La prééminence de l’accord d’entreprise entérinée (fr)

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Auteur : Raphaëlle Labat, juriste chez Fidal
Septembre 2017




La prééminence de l’accord d’entreprise est confirmée, allant même dans certains cas jusqu’à la primauté. Il convient de distinguer trois blocs distincts.


Le bloc 1 : la primauté de l’accord de branche

Avant la loi du 4 mai 2004, un accord d’entreprise ne pouvait qu’améliorer l’accord de branche mais cette loi a établi qu’un accord d’entreprise pouvait déroger à un accord de branche dans un sens moins favorable, excepté dans quatre domaines (salaires minima, classifications, protection sociale complémentaire et mutualisation des fonds de la formation professionnelle) et sauf si la branche l’interdisait (clauses de « verrouillage »). La loi Travail d’août 2016 a ajouté deux thèmes au domaine « sanctuarisé » : prévention de la pénibilité et égalité femmes-hommes.

A première vue, l’ordonnance élargit encore ce sanctuaire en y ajoutant des thèmes, mais en supprime un au passage :

  • les salaires minimas hiérarchiques ;
  • les classifications ;
  • la mutualisation des fonds de financement du paritarisme ;
  • la mutualisation des fonds de la formation professionnelle ;
  • les garanties collectives complémentaires en protection sociale  ;
  • les mesures relatives à la durée du travail, à la répartition et à l’aménagement des horaires pour les temps partiels ;
  • les mesures relatives aux CDD et aux contrats de travail temporaires (durée totale du contrat, nombre de renouvellements, transmission du contrat, succession et délai de carence) ;
  • les mesures relatives au contrat de chantier ;
  • l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
  • les conditions et les durées de renouvellement de la période d’essai ;
  • les modalités selon lesquelles la poursuite des contrats de travail est organisée entre deux entreprises lorsque les conditions pour le transfert du contrat de travail ne sont pas réunies.
  • Les cas de mise à disposition d’un salarié temporaire auprès d’une entreprise utilisatrice mentionnés (pour une mission consistant à favoriser le recrutement de personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières ou pour assurer un complément de formation professionnelle au salarié) ;
  • La rémunération minimale du salarié porté, ainsi que le montant de l’indemnité d’apport d’affaire.

Toutefois, cette inflation n’est qu’apparente car certains sujets étaient réservés à la loi et désormais passent à la branche (ex : aux CDD et aux contrats de travail temporaires) alors que d’autres étaient déjà réservés à la branche.

Le bloc 2 : les clauses de verrouillage de la branche

Dans les domaines listés dans le bloc 2, et à condition de l’indiquer expressément, la branche peut décider de faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise, même conclu postérieurement. Seule exception là encore, l’accord d’entreprise pourrait trouver à s’appliquer s’il comporte des garanties au moins équivalentes à celles de l’accord de branche.

Les quatre domaines sont les suivants :

  1. la prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels énumérés à l’article L. 4161-1 ;
  2. l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés ;
  3. l’effectif à partir duquel les délégués syndicaux peuvent être désignés, leur nombre et la valorisation de leurs parcours syndical ;
  4. les primes pour travaux dangereux ou insalubres

L’ordonnance prévoit que les clauses de verrouillage existantes peuvent continuer à produire leurs effets, à la condition que la branche confirme sa volonté en ce sens avant le 1er janvier 2019.

Le bloc 3 : de primauté de l’accord d’entreprise

Le projet d’ordonnance prévoit désormais que lorsqu’on se trouve hors champ des blocs 1 et 2, l’accord d’entreprise prime sur l’accord de branche (C. trav., art. L. 2253-3). La logique suivie par l’ordonnance est dans la lignée des évolutions législatives des quinze dernières années : faire de l’entreprise l’échelon central de négociation.