Le blocage d'une succession (fr)

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.
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Auteur : Murielle Cahen
Avril 2017


« L’héritage. C’est sous ce mot que le langage commun désigne, plus couramment, la succession »[1]. La succession est un mode de transmission de bien à titre gratuit.


Selon l’article 720 du code civil, « les successions s’ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt ». Cet article ne pose pas uniquement la condition de l’ouverture de la succession mais également le lieu d’ouverture de la succession.

Ainsi, c'est le code civil qui régit le mécanisme de succession par ordre légal des héritiers sauf dans certains cas où le défunt peut avoir fait appel à un notaire. Ce dernier va s’occuper de la gestion de la succession en rédigeant le testament selon les dernières volontés de la personne mais aussi son exécution par la suite, en dressant un inventaire des biens, en établissant la liste des héritiers, ou encore en procédant à la déclaration de succession…

Une fois toutes ces modalités accomplies, il demeure aux héritiers de se prononcer sur leurs choix. S’offre à eux ce qu’on appelle « l’option successoral » qui leur permet soit une acceptation pure et simple de la succession, soit une acceptation à concurrence de l’actif. La dernière option consiste à refuser la succession.

Lorsqu’elles sont acceptées, les successions peuvent être sources de conflits, et ce notamment au moment de la liquidation puisqu'elles peuvent aboutirent à des situations de blocage. C'est pourquoi il conviendra d'identifier les différents motifs qui peuvent paralyser une succession (I) avant d'étudier les différents mécanismes que le législateur a mis en place pour débloquer les situations (II).


Les causes des blocages successoraux

Les successions bloquées à cause d'un désaccord entre plusieurs héritiers sur un même bien constituent le cas le plus fréquent de blocage (B). Mais il existe également des pratiques frauduleuses qui peuvent conduire au blocage (A).


Les pratiques illégales

La première pratique illégale réprimée par l’article 778 du code civil est le recel successoral. Cette pratique frauduleuse n’est pas définie par le législateur mais par la jurisprudence. Il s'agit de « tout acte, comportement ou procédé volontaire par lequel un héritier tente de s’approprier une part supérieure sur la succession que celle à laquelle il a droit dans la succession du défunt et ainsi rompt l’égalité dans le partage successoral » (Cass. Civ. I, 15 avril 1890, 21 novembre 1955, 20 septembre 2006). »[2]

Aux côtés du recel, se trouve également l’abus de faiblesse. L'abus de faiblesse est défini par l'article 223-15-2 du Code pénal. Il s'agit de toute « exploitation de l'état d'ignorance, de vulnérabilité ou de sujétion psychologique ou physique d'une personne pour l'obliger à prendre des engagements, des décisions dont elle est incapable de mesure la portée »[3]. Comme le rappelle la décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 décembre 2014, ce délit a vocation à s'appliquer aux testaments.

Ces deux articles permettent de sanctionner la majorité des pratiques frauduleuse auxquelles les ayant-droits se livrent souvent.


L’indivision successorale

L'indivision «est le fait pour plusieurs personnes d'être propriétaires ensemble d'un même bien». Il s'agit donc de la situation où plusieurs ayant-droits héritent de biens qui appartiennent à l'ensemble des héritiers[4].

Lorsque le bien est indivis cela signifie que la jouissance ou la gestion de ce bien doit pouvoir profiter à tous les co-indivisaires. Toute décision concernant le bien en question doit être prise de manière unanime. Néanmoins, une indivision forcée est possible grâce à l'article 815-1 du Code civil qui permet d'établissement d'une convention d'indivision[5].

Lorsque les héritiers souhaitent procéder à la vente du bien et que l'un des héritiers exerce son droit de veto, cela va créer est une situation de blocage. Généralement, ce type de situation est fréquent lorsque la personne qui s’oppose à la vente occupe le bien à vendre.

Cette indivision peut être source de conflit entre les copropriétaires des biens. Il convient alors pour le bien de tous de procéder au partage de la succession.


Les modalités de déblocage d’une succession

Avant de procéder à un recours catégorique devant les juridictions (B), les héritiers peuvent par l’intermédiaire d’un notaire ou d’un avocat aboutir à une solution amiable (A).


Les solutions à l’amiable

Selon l’article 815 du code civil « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention ». Tout indivisaire peut donc demander le partage du bien indivis.

Cette solution s’offre aux co-indivisaires lorsqu’ils sont d’accord sur les modalités du partage. Ces derniers vont se concerter afin de constituer des lots et les répartir entre eux.

Selon l’article 835 du code civil, le partage lorsqu’il porte sur un bien meuble est un contrat consensuel et ne requiert aucune forme particulière. Mais lorsque le partage porte sur un immeuble, il est nécessaire de procéder par acte notarié.

A ce stade, une autre alternative peut être envisagée, celle du recours au mandat successoral. C’est la désignation d’un tiers pour la gestion du bien indivis dans ce cas, un acte sous seing privé est nécessairement établi par le notaire.

Après épuisement de toutes les voies de recours amiables, et si la situation demeure bloquée, il convient alors d’envisager l’action en justice.


Le partage judiciaire

Cette action en justice peut porter sur la désignation d’un mandat successoral judiciaire mais généralement elle porte sur le partage judiciaire.

Cela constitue donc l’ultime recours pour les co-indivisaires de voir enfin la situation se débloquer. Cette action en justice est une procédure lourde et longue. En matière de contentieux successoral, c’est le tribunal de grande instance du lieu d’ouverture de la succession qui est compétent.

Ce type de partage est dit égalitaire. Il existe deux conceptions du partage égalitaire, cela peut porter sur une égalité en nature et dans ce cas chaque héritier disposera du même bien que les autres héritiers ou une égalité de valeur.

La procédure consiste à la nomination par le juge d’un juge-commissaire qui à son tour va désigner un notaire. Sa mission consiste en la liquidation de la succession. Pour se faire, il devra évaluer les biens au jour le plus proche du partage puis constituer des lots afin de les transmettre aux héritiers. Si ces derniers contestent, le partage aura lieu par tirage au sort.

Références