Le CRE RATP condamné à payer 210 000€ pour licenciement injustifié et harcèlement moral (fr)
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Publié le 6 decembre 2016. Blog de Me Frédéric Chhum
Mots clefs : Licenciement, harcèlement moral, CE, CHSCT
Fin août, les prud'hommes de Bobigny ont condamné le comité d'entreprise de la RATP à verser à son ancien directeur de la culture et des loisirs 210 000€ de dommages et intérêt pour licenciement nul et harcèlement moral. Le CE demandait à la cour d'appel de Paris de pouvoir ne pas payer tout de suite : il a été débouté le 30 novembre dernier. Explications et rappel des faits.
Le CE qui emploie des salariés est un employeur comme un autre : le licenciement d'un personnel doit être justifié. Récemment, le licenciement par un comité d'entreprise d'une secrétaire comptable a été validé par la justice -l'affaire est remontée jusque devant la Cour de cassation- car le maintien dans le poste de cette salariée était jugé incompatible avec les faits démontrés par le CE employeur : refus par la salariée de communiquer des informations, comportement violent, sauvegardes informatiques insuffisantes de sa part, etc. (voir notre article). Inversement, un CE jugé coupable d'avoir commis un licenciement nul doit verser à son salarié les sommes que la justice attribue à la victime. C'est ce qu'on peut déduire d'une ordonnance de la cour d'appel de Paris du 30 novembre 2016.
Licenciement nul et harcèlement moral
Le 26 août 2016, le conseil des prud'hommes de Bobigny (Seine-Saint-Denis) condamne le CRE RATP, c'est à dire le comité d'entreprise de la régie autonome des transports parisiens, à verser près de 210 000€ à l'ancien directeur de la culture et des loisirs du CE, dont 100 000€ de dommages et intérêt pour licenciement nul et 30 000€ de dommages et intérêts pour harcèlement moral. Les faits paraissent accablants aux yeux des juges (voir notre encadré et l'intégralité du jugement en pièce jointe). Le CE doit procéder rapidement à ces versements car il s'agit ici d'une "exécution provisoire", c'est à dire d'une obligation pour la partie condamnée d'appliquer le jugement même si elle fait appel de celui-ci.
Le salarié ne peut pas être privé de ses droits
Devant la cour d'appel de Paris, le CE de la RATP demande l'arrêt de l'exécution provisoire de cette condamnation. Autrement dit, le CE réclame le droit de ne pas verser ces sommes au motif qu'en cas d'infirmation du jugement prud'homal en appel, son ancien salarié risquerait de ne pas lui rembourser cet argent. "Il serait paradoxal de faire profiter l'appelant (Ndlr : le CE) de ce qu'il a apparemment irrégulièrement licencié son salarié dans des conditions irrespectueuses pour priver ce dernier de ses droits issus d'une décision judiciaire. En conséquence, les condamnations assorties de l'exécution provisoire ne risquent pas, selon toute apparence, de ruiner la trésorerie du comité d'entreprise et d'entraîner pour lui des conséquences manifestement excessives au sens de l'article 524 du code de procédure civile", décide, non sans ironie, la cour d'appel.
L'article 524 du code de procédure civile
L'article 524 du code de procédure civile prévoit en effet seulement deux cas permettant à un juge en appel de revenir sur cette exécution provisoire : lorsqu'elle est interdite par la loi (et donc décidée à mauvais escient par le premier juge) et lorsqu'elle risque d'entraîner "des conséquences manifestement excessives". Ces conséquences doivent être appréciées, note la cour d'appel, "par rapport à la situation du débiteur compte tenu de ses facultés par rapport à celles de remboursement de la partie adverse". Autrement dit, une décision entraînant un risque de faillite ou de grande difficulté pourrait être reconsidérée. Or, observe les juges, dans cette affaire, le CE n'a fait état d'aucune difficulté financière.
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