L’amende forfaitaire majorée : comment se défendre ? (fr)
France > Droit privé > Droit automobile
Didier Reins, avocat au barreau de Strasbourg
Novembre 2018
Les données du problème
Il arrive à beaucoup d’automobilistes d’oublier de payer leurs amendes après avoir commis des infractions au Code de la route.
Plus tard, l’automobiliste reçoit alors un avis d’amende forfaitaire majorée.
Il faut alors réagir très vite car :
- Il faut éviter le paiement de l’amende majorée dont le montant peut être élevé ;
- Il faut éviter un retrait de points.
Le réflexe indispensable à avoir
Lorsqu’il reçoit un avis d’amende forfaitaire majorée, l’automobiliste peut et doit se défendre.
Celui-ci a délai de 30 jours pour contester l’infraction qui lui est reprochée.
Pour cela, il faut écrire à l’officier du ministère public (l’adresse figure sur l’avis d’amende forfaitaire majorée).
Cela est prévu à l’article 530 du Code de procédure pénale qui énonce :
“Dans les trente jours de l’envoi de l’avis invitant le contrevenant à payer l’amende forfaitaire majorée, l’intéressé peut former auprès du ministère public une réclamation motivée qui a pour effet d’annuler le titre exécutoire en ce qui concerne l’amende contestée…”
Dans ce recours, il faudra expliquer les raisons pour lesquelles il conteste l’infraction.
Cela va entraîner automatiquement l’annulation de l’amende forfaitaire majorée.
L’officier du ministère public devra informer le comptable de la direction générale des finances publiques de l’existence d’une contestation et de l’annulation de l’amende forfaitaire majorée.
Cela est prévu à l’article R 49-8 du code de procédure pénale qui dit :
“L’officier du ministère public saisi d’une réclamation recevable informe sans délai le comptable de la direction générale des finances publiques de l’annulation du titre exécutoire en ce qui concerne l’amende contestée”
L’officier du ministère public va ensuite procéder à une étude du dossier et des motifs de contestation.
Cet officier pourra alors :
- Valider les arguments de l’automobiliste et prononcer le classement sans suite de l’affaire.
Les poursuites sont abandonnées.
Donc : il n’y aura ni amende ni de retrait de points. On mesure donc là toute l’utilité qu’il y a à présenter une requête en contestation. ou…
- Convoquer l’automobiliste devant le tribunal pour que ce dernier puisse se défendre et obtenir sa relaxe.
Si le dossier est bien préparé, la relaxe peut être obtenue.
Par ailleurs, une telle requête en contestation peut prendre du temps.
Donc tant que l’affaire n’est pas tranchée, l’automobiliste conserve ses points.
Étant donné qu’il lui reste au moins un point sur son permis, il dispose de la possibilité de faire un stage de reconstitution de points qui lui apportera quatre points supplémentaires.
On mesure là encore l’avantage qu’il y a à faire un tel recours.
L’amende forfaitaire majorée : élément déclencheur du retraits de points
L’amende forfaitaire majorée a une conséquence juridique redoutable : elle est l’élément déclencheur du mécanisme de retrait de points.
Donc dès que l’amende forfaitaire majorée est émise, les points vont être automatiquement retirés du permis de conduire.
Il y a donc là une différence essentielle avec l’amende forfaitaire :
- L’amende forfaitaire n’entraîne pas de retrait de points tant qu’elle n’est pas payée ;
- L’amende forfaitaire majorée entraîne un retrait de points avant même d’être payée.
Le fait de ne jamais payer une contravention ne vous met donc pas à l’abri d’un retrait de points.
Cela est vrai pour l’amende forfaitaire mais pas pour l’amende forfaitaire majorée.
Dès que la majoration est prononcée, le retrait de points s’en suit automatiquement même si vous n’avez pas encore réglé cette majoration.
Pour éviter un retrait de points et le paiement de la majoration, il est indispensable de faire un recours contre l’amende forfaitaire majorée.
Un tel recours va entraîner des conséquences juridiques favorables à l’automobiliste.
Les conséquences juridiques découlant de la contestation de l’amende forfaitaire majorée
Première conséquence juridique : l’amende forfaitaire majorée est annulée.
Cela signifie qu’il n’y aura donc plus majoration de l’amende forfaitaire.
L’automobiliste n’a rien à payer tant que l’officier du ministère public ne s’est pas prononcé sur la contestation.
Seconde conséquence juridique : l’infraction n’est plus considérée comme établie.
C’est important car le code de la route précise que le retrait des points s’effectue dès lors que l’infraction est considérée comme établie.
En effet, l’article L 223-1 du Code de la route qui dispose :
« Le permis de conduire est affecté d’un nombre de points… La réalité d’une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d’une amende forfaitaire ou l’émission du titre exécutoire de l’amende forfaitaire majorée, l’exécution d’une composition pénale ou par une condamnation définitive. »
Troisième conséquence juridique : si l’administration a déjà retiré les points sur le permis de l’automobiliste, celle-ci doit les lui restituer.
Si l’automobiliste est ultérieurement convoqué devant le tribunal et que le juge pénal le condamne, l’administration pourra alors retirer à nouveau les points en question.
La contestation devant la juridiction administrative
Que faire si l’administration tarde à restituer au conducteur les points qui ont été retirés de son permis de conduire.
Hypothèse : un automobiliste a fait un recours contre d’une amende forfaitaire majorée.
Ce recours a entraîné l’annulation du titre exécutoire qu’est l’amende forfaitaire majorée.
Par la suite, l’automobiliste a obtenu gain de cause :
- Soit, car l’officier du ministère public a classé le dossier sans suite ;
- Soit, car l’automobiliste a été relaxé devant le tribunal.
Dans l’un ou l’autre cas, l’administration doit restituer à cet automobiliste les points retirés.
Si elle ne le fait pas, ou tarde à le faire, l’automobiliste peut saisir le tribunal administratif.
Celui-ci devra rapporter au tribunal la preuve que la réalité de l’infraction n’est pas établie.
ATTENTION : il ne faut pas se tromper dans la formulation des arguments.
Le juge administratif n’est pas le juge pénal.
Il n’est donc pas là pour dire si une infraction a ou non été commise.
L’automobiliste ne doit pas se contenter de produire une copie du recours exercé devant l’officier du ministère public.
Il doit produire tous les éléments permettant de avoir quelles suites qui ont été données à sa requête.
L’automobiliste pourra produire le jugement de relaxe qu’il aura obtenu devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police.
Si l’officier du ministère public a fait droit à sa requête, l’automobiliste n’a donc pas été convoqué devant le tribunal.
Il pourra alors produire un document qui est le “bordereau de situation des amendes et des condamnations pécuniaires”, tenu par le comptable public.
Ce document révélera si l’amende forfaitaire majorée a finalement été annulée.
En pareille situation, cela signifiera qu’aucune infraction n’a été retenue à l’encontre de cet automobiliste et qu’aucun retrait de points ne pouvait être effectué sur son permis de conduire.
Pour obtenir ce document, l’automobiliste peut le demander sur le fondement de l’article L 311-1 du Code des relations entre le public et l’administration qui prévoit que les diverses administrations sont tenues “de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande “
Conclusions
La réception d’une amende forfaitaire majorée ne signifie pas qu’il n’y a plus rien à faire.
Au contraire !
C’est à ce moment-là que l’automobiliste doit se défendre.
Avant de recevoir un tel avis, l’automobiliste ne risque pas de perdre ses points s’il ne paye pas l’amende forfaitaire.
Mais après la majoration, le mécanisme de retrait des points est déclenché.
La majoration elle-même peut être parfois très élevée, surtout pour les automobilistes dont les moyens financiers ne sont pas importants.
D’où la nécessité de connaître et de faire valoir ses droits en toutes circonstances.