vue. Dans le même article, il est mentionné que doit être également notifié l'objectif de la garde à vue, qui se distingue du motif. Cette disposition importante rappelle les motifs du placement en détention provisoire, lors de l'instruction et qui sont : permettre l'exécution de la condamnation, empêcher la concertation etc...

— Les avocats peuvent également faire usage de leur capacité à faire des observations sur la prolongation de la garde à vue (C. pr. pén., art. 63-1) et tendant à mettre fin à cette mesure. L'importance pratique de cette disposition est certaine. Le Code de procédure pénale relève que le gardé à vue doit être entendu oralement ou sur procès verbal d'audition, c'est-à-dire en présence de l'avocat. Or, tel n'est pas toujours le cas. Cette nullité a été soulevée à quelques occasions sans jamais être reçue par les juridictions à ce jour.

— Le gardé à vue peut consulter les pièces du dossier (C. pr. pén., 63-4-1 N° Lexbase : L3162I3I). Il est spécifié que le gardé à vue a accès au certificat médical, au procès-verbal de notification et aux auditions antérieures. Il a également le droit d'informer les tiers, y compris le consulat et de connaître les modalités pour contester la légalité de la mesure, obtenir le réexamen de privation de liberté ou demander sa remise en liberté. La principale nouveauté de ce texte réside dans le fait que l'intéressé peut consulter les mêmes pièces que celles qui étaient, auparavant, uniquement autorisées pour l'avocat. On s'interroge, d'ailleurs, sur l'utilité d'une telle disposition dans la mesure où la notification desdites pièces lui a par définition été faite et a été signée par lui. S'agissant de l'accès au dossier, il convient également de relever une contradiction introduite par l'article 63-1, alinéa 5, complété par l'article 803-6, prévoyant la remise d'un document à toute personne placée en garde à vue. Ledit document prévoit, en effet, un accès, entre autres, "aux pièces du dossier" et non pas seulement à celles énumérées par l'article 63-4-1. Il revient donc à l'avocat intervenant de continuer à demander l'accès au dossier et, en cas de refus, d'ajouter, conformément aux arrêts "Salduz" (CEDH, 27 novembre 2008, Req. 36 391/02), et "Dayanan" (CEDH, 13 octobre 2009, Req. 7377/03), une mention aux articles 63-1, alinéa 5, et 803-6 dans la note d'observation qu'il est d'usage de rédiger. Il serait du reste intéressant de déposer des conclusions de nullité sur ce fondement afin de connaître la position du juge sur la contradiction introduite par ces nouvelles mesures.

— Le rétablissement de la garde à vue supplétive (C. pr. pén., art. 65).

— La présence de l'avocat lors du déferrement (C. pr. pén., art. 393). L'avocat a ainsi la possibilité de peser sur l'orientation du dossier. En pratique, cela ne se fait pas vraiment à Paris car les intéressés ne sont pas toujours pleinement informés de ce droit. Il revient donc à l'avocat, intervenant en garde à vue, d'informer l'intéressé qu'il a la possibilité de demander la présence de l'avocat, lors de la comparution devant le procureur, pour que celui-ci puisse avoir accès à tout le dossier préalablement. Il importe de rappeler que l'avocat a déjà accès à tout le dossier lors du déferrement intervenant le soir ou en fin d'après-midi.

— Enfin, depuis le 1er janvier 2015, les avocats peuvent aussi être appelés à assister leurs clients pour les auditions libres.


Précisions pratiques sur la permanence pénale garde à vue

Par Madame Mireille Fourmaud


Pour assurer une permanence pénale, il faut être inscrit sur les listes de permanence pénale. Chaque année, l'inscription se fait exclusivement sur internet à partir du mois de juin. Dans un système de plages et de disponibilités, la prise de date mais aussi l'annulation de date doivent être faites rapidement afin de libérer les plages aux autres. Il y a 50 avocats de permanence par jour, hormis les secrétaires de conférence (cinq par jour) qui sont contactés en premier. La liste des avocats assurant la permanence est envoyée tous les jours au standard de la garde à vue, ce qui permet de s'inscrire et de se désinscrire jusqu'à 48 heures avant le début de la permanence. Au-delà, ce n'est plus possible.

Parallèlement, il y a également un envoi hebdomadaire au barreau de la liste des avocats désignés. Il faut tout de même noter que ces avocats désignés ne sont pas indemnisés par l'Etat.

Le document CERFA, relatif à la garde à vue, doit être rempli avec le maximum d'informations sur le type de l'infraction. Chaque mesure devant faire l'objet d'un document CERFA distinct : retenue douanière, garde à vue, dépôt etc...

En cas d'interruption de la garde à vue, il convient de mentionner le début de la garde à vue, de l'interruption et la fin de celle-ci.

Pour la retenue douanière, il convient de préciser l'heure à laquelle débute la garde à vue. Les avocats doivent aussi entrés en contact avec le standard de la garde à vue pour avoir plus d'informations.


Présentation de la plateforme téléphonique "Alphadial"

Par Monsieur Cesar Esteve


La société "Alphadial" existe depuis deux ans mais le service est assuré depuis une quinzaine d'années. En avril 2011, compte tenu de la complexification des procédures, l'informatisation de l'activité a été réalisée. La société n'est pas un centre d'appel mais une plateforme de télé-secrétariat, car on y travaille uniquement avec la téléphonie informatique ; ce qui permet de mettre en oeuvre des systèmes informatiques adaptés à chacune des procédures. La société est composée de 35 personnes et est située à Saint-Quentin-en-Yvelines. Elle est ouverte 24 heures /24 et 7 jours /7.

Une dizaine de barreaux constitue la clientèle de la société "Alphadial", y compris le barreau de Paris (plus de 2 000 gardes à vue suivies par an) et pratiquement toute l'île de France. Ainsi, en est-il également des barreaux de Nîmes, Lille et Toulouse. Pour ce dernier, le suivi est assuré au-delà du déferrement. <br

Un grand nombre de gardes à vue mensuelles et la rapidité de l'évolution de la législation en la matière obligent à avoir des relations très proches avec les clients pour être informés en temps réel de l'évolution de la législation.

D'un point de vue pratique, les demandes sont réceptionnées par fax, dans la majorité des cas, et par téléphone. Lorsqu'elle est faite par fax, la demande doit contenir : le lieu de visibilité du gardé à vue, le contact direct de l'OPJ, l'heure du début de la garde à vue et les faits, la demande de commis d'office ou d'avocat désigné.

Dans le cas d'un commis d'office, la demande est enregistrée sur le système informatique et un avocat est contacté. A l'issue du contact, un SMS est envoyé avec toutes les informations.

Dans le cadre d'un avocat désigné, celui-ci est contacté en priorité sur son téléphone portable ou tout numéro de téléphone disponible. Après une demi-heure, il est rappelé. Il peut lui être envoyé un fax, un e-mail avec parfois un SMS de confirmation.

En cas de refus de l'avocat désigné ou si le gardé à vue a sollicité un commis d'office, un avocat de permanence est contacté avec la transmission des informations.

Pour finir, dès que la demande est affectée, la confirmation est ensuite faxée sur les lieux de visibilité (commissariats). Sur l'ordre d'appel des avocats en permanence, toutes les nuits, un fichier est reçu avec l'ensemble des noms des avocats permanents. Ce fichier est mis sur le système de façon aléatoire. Chaque avocat de cette liste possède un capital de points qui permet un classement prioritaire par le système. Les avocats, ayant le capital le plus bas, sont appelés les premiers. Dans le cas d'une absence de réponse, un rappel automatique est effectué au bout de trois minutes.

Lorsque l'avocat refuse une affaire, celui-ci ne sera pas considéré comme prioritaire pour être rappelé. Aussi, ceux qui viennent d'avoir une affaire ne devraient pas être rappelés en principe. Le nom du gardé à vue n'est pas communiqué par respect du principe de confidentialité.


Bureau pénal

Par Maître Emmanuelle Hauzer Phelizon


L'avocat doit assister son client du début à la fin de la garde à vue. Lorsque l'avocat ne peut pas suivre la garde à vue, il importe de motiver sa décision, car cette situation doit être exceptionnelle : maladie, affectation.

L'avocat doit aller jusqu'au bout de la procédure et il est nécessaire d'admettre un droit de suite. Toutefois, dans la mesure où la permanence est rémunérée, on ne peut indemniser un avocat commis d'office.

Il convient de rappeler qu'il est formellement interdit d'appeler la famille du gardé à vue pendant la garde à vue. S'agissant du droit de suite, la demande doit comporter les éléments suivants :

1. durée de l'entretien avec la personne gardée à vue ;
2. qualification ;
3. orientation de la procédure ;
4. précision de l'intervention en tant que commis d'office ou pas.

L'avocat doit passer du temps avec la personne gardée à vue (en moyenne une trentaine de minutes), sinon le droit de suite pourrait être refusé.

En cas de difficulté, il importe de s'adresser au bureau pénal qui est disponible même le week-end. Le droit de suite s'exerce aussi pour les victimes assistées. Dans cette hypothèse, il convient de s'adresser au service des victimes.

Par ailleurs, en cas de problèmes avec les interprètes qui seraient plus ou moins inféodés aux policiers, il importe de solliciter également le bureau pénal.


Dimension policière de la garde à vue

Par Monsieur Alexandre Nascioli et Monsieur Samuel Eutizi


Il n'y a pas, hélas, de kit technique juridique à fournir pour réussir à coup sûr sa garde à vue en tant qu'avocat, car la procédure, quand bien même la loi, la jurisprudence et le Parquet de Paris en fixent les détails, diffère encore en fonction des services de police, qui ont souvent des approches différentes. A Paris, l'organisation des services judiciaires est, en effet, très complexe : chaque commissariat a son service judiciaire et il existe aussi la sûreté territoriale et les multiples services de la police judiciaire.

Fort de son expérience d'adaptation à la réforme, demandant la présence de l'avocat au moment des auditions, la police a adopté de nouvelles méthodes de travail et de nouvelles habitudes ont commencé à poindre. Il semble donc que cette nouvelle réforme de l'audition libre sera assimilable facilement.

La gestion du temps par l'OPJ au cours de la garde à vue pose parfois des problèmes, notamment l'articulation entre l'intervention de l'avocat et les temps médicaux ou d'indisponibilité du gardé à vue (UMJ, hypothèse du client en dégrisement, client hospitalisé).

En général, les avocats aimeraient légitimement savoir quand leur client ira à l'hôpital ou aux UMJ. L'OPJ ne peut pas toujours répondre à cette question car il n'a pas, en général, la réponse en raison des lourdeurs de procédures internes à la police en matière d'envoi de gardés à vue aux UMJ (nécessité d'obtenir un car de transfèrement qui ne dépend pas de l'OPJ, examen médical à la durée aléatoire, et retour tout aussi complexe).

Les évènements extérieurs (manifestations de voie publique et autres) peuvent aussi retarder la procédure. La complexité des structures policières peut ponctuellement être une source de lourdeur dans les gardes à vue et les démarches qui en découlent. Sachant que ce ne sont pas les mêmes personnes qui gèrent procédures judiciaires et transport des gardés à vues, des retards surviennent.


Fonctionnement du Parquet pendant la garde à vue

Par Monsieur Arnaud Faugère


Il est nécessaire d'expliquer concrètement le fonctionnement à la section P12.

Le traitement de l'urgence dans le temps de la garde à vue, de l'enquête et direction de l'enquête incombe au procureur (C. pr. pén., 41). La section P12 assure le contrôle, la régularité de la procédure, la proportionnalité des mesures de contraintes utilisées, et l'opportunité des mesures d'investigations envisagées par les OPJ.

Les différentes fonctions sont réalisées à travers les permanences assurées par plusieurs sections : une section générale (P12) et des sections spécialisées (section des mineurs, par exemple). La section P12 est composée de 12 magistrats et a pour compétence les délits de droit commun, hors mineurs et contentieux spécialisés. Ils gèrent les affaires de 9 à 19 heures. La nuit, ce sont des magistrats d'autres sections qui gèrent les appels d'urgence. La garde de nuit se fait à domicile avec un téléphone portable sur lequel le parquetier peut être joint. Pendant la journée, il y a trois magistrats de permanence qui siègent au P12 ; un quatrième intervient de 17 heures à 19 heures. Il y a également la garde criminelle qui s'occupe des crimes de droit commun (viol, meurtres, faits de violence grave etc.).

Les magistrats sont au standard téléphonique et assurent la gestion de toutes les affaires de garde à vue -urgence et flagrance-. En moyenne, il y a 100 à 120 appels environ par magistrat et par jour entre 9 heures et 19 heures. Les horaires de déjeuner sont imposés (11h45 à 13h00 — 12h30 à 13h45 — 13h00 à 14h15) de manière à ce qu'il y ait toujours une permanence.

Les magistrats sont assistés par un greffe qui gère le standard permettant de visualiser le nombre d'appels reçus, l'heure de l'appel, l'origine de l'appel, le temps écoulé, la nouveauté de l'affaire etc...

Concrètement, au début de sa journée, le magistrat répond aux appels et remplit une fiche téléphonique assez simple concernant le service, la qualification des faits, le nom du gardé à vue, les principaux éléments de l'affaire et les instructions qu'il donne. Il s'assure de la régularité de la garde à vue à charge pour les enquêteurs d'exécuter les instructions : auditions des témoins, enquêtes de voisinage etc...

Un compte rendu lui est fait à 15 heures mais il ne s'agit pas d'un horaire de principe où les OPJ doivent rendre compte. Le parquetier indique, au coup par coup, sur chaque dossier, le moment auquel il souhaite que soit effectué le prochain compte rendu.

La gestion de la permanence garde à vue est assez intense et l'intérêt est d'avoir une certaine réactivité et une réponse en temps réel. La réactivité du magistrat dépend de la qualité des comptes-rendus effectués.

Aussi, il est imposé aux parquetiers des contrôles à toutes les étapes de la garde à vue : placement, prolongation, levée, à chaque compte-rendu, pour s'assurer de la nécessité de celle-ci. Il est aussi imposé au parquetier une visite des locaux de gardes à vue au moins une fois par an.

Le contrôle aboutit à l'orientation de la procédure de garde à vue et notamment à la décision de la poursuite, qui est une des prérogatives du Parquet ainsi que le mode de saisine choisi, qui peut être soit un déferrement ou une comparution immédiate.

Pourquoi que le Parquet décide-t-il d'un déferrement ?

Il peut s'agir, d'abord, en raison de la gravité des faits reprochés au gardé à vue, du risque de réitération éventuel, des garanties de représentation, de la sensibilité de l'affaire ou de la politique pénale du Parquet (chaque Parquet ayant ses priorités).

La comparution immédiate a vocation à apporter une réponse immédiate, souvent sous la forme de prison ferme. La décision de déferrement et de comparution immédiate se fait aussi au regard de certains contraintes d'organisation.

A Paris, il y a deux audiences CI par jour, sauf le lundi (trois), le samedi (une), le dimanche (aucune) ; pour chaque audience, peuvent être audiencés un maximum de 15 dossiers et/ou 18 prévenus. Parfois au Parquet, le chef de section veille à la priorisation parmi les dossiers lorsqu'on est au-delà des chiffres prévus. Deux points d'étapes : un déferrement à 13 heures et à 19 heures.

Il n'y a pas d'objectifs de statistiques de comparution immédiate, ni de nombre de personnes incarcérées et la suspicion sur le magistrat n'est pas fondée. Sur les dossiers sensibles, il y a une obligation d'information de la hiérarchie. S'agissant du temps du déferrement (C. pr. pén. art. 803-3), il y a un délai de 20 heures à repecter pour les parquetiers. C'est une contrainte légale qui oblige à prioriser les dossiers tous les jours. Il est institué une sorte de droit de suite pour les parquetiers sur les dossiers qu'ils ont suivi mais ce n'est pas toujours le cas.

Le Parquetier doit ainsi, tous les jours, lire les dossiers, les qualifier, les transmettre au greffe, notifier la décision de poursuite au mis en cause avec la présence de l'avocat, le cas échéant, voire d'un interprète. Si le mis en examen souhaite un avocat, il y a interruption de la procédure.

Les conditions de travail du parquetier sont assez difficiles. Il y a même des dossiers que le parquetier découvre à l'audience, sans connaître la position des avocats. Il est donc contraint de s'adapter, surtout lorsqu'il y a des conclusions de nullité, soulevées par l'avocat et dont il ne prend connaissance qu'au début de l'audience.

La jurisprudence a d'ailleurs relevé que l'annulation de la garde à vue n'entraîne pas l'annulation du reste de la procédure, tant que les actes postérieurs ne trouvent pas leur support nécessaire dans la garde à vue annulée (Voir, en ce sens, Cass. crim., 26 juillet 2008, n˚ 07-83.814, FP-P+F). Ainsi, le déferrement et la saisine de la juridiction sur le mode de la comparution immédiate ne sont pas affectés par l'annulation éventuelle de la garde à vue.