Harcèlement sexuel : nouvelle définition et actualités. Une nouvelle définition du harcèlement sexuel vient compléter la précédente, elle entrera en vigueur le 31 mars 2022

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.

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 Franc Muller, avocat au barreau de Paris [1]

Septembre 2021


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Nouvelle définition du harcèlement sexuel


La lutte contre les violences faites aux femmes, qui a tardé à être prise en considération par le législateur, a connu un développement récent sous l’impulsion du mouvement metoo, incitant les pouvoirs publics à réagir.


Le harcèlement sexuel, qui en est une forme, a déjà fait l’objet de plusieurs définitions dans le code pénal (article 222-33 [2]) et dans le code du travail (article L 1153-1 [3]), ce dernier précisant qu’aucun salarié ne doit subir des faits :


Soit de harcèlement sexuel , constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.


Cette définition vient d’être modifiée une nouvelle fois par la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021.


Elle ajoute d’une part (dans le premier alinéa) que le harcèlement sexuel [4] est constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés.


En outre, la définition intègre le caractère collectif des agissements, qui sont subis par le(a) salarié(e) qui en est victime, en complétant cet article ainsi :


Le harcèlement sexuel [5] est également constitué :


a) Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;


b) Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.


Ces dispositions entreront en application le 31 mars 2022.


Bref tour d’horizon d’accords collectifs et autres relatifs au harcèlement sexuel


La prise en compte du harcèlement sexuel nécessite aussi une participation active des entreprises.


La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 impose aux entreprises employant plus de 250 salariés la désignation d’un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes (article L 1153-5-1 du code du travail [6]).


En outre, chaque Comité Social et économique (CSE) doit désigner parmi ses membres un tel référent (article L 2314-1 du code du travail [7]).


Des négociations entre partenaires sociaux ont été engagées, donnant lieu à la conclusion de nombreux accords d’entreprise tous secteurs d’activité confondus.


On signalera entre autres un accord relatif à la lutte contre le harcèlement sexuel et le harcèlement moral conclu par la Mutualité Social Agricole Auvergne, un autre dans le secteur du logement (OPH de la Haute Marne), et dans le domaine de l’assurance (La Mondiale Groupe), etc…


Les accords de branche sont plus rares, on mentionnera à cet égard la convention collective nationale des détaillants en chaussures, qui a conclu un accord de branche [8] le 21 octobre 2019 relatif à la protection contre le harcèlement sexuel et les agissements à caractère sexiste.


Celui-ci comporte le préambule suivant, particulièrement éclairant :


Les attitudes et comportements sexistes ont des répercussions directes à la fois sur le bien-être au travail et sur le sentiment de compétence, de légitimité, de confiance en soi. En effet, suite à une étude effectuée en 2016 par le conseil supérieur de l’égalité professionnelle, il ressort que 81 % des femmes victimes de sexisme ont déjà adopté une conduite d’évitement, 80 % des femmes salariées considèrent que, dans le monde du travail, elles sont régulièrement confrontées à des attitudes ou des décisions sexistes et 93 % des femmes considèrent que ces attitudes peuvent modifier le comportement des salariées et amoindrir leur sentiment d’efficacité personnelle. Les partenaires sociaux s’accordent, en effet, sur le fait que les entreprises de la branche doivent faire preuve d’une particulière attention sur la prévention des actes et agissements à caractère sexiste et sur les cas de harcèlement sexuel.


Le monde du cinéma n’est pas en reste, probablement marqué par l’affaire Weinstein.


Le code du cinéma et de l’image animée un article (122-36-1 [9]) subordonne ainsi le versement de toute aide financière, au respect par le bénéficiaire de de ses obligations de prévention du harcèlement sexuel et de mise en œuvre de mesures propres à y mettre un terme et à le sanctionner.


Le dossier de demande d’aide doit notamment indiquer les mesures prises pour mettre en place un dispositif d’information dans les lieux de travail, y compris les lieux de tournage, sur les textes de référence définissant et sanctionnant le harcèlement sexuel, sur les actions en justice ouvertes en matière de harcèlement sexuel et sur les coordonnées des autorités et services compétents.


Enfin, on conclura en relevant, l’exemple venant d’en haut, que les plus hautes autorités de l’état semblent s’être saisies du sujet.


Un arrêté très récent du 19 juillet 2021 [10], relatif au dispositif de recueil et de traitement des signalements d’actes de violence à caractère sexuel, de discrimination, de harcèlement sexuel et d’agissements sexistes dans les services du Premier ministre, vient en effet d’être publié cet été.


Il prévoit la création d’une mission VIGISEXISME auprès du secrétaire général du Gouvernement, avec la mise en œuvre d’un dispositif ouvert à l’ensemble des agents des services du Premier ministre qui s’estiment victimes ou témoins d’actes de violence à caractère sexuel, de discrimination, de harcèlement sexuel ou d’agissements sexistes sur leur lieu de travail ou dans l’exercice de leurs fonctions.


On s’interroge sur le point de savoir si de telles dispositions seront également prises par la présidence de la République…