Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (fr)

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.


Cet article est issu de JurisPedia, un projet dont la version en langue française est administrée par le Réseau Francophone de Diffusion du Droit. Pour plus de renseignements sur cet article nous vous invitons à nous contacter afin de joindre son ou ses auteur(s).
Logo jurispedia.png

France > Droit public (fr) > Droit administratif > Autorité administrative indépendante
France > Droit des médias > Droit du numérique
Fr flag.png

Selon l’article premier de la loi n°91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques[1], « Le secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques est garanti par la loi. Il ne peut être porté atteinte à ce secret que par l'autorité publique, dans les seuls cas de nécessité d'intérêt public prévus par la loi et dans les limites fixées par celle-ci. »

Cette loi est la pièce maîtresse de la création et du fonctionnement de la Commission nationale de contrôles des interceptions de sécurité (CNCIS).

Cette protection découle du droit au respect de la vie privée. Une exigence constitutionnelle selon laquelle « Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes. »

Si le respect des droits et des libertés fondamentales des personnes reste le principe, des interception de correspondances peuvent être autorisées à titre exceptionnel . Il s’agit des correspondances émises par voie de communications électroniques « ayant pour objet de rechercher des renseignements intéressant la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France, ou la prévention du terrorisme, de la criminalité et de la délinquance organisées et de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous en application de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées ».

Création de la CNCIS

La CNCIS est une autorité administrative indépendante. Elle a été instituée par la loi n°91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques. C’est la première autorité qui règlemente les écoutes téléphoniques. La mission première de la CNCIS est d’opérer un contrôle de la légalité des interceptions de sécurités c’est à dire des écoutes téléphoniques. Ce contrôle a été étendu aux interceptions de sécurités demandée en urgence absolue en 2003.

Composition

Les membres

La commission est composée d’un député désigné pour la durée de la législature par le président de l'Assemblée nationale et par un sénateur désigné après chaque renouvellement partiel du Sénat par le président du Sénat. Le mandat n’est pas renouvelable et il ne peut y être mis fin qu’en cas d’empêchement constaté par la CNCIS ou en cas de démission. Les membres de la commission sont soumis au principe d’incompatibilité avec la qualité de membre du Gouvernement ainsi qu’au respect des secrets protégés par les articles 413-10, 226-13 et 226-14 du Code pénal pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions (devoir de réserve).

Le président

Le vice-président du Conseil d'État et le premier président de la Cour de cassation établissent conjointement une liste de quatre noms. Le Président de la République désigne parmi cette liste, la personnalité qui présidera la CNCIS. Le mandat est d’une durée de six ans.

La saisine de la CNCIS

La CNCIS reçoit des réclamations de toute personne y ayant un intérêt direct et personnel c’est dire des réclamations de particuliers ou des dénonciations de l’autorité judiciaire. La CNCIS peut également s’autosaisir pour procéder au contrôle de toute interception de sécurité afin de vérifier la conformité aux dispositions de la loi du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques. Elle procède aux contrôles et enquêtes qui lui paraissent nécessaire en toute indépendance. A la suite de sa vérification, la CNCIS peut constater plusieurs situations : – existence d’une interception ordonnée par l’autorité judiciaire ; – existence d’une interception de sécurité décidée et exécutée dans le respect des dispositions légales ; – existence d’une interception de sécurité autorisée en violation de la loi ; – existence d’une interception “sauvage”, pratiquée en violation de l’article 1er du projet de loi par une personne privée ; – absence de toute interception.

Lorsque la CNCIS constate la violation de la loi du 10 juillet 1991, elle peut procéder de deux façons : – le pouvoir d’adresser au Premier ministre une recommandation tendant à faire interrompre une interception qui s’avérerait mal fondée. A la suite de quoi ce dernier informera la CNCIS de la suite donnée aux recommandations. – le pouvoir, qui est aussi un devoir, de dénonciation à l’autorité judiciaire de toute infraction à la loi du 10 juillet 1991qui pourrait être révélée à l’occasion de ce contrôle

A la différence des écoutes judiciaires ordonnées par un magistrat pour les besoins d'une enquête, la CNCIS est saisie pour les écoutes administratives. Ordonnées par le Premier ministre, ces écoutes ne peuvent être autorisées que pour obtenir « des renseignements intéressant la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France, ou la prévention du terrorisme, de la criminalité et de la délinquance organisées ». Selon l’article 22 de la la loi du 10 juillet 1991, ces juridictions compétentes et le Premier ministre peuvent demander des informations ou documents nécessaires à la réalisation et l'exploitation des interceptions autorisées par la loi. Cette demande est formulée auprès des personnes physiques ou morales exploitant des réseaux de communications électroniques ou fournisseurs de services de communications électroniques les informations. Refuser de communiquer des informations, documents ou de communiquer des informations erronés est puni par la loi de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende.

Missions

L’article 27 de la la loi du 10 juillet 1991dispose : « La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité exerce les attributions définies à l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques et à l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique en ce qui concerne les demandes de communication de données formulées auprès des opérateurs de communications électroniques et personnes mentionnées à l'article L. 34-1 du code précité ainsi que des prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée ».


Le contrôle des interceptions de sécurité

La CNCIS effectue plusieurs types de contrôles. Au départ, la loi du 10 juillet 1991 a prévu seulement un contrôle a posteriori de ces demandes. Mais avec l’accord du Premier Ministre, la commission a instauré un contrôle préalable aux décisions d’autorisation.

Le contrôle a priori des interceptions de sécurité

Le contrôle en amont est en fait un contrôle au préalable des décisions d’autorisation des interceptions de sécurité La CNCIS doit vérifier la légalité des demandes d’interception de sécurité. Pour cela elle contrôle systématiquement et de manière exhaustive toutes les demandes qui lui sont soumises. En 2003, le contrôle préalable de la CNCIS a été étendu aux interceptions demandées en urgence absolue car elle est la «  mieux à même de répondre à l’objectif de protection efficace des libertés poursuivi par le législateur ».

Le contrôle a priori des autorisation comporte deux aspects : les formalités et le respect des contingents

Contrôle a priori des autorisations

Ce contrôle formel a trait aux signataires des demandes d’autorisations. La CNCIS vérifie que ceux ci ont bien été habilité par le ou les ministres compétent. En effet, la loi n°2006-64 du 23 janvier 2006 a introduit une nouvelle disposition à l’article 4 de la loi du 10 juillet 1991. Chaque ministre peut déléguer sa signature à deux personnes, de façon permanente. « L'autorisation est accordée par décision écrite et motivée du Premier ministre ou de l'une des deux personnes spécialement déléguées par lui. Elle est donnée sur proposition écrite et motivée du ministre de la défense, du ministre de l'intérieur ou du ministre chargé des douanes, ou de l'une des deux personnes que chacun d'eux aura spécialement déléguées Le Premier ministre organise la centralisation de l'exécution des interceptions autorisées. »

Le respect des contingents

Les interceptions sont contingentés. En vertu de l’article 5 de la loi du 10 juillet 1991, il existe un nombre maximum d’interceptions pratiquées simultanément. Ce nombre est arrêté par le Premier ministre qui en réfère par la suite à la CNCIS. Ce contingentement né de la volonté de réaffirmer le caractère exceptionnel des interception de sécurité afin de protéger les libertés publiques.


Contrôle de la motivation et justification de la demande d’interception de sécurité

L’objectif premier de la CNCIS est d’effectuer des interceptions de sécurités. Ces interceptions doivent contribuer à assurer la sécurité de la Nation et de ses intérêts fondamentaux. Les motifs justifiants une demande d’interception de sécurité sont nombreux. L’article 3 de la loi 1991 fait référence à « la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France, ou la prévention du terrorisme, de la criminalité et de la délinquance organisées et de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous en application de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées. »

Pour chaque demande d’interception effectuée, il est nécessaire que le motif légal de justification soit explicitement cité. Ces informations vont permettre à la CNCIS d’apprécier la demande au regard de la pertinence des faits face droit. Le président de la CNCIS peut demander, dans le cadre de l’appréciation d’une demande d’autorisation d’interception, des informations complémentaires afin de rendre son avis.

La CNCIS s’assure que la demande d’autorisation respecte les principes de proportionnalité et de subsidiarité. Il est nécessaire qu’il y ait une relation de proportionnalité entre le but recherché et la mesure sollicitée. C’est dire que la gravité du risque ou du danger pour la sécurité des personnes, qu’elles soient physiques ou morales, ou pour la sécurité collective, doit être à la mesure de l’atteinte à la vie privée que constitue la surveillance de la correspondance par voie de communications électroniques, et justifier cette atteinte. Il est également nécessaire que le but recherché ne puisse pas être aussi bien atteint par d’autres moyens que par des interceptions de sécurité.

La base du contrôle de légalité effectuée par la CNCIS dépend de la motivation des demandes d’autorisation d’interception. Pour que la légalité de l’autorisation donnée par la CNCIS ne soit pas remise en cause, la motivation doit être : – suffisante, – pertinente, – et sincère.

Une motivation suffisante

La motivation d’une demande d’interception doit être suffisante en quantité et en qualité. En quantité , il est nécessaire que la commission ait des renseignements assez nombreux afin d’évaluer la dangerosité de la personnalité de la cible En qualité car la motivation doit être précise et complète. Il faut qu’à travers les informations fournies sur la personnalité de la cible, l’implication directe et personnelle de la cible apparaisse.

Une motivation pertinente

L’examen de la pertinence d’une motivation s’opère en fonction de trois points : – la motivation doit être exclusivement tournée vers la vocation préventive voulue par le législateur de 1991 pour les interceptions de sécurité. – la motivation doit exclusivement se référer à des investigations participant de l’activité de enseignement et en aucun cas pouvoir générer un « risque d’interférence » avec une action judiciaire déjà déclenchée ; – les soupçons qui pèsent sur la cible doivent nécessairement être en relation directe avec le motif.

Une motivation sincère

Tenter de contourner les principes de proportionnalité ou de subsidiarité affirmés dans la loi du 10 juillet 1991constitue forme d’insincérité au même titre que le mensonge. Alléguer d’un motif qui n’est pas sincère afin d’obtenir l’autorisation d’interception de sécurité est un extrêmement grave. Ce comportement le fruit d’un mensonge caractérisé et délibéré. Si l’autorisation a été accordée sur le fondement de ce motif, la légalité de l’interception est remise en cause.


Le contrôle a posteriori des interceptions de sécurité

Il s’agit d’un contrôle de l’exécution des interceptions de sécurité. Il porte sur trois phases : – l’enregistrement, la transcription et la durée des interceptions ; – les visites sur le terrain ; – l’instruction des réclamations des particuliers et les éventuelles dénonciations à l’autorité judiciaire.

Enregistrement, transcription et destruction

L’article 8 de la loi du 10 juillet 1991 dispose qu’est établi un relevé de toutes les opérations d’interception et d’enregistrement des interceptions de sécurité. Ce relevé qui mention la date et l'heure auxquelles elle a commencé et celles auxquelles elle s'est terminée, est établi sous l’autorité du Premier ministre. En 2002, a été mis en place un dispositif d’effacement automatique de l’enregistrement des interceptions de sécurité. Selon l’article 9 de la loi du 10 juillet 1991, « l'enregistrement est détruit sous l'autorité du Premier ministre, à l'expiration d'un délai de dix jours au plus tard à compter de la date à laquelle il a été effectué ». A expiration de ce délai est également dressé un procès verbal de destruction ces enregistrements.

La la loi du 10 juillet 1991dispose également dans son article 12 que les transcriptions d'interceptions doivent être détruites, sous autorité du Premier ministre, dès que leur conservation n'est plus indispensable. C’est dire lorsque qu’on été recueillis les renseignements nécessaires intéressant la sécurité nationale, la prévention du terrorisme et que leur conservation ne présente plus d’utilité pour l’exécution de la mission poursuivie.

Les visites sur le terrain

La CNCIS peut également poursuivre sa mission de contrôle sur le terrain. Dans ce cas, elle rend des visites programmées ou inopinées aux service des utilisateurs d’interception de sécurité. Les contrôles effectués lors de ces visites portent sur la sécurisation des locaux, les interceptions en cours, l’examen des relevés d’interception et d’enregistrement et des procès-verbaux de destruction des enregistrements et des transcriptions. Lors de chaque visite est dressé une liste des pratiques et procédures qui ont été mises en oeuvre par les services concernés. Cet inventaire va permettre de vérifier la bonne application de la loi du 10 juillet 1991.

Liens externes

Voir aussi

« Erreur d’expression : opérateur / inattendu. » n’est pas un nombre.


Notes et références