Commissaire du gouvernement (fr)

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Missions

Mission principale

L'article L. 7 du Code de justice administrative dispose que le commissaire du gouvernement est un membre de la juridiction administrative qui a pour mission d'exposer, à l'audience publique, en toute indépendance, son opinion "sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent". C'est dire que le commissaire du gouvernement doit proposer une solution au juge, justifiée en fait et en droit.

La définition de cette mission est la codification d'une décision du Conseil d'État du 10 juillet 1957, Gervaise (Rec. C.E., p. 466), selon laquelle le commissaire du gouvernement

"a pour mission d’exposer au Conseil les questions que présente à juger chaque recours contentieux et de faire connaître, en formulant en toute indépendance ses conclusions, son appréciation, qui doit être impartiale, sur les circonstances de fait de l’espèce et les règles de droit applicables ainsi que son opinion sur les solutions qu’appelle, suivant sa conscience, le litige soumis à la juridiction"[1].

(NB : les commissaires du gouvernement membres d'une juridiction administrative sont distincts des commissaires du gouvernement de la République et de la Nouvelle-Calédonie - hauts fonctionnaires qui peuvent assister aux séances des formations administratives du Conseil d'Etat (articles R. 123-24 et R. 123-25 du Code de justice administrative), des commissaires du gouvernement qui peuvent assister les membres du gouvernement de la République française devant les assemblées parlementaires (article 31 alinéa 2 de la Constitution du 4 octobre 1958), ainsi que des commissaires du gouvernement d'autres juridictions spécialisées et personnes administratives, comme les autorités administratives indépendantes[2]).

Dénomination

Dans une décision du 30 novembre 2006, le Conseil constitutionnel, saisi d'une demande de déclassement par le premier ministre des articles L. 7 et L. 522-1 du Code de justice administrative a répondu favorablement. Il a jugé que ces deux articles avaient un caractère règlementaire, ouvrant la voix à une modification par le gouvernement de la dénomination actuelle par celle de "commissaire du droit" ou "commissaire de la loi" (la demande de déclassement publiée sur le site du Conseil constitutionnel a été tronquée et ne donne pas d'information à ce sujet, au contraire du Commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel, n°22, qui expose que : "La disparition du titre de « commissaire du gouvernement » devant les juridictions administratives était envisagée de longue date pour rétablir la coïncidence entre la vérité des fonctions et les faux-semblants de la dénomination").

Pour aller plus loin

  • L'article Commissaire du droit sur Wikipédia (attention, cet article anticipe la modification règlementaire)

Les conclusions

Les textes qualifient l'intervention du commissaire du gouvernement à l'audience publique de conclusions (article L. 522-1 du Code de justice administrative notamment).

Ces conclusions font aujourd'hui l'objet d'un encadrement juridique complexe.

Au niveau législatif d'abord, l'article L. 781-1 du Code de justice administrative dispose que lorsqu'un magistrat est simultanément affectés dans deux ou plusieurs tribunaux administratifs d'outre-mer et que sa venue à l'audience n'est pas matériellement possible dans les délais prévus, le commissaire du Gouvernement peut, le cas échéant, prononcer ses conclusions dans un autre tribunal dont il est membre, "relié, en direct, à la salle d'audience, par un moyen de communication audiovisuelle".

Ce véritable statut audio-visuel des conclusions commissariales enrichit singulièrement la question de leur statut oral et/ou écrit qui s'est dernièrement compliqué et qui résulte du fait que pendant longtemps, seule l'habitude le précisait.

Autres missions

Le Code de justice administrative reconnaît une autre mission au commissaire du gouvernement, celle de participer au règlement de la procédure contentieuse de l'affaire sur laquelle il aura à conclure.

  • Au Conseil d'État, (...). Le commissaire du gouvernement fait enfin partie des personnes compétentes pour renvoyer une affaire destinée à être jugée par une « sous-section jugeant seule » vers « deux sous-sections réunies » (qui est la formation de base de jugement des affaires), ou une affaire destinée à être jugée par toute formation de jugement vers la section du contentieux du Conseil d'Etat ou vers son assemblée du contentieux (article R. 122-17 CJA).

Il est possible également de reconnaître une autre mission à l'institutiuon commissariale, celle de mission doctrinale. En effet, les conclusions sont parfois publiées au Recueil des décisions du Conseil d'État...

Statut

Nomination

Depuis le décret du 19 décembre 2005, l'article R. 122-5 du Code de justice administrative prévoit que les commissaires du gouvernement au Conseil d'Etat sont désignés par arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, sur proposition du président de la section du contentieux.

Pour les tribunaux administratifs, ils sont désignés, selon l'article R. 222-23 du même Code, par arrêté du vice-président du Conseil d'État, mais sur proposition du président du Tribunal et après avis conforme du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel (C.S.T.A.C.A.A.). Il en va de même pour la nomination des commissaires dans les Cours administratives d'appel, l'article R. 222-32 renvoyant au régime prévu pour les tribunaux

Le Code prévoit que les premiers conseillers et conseillers du Tribunal (et donc des Cours) sont nommés dans ces fonctions selon les besoins de la juridiction. La pratique majoritaire est d'affecter un commissaire par formation de jugement[3], ce qui n'exclut pas parfois des difficultés de recrutement dans certaines juridictions[4].

Conseil d'État

Au Conseil d'État, le Code de justice administrative prévoit à son article R. 122-2 que les "fonctions" de commissaire du gouvernement sont attribuées à des conseillers d'Etat, des maîtres des requêtes ou des auditeurs membres de la section du contentieux. C'est dire que le pouvoir réglementaire considère que le commissaire appartient à la formation de jugement, sans remplir une fonction de juge au sens strict du terme.

Les affaires jugées en présence ou en absence du commissaire du gouvernement

Avec présence du commissaire du gouvernement

L'article L. 7 du Code de justice administrative, on l'a vu, prévoit normalement l'intervention du commissaire du gouvernement lorsqu'une affaire doit être jugée par une formation de jugement d'une juridiction administrative qui n'est pas spécialisée (Conseil d'État, Cour administrative d'appel, Tribunal administratif).

C'est ainsi qu' une partie du contentieux du droit des étrangers est jugé avec l'intervention d'un commissaire du gouvernement. A cet égard, le projet de loi sur l’immigration, qui a été adopté par le conseil des ministres le 29 mars 2006, et dont le titre III - comprenant les articles 33 à 58 - modifie ce contentieux, ne devrait pas faire évoluer le droit sur ce point. En effet, le garde des sceaux, ministre de la justice, lors de la réunion des chefs de juridiction administrative le 28 mars 2006 a annoncé que le juge du contentieux des titres de séjour serait "éclairé par les conclusions du commissaire du Gouvernement".

Mais les textes permettent également de déroger dans certains cas à cette régle.

Avec absence du commissaire du gouvernement

Le contentieux des arrêtés de reconduite à la frontière

L'article L. 776-1 du Code de justice administrative, redirige vers l'article L. 512-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (le droit spécial dérogeant au droit général, faisant que le Code de justice administrative est ici un Code suiveur), qui prévoit, dans sa rédaction issue de l'article 50 de la loi du 24 juillet 2006[5], explicitement que l'audience publique se déroule sans conclusions du commissaire du gouvernement.

Les référés

L'article L. 522-1 du Code de justice administrative renverse le principe posé par l'article L. 7 du même Code. Pour les procédures de référé, le principe est l'absence lors de l'audience de référé de conclusions de commissaire du gouvernement, sauf renvoi devant une formation collégiale (l'audience de référé se déroulant normalement à juge unique, devant le juge des référés).

Notes et références

  1. "Considérant que le commissaire du gouvernement près le Conseil du contentieux n’est pas le représentant de l’administration ; qu’en ce qui concerne le fonctionnement interne de cette juridiction il ne relève que de la seule autorité du président de celle-ci ; qu’il a pour mission d’exposer au Conseil les questions que présente à juger chaque recours contentieux et de faire connaître, en formulant en toute indépendance ses conclusions, son appréciation, qui doit être impartiale, sur les circonstances de fait de l’espèce et les règles de droit applicables ainsi que son opinion sur les solutions qu’appelle, suivant sa conscience, le litige soumis à la juridiction"
  2. À l'instar de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (C.N.I.L.), voyez sur son site.
  3. Selon l' Ac@démie de gymnopédie juridique.
  4. Selon le compte-rendu de l' USMA de la réunion du CSTACAA du 26 juin 2007, "Un échange a eu lieu sur les difficultés qui se présentent, dans certains tribunaux, pour trouver des magistrats qui acceptent de devenir commissaires, et qui aient une certaine ancienneté".
  5. Loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, J.O. n° 170 du 25 juillet 2006 page 11047

Textes

  • Décret n° 2005-1586 du 19 décembre 2005 modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative, J.O. 295, 20 décembre 1995, p; 19578, texte 47 (art. 2 et s.)

Bibliographie

Bibliographie en ligne

Sur le décret du 19 décembre 2005

  • Le communiquédu ministère de la justice
  • Marie-Christine de Montecler, "Un projet de décret pour « conventionnaliser » la procédure devant les juridictions administratives", A.J.D.A., 2005, n°40 du 28 novembre, rubrique "Au fil de la semaine", p. 2208.
  • Frédéric Sudre, “Vers la normalisation des relations entre le Conseil d’Etat et la Cour européenne des droits de l’homme - Le décret du 19 décembre 2005 modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative", Revue française de droit administratif, n° 2, 2006, pp. 286-299
  • Pierre-Olivier Caille,"Le décret du 19 décembre 2005: quel dialogue entre la France et la Cour européenne des droits de l’homme?", JCP A, 2006, p. 463.

Liens externes

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  • La présentation du décret du 19 décembre 2005, sur le site du ministère de la justice (déembre 2005).
  • La définition du Glossaire du site du Conseil d'État (voir au mot), reprise dans la page du même site consacrée aux Formations de jugement.
  • La définition de la mission du commissaire du gouvernement en anglais sur le site du ministère de la justice (mai 2001, voir aux mots government commissioner).
  • L'article de Wikipedia sur le commissaire du gouvernement.