Les modes de saisine du JAF (fr)

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Compte-rendu de la réunion du 27 mars 2014 de la Commission Famille du barreau de Paris réalisé par Anne-Lise Lonné-Clément, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo – édition privée


Commission ouverte : Famille
Responsable : Hélène Poivey-Leclercq,avocat au barreau de Paris


Intervenants : Muriel Laroque et Muriel Cadiou, avocates à la cour


Le juge aux affaires familiales (JAF) a été créé par la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 (N° Lexbase : L8449G8G), et correspond à l'ancien juge aux affaires matrimoniales (JAM). Sa compétence est extrêmement élargie dans les procédures de divorce, d'après-divorce, d'autorité parentale, etc.. En définitive, il est juge conciliateur, juge des mesures provisoires, juge de la modification des mesures provisoires, juge de la mise en état, juge des mesures d'urgence, juges des mesures accessoires ou encore juge liquidateur.

Le texte fondateur définissant les compétences du JAF est l'article L. 213-3 du Code de l'organisation judiciaire (N° Lexbase : L7200IMM), auquel il convient toujours de se référer en cas de doute, pour vérifier la compétence du JAF.

Aux termes de cet article, "le juge aux affaires familiales connaît :

De l'homologation judiciaire du changement de régime matrimonial, des demandes relatives au fonctionnement des régimes matrimoniaux et des indivisions entre personnes liées par un pacte civil de solidarité ou entre concubins, de la séparation de biens judiciaire, sous réserve des compétences du président du tribunal de grande instance et du juge des tutelles des majeurs ;

Du divorce, de la séparation de corps et de leurs conséquences, de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux, des personnes liées par un pacte civil de solidarité et des concubins, sauf en cas de décès ou de déclaration d'absence ;

Des actions liées :

a) A la fixation de l'obligation alimentaire, de la contribution aux charges du mariage ou du pacte civil de solidarité et de la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants ; b) A l'exercice de l'autorité parentale ; c) A la révision de la prestation compensatoire ou de ses modalités de paiement ; d) Au changement de prénom ; e) A la protection à l'encontre du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin violent ou d'un ancien conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin violent ; f) A la protection de la personne majeure menacée de mariage forcé".


1. La saisine du JAF pendant le mariage

1.1. Les compétences du JAF dans le domaine du régime primaire impératif

L'article 214 du Code civil (N° Lexbase : L2382ABT) relatif à la contribution aux charges du ménage, prévoit que "si l'un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être contraint par l'autre dans les formes prévues au Code de procédure civile".

Il convient de distinguer les demandes afférentes à l'exécution d'un époux de sa contribution aux charges du mariage, selon la situation d'urgence : à défaut d'urgence, une simple requête auprès du juge suffit ; en cas d'urgence, il convient de procéder par assignation en la forme des référés (différente du référé familial), selon la procédure prévue à l'article 1137 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1712H48).

Il faut savoir qu'il est également possible de saisir le JAF en contribution aux charges du mariage même si une requête en divorce a été déposée ; il s'agit alors de demander au juge du divorce, saisi de la tentative de conciliation, par une assignation en la forme des référés, d'audiencer la demande afférente à la contribution aux charges du mariage en même temps que les mesures provisoires.

Le JAF est également compétent pour connaître de toutes les demandes de pensions alimentaires par les ascendants à leurs enfants (C. civ., art 205 N° Lexbase : L2270ABP). La pension peut également être demandée aux gendres et belles-filles.

S'agissant des mesures relatives au logement de la famille, l'article 217 du Code civil (N° Lexbase : L2386ABY) prévoit qu'"un époux peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si celui-ci est hors d'état de manifester sa volonté ou si son refus n'est pas justifié par l'intérêt de la famille". Il est ainsi possible, par exemple, de saisir le JAF pour être autorisé à vendre seul le logement de la famille, en cas de nécessité pour des raisons financières, alors que le conjoint s'y oppose sans motif légitime. Dans ce cas, l'époux peut procéder par requête ; mais il peut également, en cas d'urgence (signature d'une promesse de vente en cas d'acquéreurs), procéder par assignation à jour fixe, en justifiant de l'urgence. Dans ce dernier cas, dans l'ordonnance qui sera rendue, le magistrat doit rappeler que l'assignation devra être délivrée avant une certaine date ; une fois que le second original a été signifié, il doit impérativement être déposé au greffe du JAF, avant la date d'audience, sous peine de caducité prononcée d'office.

En cas de démembrement de la propriété du logement familial (par exemple, nue-propriété appartenant aux enfants), il peut également être nécessaire de saisir le juge des tutelles pour demander l'autorisation de vendre ce bien afin qu'il s'assure que la vente est conforme à l'intérêt des enfants. Dans ce cas, le juge des tutelles est le JAF ; la requête doit être déposée auprès du juge des tutelles (section familiale).

L'article 220-1 du Code civil (N° Lexbase : L7169IMH), prévoit un certain nombre de mesures conservatoires : "si l'un des époux manque gravement à ses devoirs et met ainsi en péril les intérêts de la famille, le juge aux affaires familiales peut prescrire toutes les mesures urgentes que requièrent ces intérêts". L'article 1290 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0828INY) prévoit, dans ce cas, que "les mesures urgentes prévues à l'article 220-1 du Code civil sont prescrites par le juge aux affaires familiales statuant en référé ou, en cas de besoin, par ordonnance sur requête".

Il peut s'agir, par exemple, de la nomination d'un administrateur provisoire d'une société appartenant aux deux époux, d'une interdiction de déplacer les meubles, d'une mise sous séquestre d'un bien commun, de l'interdiction de réitérer une promesse de vente portant sur un bien.

1.2. Les compétences du JAF dans le domaine des régimes matrimoniaux

Dans le cadre plus spécifique des régimes matrimoniaux, différentes mesures peuvent être sollicitées auprès du JAF.

Ainsi, dans le cadre d'un régime de communauté, si l'un des époux est hors d'état de manifester sa volonté ou si sa gestion de la communauté atteste d'une inaptitude ou d'une fraude, un époux peut demander au JAF d'être substitué au conjoint qui commet des fautes de gestion. Il est également possible de demander, dans un délai de deux ans (à compter de la connaissance des faits), la nullité des actes que le conjoint inapte aurait passé. Le JAF peut être saisi par une assignation. Le JAF compétent est celui du lieu de résidence de la famille.

De même, en vertu de l'article 1443 du Code civil (N° Lexbase : L1594ABN), "si, par le désordre des affaires d'un époux, sa mauvaise administration ou son inconduite, il apparaît que le maintien de la communauté met en péril les intérêts de l'autre conjoint, celui-ci peut poursuivre la séparation de biens en justice". Le JAF est saisi par requête, par une assignation. Ce sont les règles de la procédure contentieuse qui s'appliquent. Là encore, le JAF compétent est celui du lieu de résidence de la famille.

Dans le cadre d'un régime de participation aux acquêts, l'article 1580 du Code civil (N° Lexbase : L1666ABC) prévoit, de même, que "si le désordre des affaires d'un époux, sa mauvaise administration ou son inconduite, donnent lieu de craindre que la continuation du régime matrimonial ne compromette les intérêts de l'autre conjoint, celui-ci peut demander la liquidation anticipée de sa créance de participation". Le JAF est saisi par voie d'assignation ; c'est toujours le JAF du lieu de résidence de la famille qui est compétent.


2. La saisine du JAF dans le cadre du divorce

2.1. Le divorce par consentement mutuel

Dans le cadre d'un divorce par consentement mutuel, la notion d'urgence, d'incident, de délais, de calendrier est peu présente et ne donne pas lieu à l'application des principes classiques de la procédure civile, mais au principe de consensualisme soumis au contrôle du juge.

La saisine du JAF intervient par voie de requête unique présentée par les deux époux (requête conjointe) et tendant à une comparution devant le juge aux fins de prononcé du divorce par consentement mutuel et de l'homologation d'une convention de divorce réglant ses effets.

La procédure de divorce par consentement mutuel relève de la compétence d'attribution exclusive du JAF (C. pr. civ., art. 1092 N° Lexbase : L1571H4X).

La compétence territoriale du JAF est celle du lieu où réside l'un ou l'autre des époux (C. pr. civ., art. 1070 N° Lexbase : L1457H4Q). La compétence géographique diffère ainsi de la matière contentieuse (résidence de la famille, du lieu de résidence du parent qui vit avec les enfants).

* Saisine du JAF par les époux

Le JAF est saisi par les deux époux par voie de requête conjointe déposée au greffe (C. pr. civ., art. 1089 N° Lexbase : L1556H4E et 1092 N° Lexbase : L1571H4X). Le greffe convoque les parties par lettre simple 15 jours au moins avant l'audience.

Il s'agit d'une requête unique qui doit être datée et signée par les époux ainsi que par au moins un avocat (C. pr. civ., art. 1090 N° Lexbase : L1560H4K et C. civ., art. 250 N° Lexbase : L2806DZX). L'article 1090 énonce les mentions obligatoires que doit contenir la requête, à peine d'irrecevabilité.

A peine d'irrecevabilité, doivent être joints à cette requête (C. pr. civ., art. 1091 N° Lexbase : L1565H4Q) : une convention de divorce portant sur le règlement complet des effets divorce, datée et signée par les époux et le/les avocats ; un état liquidatif qui est sous forme d'acte notarié lorsque la liquidation porte sur un bien soumis à publicité foncière ; une déclaration sur l'honneur lorsque la convention prévoit le versement d'une prestation compensatoire (C. pr. civ., art. 1075-1 N° Lexbase : L1485H4R et C. civ., art. 272 N° Lexbase : L8783G8S).

* Saisine du JAF en cas de recours

En cas d'homologation, les époux ne peuvent pas faire appel du jugement de divorce qui homologue la convention. Leur seule voie de recours dans le cas de l'homologation est le pourvoi en cassation qui doit être formé dans un délai de 15 jours à partir du prononcé de la décision (C. pr. civ., art. 1103 N° Lexbase : L1599H4Y).

En cas de refus d'homologation, les époux peuvent faire appel de la décision refusant de prononcer le divorce et d'homologuer la convention dans un délai de quinze jours (C. pr. civ., art. 1102 N° Lexbase : L1596H4U). Si la requête a été jugée irrecevable par le JAF pour défaut des mentions obligatoires prévues aux articles 1090 (N° Lexbase : L1560H4K) et 1091 (N° Lexbase : L1565H4Q) du même code, et jugée recevable par la cour d'appel, elle peut soit renvoyer la requête au JAF, soit évoquer au fond. Si la requête a été jugée mal fondée par le JAF, la cour d'appel peut également soit confirmer le jugement soit évoquer au fond et homologuer la convention. La décision d'appel peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation.

La technique de l'ajournement permet une troisième voie entre l'homologation et le refus d'homologation puisque le juge va octroyer un délai en précisant les conditions auxquelles elle devra soumettre la convention pour être homologuée. En cas d'ajournement, le juge laisse aux époux un délai de six mois maximum pour lui présenter une nouvelle convention, à défaut de quoi la requête en divorce est caduque (C. pr. civ., art. 1100 N° Lexbase : L1588H4L et 1101N° Lexbase : L1591H4P). La décision d'ajournement peut faire l'objet d'un appel qui est suspensif du délai de six mois de présentation d'une nouvelle convention (C. pr. civ., art. 1101).

* Saisine du JAF par les tiers

Le divorce par consentement mutuel peut être, dans certains cas, un moyen commode pour le couple finalement pas autant désuni qu'il ne le prétend de se soustraire à ses obligations vis-à-vis des tiers ce qui conduit à s'interroger sur les sanctions prévues à l'encontre de tels divorces orchestrés comme des mesures d'organisation de son insolvabilité. Cela constitue un problème pour les tiers lorsque le divorce a un caractère frauduleux dont l'objet est de favoriser l'un des époux au détriment des enfants de l'autre, dont l'objet est l'organisation de l'insolvabilité en mettant une partie du patrimoine à l'abri des créanciers. En effet, l'obligation qui est faite aux parties de liquider toutes leurs questions patrimoniales et financières dans le cadre du divorce et la liberté qui leur est conférée pour y parvenir multiplie le risque de fraude.

La Cour de cassation a réservé un sort particulier au divorce en interdisant aux tiers de l'attaquer par les voies classiques contractuelles. C'est ainsi qu'il n'est pas possible d'agir par la voie de l'action paulienne de l'article 1167 du Code civil (N° Lexbase : L1269ABM) (Cass. civ. 2, 25 novembre 1999, n° 97-16.488 N° Lexbase : A5222AWC). De même, le jugement de divorce ne peut pas davantage faire l'objet d'une action en inopposabilité de la part des tiers (Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-26.802, FS-P+B+I N° Lexbase : A9913HZ8).

La seule solution offerte aux créanciers est donc la tierce opposition auprès du JAF contre la décision d'homologation de la convention pour demander qu'elle leur soit inopposable, dans le délai d'un an suivant la transcription du jugement à l'état civil (C. pr. civ., art. 1104 N° Lexbase : L1602H44).

Cette tierce opposition permet aux créanciers d'obtenir que cette convention leur soit inopposable mais elle ne remet pas en cause le prononcé du divorce ni ses effets à l'égard des époux et des autres tiers. Il s'agit de donner la possibilité aux créanciers d'un époux de pouvoir saisir un bien ou une somme à laquelle il avait droit durant le mariage en vertu de son droit de gage général, bien que la convention ait accordé ce droit à l'autre époux.

* Saisine du JAF en cas de modification de la convention de divorce

Le jugement prononçant le divorce et homologuant la convention est en principe immuable. Il est toutefois possible de ressaisir le JAF dans certains cas.

Lorsque les époux sont d'accord, la loi offre aux parties la possibilité de remettre en cause d'un commun accord leur convention de divorce. Cette faculté est néanmoins strictement encadrée dans des conditions de forme prévues à l'article 279 du Code civil (N° Lexbase : L2847DZH), qui conditionne la révision de la convention à un nouveau passage devant le JAF et à la présentation d'une nouvelle convention, ce qui implique une requête conjointe. Cela exclut donc que les époux se contentent d'un accord écrit ou verbal entre eux (Cass. civ. 1, 11 janvier 2005, n° 03-16.719, F-P+B N° Lexbase : A0224DGE ; Cass. civ. 2, 25 mars 1998, n° 96-13.879 N° Lexbase : A0431C3D) ou d'une modification judiciaire à la demande de l'un d'entre eux.

Le plus souvent, les ex-époux ne sont pas d'accord et peuvent souhaiter réviser les mesures relatives aux enfants (C. civ., art. 373-2-13 N° Lexbase : L6980A4B), la prestation compensatoire (C. civ., art. 279), ou demander un partage complémentaire (Cass. civ. 1, 13 décembre 2012, n° 11-19.098, FS-P+B+I N° Lexbase : A8294IYT ; Cass. civ. 1, 6 mars 2001, n° 98-15.168 N° Lexbase : A4553AR3). Dans ce cas, le JAF peut être à nouveau saisi.


2.2. Les divorces contentieux

* Le traitement de l'urgence

1) L'autorisation d'assigner à jour fixe à fin de conciliation (C. pr. civ., art. 1109 N° Lexbase : L1624H4W)

Lors du dépôt de la requête en divorce "251", l'un des époux peut présenter une requête aux fins d'être autorisé à assigner l'autre époux à jour fixe à fin de conciliation lorsqu'il justifie d'une urgence en y joignant une ordonnance.

Il convient alors de démontrer l'urgence pour amener le juge à avancer la tentative de conciliation. Si le JAF fait droit à cette demande, il fixera une date d'audience rapprochée et ne sera pas tenu de respecter le délai de quinze jours entre le moment de la convocation et l'audience de conciliation imposé en cas de dépôt d'une simple requête (C. pr. civ., art. 1108 al. 1 N° Lexbase : L1618H4P). L'époux devra ensuite faire délivrer par voie d'huissier à son conjoint une assignation aux fins de tentative de conciliation à jour fixe.


2) Au stade du dépôt de la requête en divorce : la requête en mesures urgentes

L'époux demandeur peut, dès le dépôt de la requête en divorce sur le fondement de l'article 251 du Code civil N° Lexbase : L2810DZ4, solliciter simultanément, sur requête, sur le fondement de l'article 257 du Code civil, une ordonnance, à l'insu de son conjoint et sans débat contradictoire des mesures destinées à s'appliquer immédiatement avant la tentative de conciliation.

L'objectif de la requête en mesures urgentes est de répondre à deux problématiques, à savoir, préserver l'intégrité physique de l'un des époux dans l'attente des mesures provisoires, ou encore garantir les intérêts patrimoniaux de l'un des époux.

Plus que l'urgence, c'est le péril qui doit ici être démontré pour amener le juge à prendre non contradictoirement des mesures.

Les mesures pouvant être demandées sur le fondement de 257 correspondent à des mesures quasi conservatoires : autorisation de résidence séparée avec les enfants mineurs ; apposition de scellés pour éviter le détournement de biens communs ; désignation d'un huissier de justice à l'effet de dresser un inventaire des meubles et objets mobiliers se trouvant au domicile conjugal ou ailleurs ; demande à titre conservatoire de fonctionnement de comptes bancaires sous une double signature pour éviter les détournements. L'article 257 vise également toutes les demandes pouvant être sollicitées sur le fondement de l'article 220-1 du Code civil, lorsque l'un des époux manque gravement à ses devoirs et met ainsi en péril les intérêts de la famille, toutes les mesures urgentes que requièrent ces intérêts : demande d'interdiction à un époux de faire sans le consentement de l'autre un acte de disposition sur un bien commun ou propre ; interdiction du déplacement de meubles ; demande de désignation d'un administrateur provisoire pour gérer le patrimoine commun.

Certaines demandes sont, en revanche impossibles, dans la mesure où elles ne peuvent relever que du juge conciliateur : attribution du domicile conjugal ; modalités d'exercice de l'autorité parentale ; fixation de la PA au titre du devoir de secours.

En effet, la procédure de la requête en mesures urgentes présente certaines caractéristiques, à savoir, notamment qu'elle ne présente aucun caractère contradictoire. L'article 1106 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1610H4E) impose, en effet, au demandeur de se présenter en personne, pièces à l'appui pour solliciter ces mesures au cours d'une audience dite de "présentation", ce qui permet au magistrat de s'entretenir avec l'époux en question pour s'assurer du bien fondé de telles mesures non contradictoires. Les mesures prises figurent dans une ordonnance qui doit être signifiée à l'autre époux. Si l'article 1107 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1614H4K) prévoit que l'ordonnance prenant des mesures urgentes ne peut en aucun cas faire l'objet d'un recours, la Cour de cassation a admis, sur le fondement des dispositions de l'article 497 du même code (N° Lexbase : L6614H74), que l'époux lésé peut saisir le JAF à l'origine de la décision par la voie du référé à fin de rétraction afin d'obtenir la modification/rétractation de l'ordonnance, et ce même si les parties comparaissent devant le magistrat conciliateur.


* Le droit commun du divorce contentieux

1) La requête "251"

Chaque époux saisit individuellement le JAF d'une requête en vue de faire fixer les mesures provisoires qui seront valables tout au long de la procédure de divorce (C. civ., art. 251).

Cet acte indique les demandes formées au titre des mesures provisoires et un exposé sommaire de leurs motifs (C. pr. civ., art. 1106), ainsi que la situation sociale des époux (caisse d'assurance maladie, d'allocations familiales et de retraite (dénomination, adresse et numéro d'affiliation). Elle ne doit pas contenir le fondement ni les motifs du divorce (C. civ., art. 251 ; C. pr. civ., art. 1106). La requête est déposée au greffe qui convoque les parties. Le délai peut varier de trois à six mois, selon les juridictions.

Si le défendeur a quitté le domicile conjugal sans laisser d'adresse ou en cas de doute sur le fait qu'il recevra sa convocation à l'audience de conciliation, le demandeur peut en annexe de sa requête, faire une demande de permis de citer qui prendra la forme d'une ordonnance annexée à la requête 251 ce qui permettra au demandeur d'éviter le report de l'affaire.

Les parties peuvent faire appel de l'ordonnance de non-conciliation dans un délai de 15 jours à compter de sa signification. Cet appel ne peut concerner que la compétence et les mesures provisoires (C. pr. civ., art. 1112 N° Lexbase : L1634H4B). Les dispositions de l'ONC qui ordonnent une mesure de médiation sont insusceptibles d'appel (C. pr. civ., art. 1071 N° Lexbase : L1460H4T et 131-15 N° Lexbase : L1470H49).

La Cour de cassation considère que le pourvoi à l'encontre de l'arrêt rendu sur l'appel de l'ordonnance de non-conciliation n'est recevable que s'il est formé en même temps que le pourvoi dirigé contre l'arrêt qui statue sur le fond (Cass. civ. 1, 18 décembre 2003, n° 02-10.837 N° Lexbase : A4884DA7) sauf si l'arrêt statuant sur les mesures provisoires tranche dans son dispositif une partie du principal (Cass. civ. 1, 13 octobre 1992, n° 90-19.903 N° Lexbase : A5500AH8).

Avant l'introduction de l'instance en divorce, en cas de survenance d'élément nouveau, le JAF peut être ressaisi en vue de la modification des mesures provisoires (C. pr. civ., art. 1118 N° Lexbase : L1655H43).

Si l'élément nouveau intervient avant la saisine du juge du divorce, le JAF est compétent et doit être saisi par assignation en la forme des référés. Il convient de prendre une date au greffe et de faire délivrer une assignation.


2) L'introduction de l'instance en divorce

Selon les termes de l'article 1114 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1239IZW), l'introduction de l'instance en divorce peut s'effectuer par requête conjointe ou par assignation. Elle est généralement introduite par assignation, mais il y a des exceptions (divorce pour acceptation).

* Introduction de l'instance en divorce pour acceptation du principe de la rupture

Lorsque les époux ont accepté le principe du divorce à l'audience de conciliation par la signature d'un PV d'acceptation, la requête conjointe constitue le seul mode de saisine du juge aux affaires familiales (C. pr. civ., art. 1123 N° Lexbase : L1670H4M).

En revanche, si la procédure de divorce a été initiée sur le fondement de l'altération définitive du lien conjugal ou de la faute et que les époux acceptent ultérieurement le principe du divorce, la demande de prononcé du divorce sur ce fondement doit être formée auprès du JAF par voie de conclusions concordantes auxquelles sont annexées les déclarations d'acceptation (C. pr. civ., art. 1123).

* Introduction de l'instance en divorce pour faute ou altération définitive du lien conjugal

Dans le délai de trois mois suivant le prononcé de l'ordonnance de non conciliation, seul l'époux qui a déposé la requête "251" peut saisir le JAF d'une d'assignation en divorce sur le fondement de l'altération définitive du lien conjugal ou de la faute (C. pr. civ., art. 1113 N° Lexbase : L1638H4G). Passé ces trois mois, chaque époux a la faculté d'assigner l'autre en divorce devant le JAF dans un délai de 27 mois au-delà duquel l'ONG est caduque (C. pr. civ., art. 1113).

L'assignation doit contenir, à peine de nullité, les mentions obligatoires habituelles, ainsi que les informations relatives à la situation sociale des époux (caisse d'assurance maladie, d'allocations familiales et de retraite : C. pr. civ., art. 1075 N° Lexbase : L1480H4L).

A peine d'irrecevabilité, l'assignation doit également comporter une proposition de règlement des intérêts pécuniaires des époux (C. civ., art. 257-2 N° Lexbase : L2822DZK). Il s'agit d'inciter les époux à échanger le plus en amont possible sur les questions relatives à la liquidation.

Il faut rappeler le principe d'exclusivité de la demande, c'est-à-dire que la demande en divorce ne peut être fondée que sur un seul cas de divorce ; toute demande subsidiaire formée sur un autre cas est irrecevable (C. pr. civ., art. 1077 N° Lexbase : L1498H4A).

L'époux demandeur ne peut donc pas changer de fondement juridique en cours d'instance, sauf dans certains cas bien déterminés (cf. C. civ., art. 247-1 N° Lexbase : L2801DZR et 247-2 N° Lexbase : L2802DZS), que l'on désigne comme des " passerelles ". En effet, à tout moment et tant qu'un jugement de divorce n'a pas été rendu, les époux peuvent modifier leurs demandes initiales et saisir le JAF d'une demande de prononcé du divorce par consentement mutuel en lui soumettant une demande conjointe et une convention (C. civ., art. 247). Il n'est pas nécessaire de déposer des conclusions concordantes. Les époux peuvent également, en cours de procédure de divorce, prendre des conclusions concordantes afin de demander au JAF de prononcer le divorce pour acceptation du principe de la rupture.


3) La saisine du JAF pour constater les accords des époux sur les conséquences du divorce

L'article 268 du Code civil (N° Lexbase : L2835DZZ) prévoit que, dans tous les cas de divorce contentieux, les époux peuvent à tout moment, pendant l'instance en divorce, trouver des accords portant sur tout ou partie des conséquences du divorce en soumettant des conventions à l'homologation du JAF qui doit "vérifier que les intérêts de chacun des époux et des enfants sont préservés". En pratique, ces accords sont souvent formalisés dans des conclusions concordantes ce qui ne permet pas au juge d'exercer un contrôle.

4) La saisine du JAF, juge de la mise en état en cours de procédure de divorce

Le juge aux affaires familiales peut être saisi en sa qualité de juge de la mise en état (C. pr. civ., art. 1073 N° Lexbase : L1469H48).

A ce titre, les époux peuvent le saisir de multiples demandes telles que : la fixation du calendrier de la mise en état et la prorogation des délais (C. pr. civ., art. 764 N° Lexbase : L6986H7U) ; le prononcé d'injonctions de conclure ou de communication de pièces (C. pr. civ., art. 763 N° Lexbase : L6984H7S) ; les jonctions et disjonctions d'instance (C. pr. civ., art. 766 N° Lexbase : L6989H7Y) ; la rétractation de l'ordonnance de clôture (C. pr. civ., art. 780 N° Lexbase : L7018H73) ; les exceptions de procédure (incompétence, litispendance...) (C. pr. civ., art. 771) ; la déportation de l'affaire lorsqu'un magistrat ou d'un auxiliaire de justice est partie à un divorce qui relève de la compétence de la juridiction dans le ressort de laquelle il exerce (C. pr. civ., art. 47 N° Lexbase : L8419IRA et 771) ; les incidents mettant fin à l'instance (désistement, caducité de la citation) (C. pr. civ., art. 771) ; l'allocation d'une provision ad litem (C. pr. civ., art. 771) ; l'allocation d'une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable (C. pr. civ., art. 771) ; la fixation d'une mesure provisoire, conservatoire ou d'instruction (à l'exception des saisies conservatoires, des hypothèques et nantissements provisoires) (C. pr. civ., art. 771).

Lorsqu'il est demandé au JAF, juge de la mise en état, de modifier ou compléter les mesures provisoires fixées par l'ordonnance de conciliation, en cas de survenance d'un fait nouveau (C. pr. civ., art. 771), celui-ci peut être saisi de deux manières différentes : soit par voie de conclusions d'incident lorsque l'instance en divorce a déjà été introduite (C. pr. civ., art. 771 et 1118 N° Lexbase : L1655H43) jusqu'à son dessaisissement (C. pr. civ., art. 1118) ; soit par voie d'assignation en la forme des référés ou par simple requête, lorsque l'instance en divorce n'a pas été introduite (C. pr. civ., art. 1118, al. 2, qui renvoie aux articles 1137 N° Lexbase : L1712H48 et suivants du même code) (l'avantage de l'assignation en la forme des référés réside dans la possibilité d'obtenir une date d'audience plus rapidement).

5) Voies de recours contre la décision de divorce

Le jugement de divorce est susceptible d'appel. La voie de l'opposition est en revanche fermée.

Les tiers, protégés dans le cadre du divorce par consentement mutuel par la voie de la tierce opposition, ne bénéficient dans les divorces contentieux d'aucun recours (principe réaffirmé dans un arrêt du 5 novembre 2008 (Cass. civ. 1, 5 novembre 2008, n° 06-21.256, FS-P+B N° Lexbase : A1597EBR).


3. La saisine du JAF hors divorce ou après divorce

3.1. Changement de prénom

Contrairement aux demandes de changement de nom, les demandes de changement de prénom relèvent de la compétence du JAF (C. civ., art. 60 N° Lexbase : L3089IQH) ; la procédure est gracieuse. La requête est déposée par l'intéressé ou son représentant légal.

Le JAF compétent est celui dans le ressort duquel l'acte de naissance a été dressé. L'intéressé doit justifier d'un intérêt légitime au changement de prénom. Une voie de recours est ouverte au ministère public.

3.2. Droit de visite et d'hébergement des grands-parents

Le JAF est compétent pour statuer sur les demandes de droit de visite et d'hébergement des grands-parents. L'assignation s'effectue au TGI, section des affaires familiales, avec ministère de l'avocat obligatoire. Le JAF apprécie s'il y a lieu d'accorder ou non un droit de visite aux grands-parents, au regard de l'intérêt de l'enfant.

Il peut s'agir d'une assignation classique, mais la procédure peut être relativement longue. Lorsque l'on souhaite accélérer la procédure, il est possible de faire une assignation à jour fixe, mais encore faut-il pouvoir justifier d'un caractère urgent, ce qui est difficile dans cette situation, la jurisprudence ne reconnaissant finalement une urgence que lorsque les grands-parents sont mourants.


3.3. Mesures relatives à l'autorité parentale

En matière d'autorité parentale, plusieurs modes de saisine existent : la requête classique ; l'assignation en la forme des référés ; ou l'assignation en référé (cf. C. pr. civ., art. 1073 N° Lexbase : L1469H48).

Dans le cas de l'assignation en référé, appelé le "référé familial", le JAF dispose des compétences d'un juge de référé classique. Deux conditions doivent être réunies pour saisir le JAF en référé : la justification d'une urgence extrême, et l'absence de contestation sérieuse par l'autre parent.

Dans ce cadre du référé familial, le JAF peut alors prescrire un certain nombre de mesures telles que : une suspension d'un droit de visite du parent non gardien, à la suite d'une plainte pour mauvais traitement ; un transfert de résidence ; une inscription sur le passeport d'un enfant ; une interdiction de sortie de l'enfant du territoire, etc..


4. La saisine du JAF liquidateur

Le JAF est juge de la liquidation des régimes matrimoniaux des couples mariés. Depuis la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 (N° Lexbase : L1612IEG), le JAF est également le juge de la liquidation des partenaires pacsés et des concubins.

Le TGI reste compétent pour la liquidation des successions. La ligne de partage entre la compétence du JAF ou du TGI repose donc sur la question de savoir si les personnes sont vivantes ou décédées.


4.1. Liquidation et partage des régimes matrimoniaux

Comme vu précédemment, le voeu du législateur est de donner compétence au JAF, au stade du divorce, pour anticiper au maximum sur la liquidation.

Ainsi, aux termes de l'article 255 du Code civil (N° Lexbase : L2818DZE), bien que le juge conciliateur ne soit pas saisi en qualité de juge liquidateur, il peut ordonner des mesures provisoires qui auront une influence sur la liquidation du régime matrimonial des époux (l'attribution de la jouissance du domicile conjugal, de biens communs ou indivis à titre onéreux, donnera lieu à une indemnité d'occupation qui entrera dans les comptes de l'indivision au moment de la liquidation) ; s'il confie la gestion d'un bien commun ou indivis à l'un des époux, celui-ci pourrait réclamer une indemnité lors de la liquidation (C. civ., art. 815-12 N° Lexbase : L9941HNI) ; de même, le paiement des dettes à titre provisoire par l'un ou l'autre des époux devront être prises en compte au stade de la liquidation du régime matrimonial.

Enfin, le JAF anticipateur de la liquidation peut être amené à désigner : tout professionnel qualifié qui aura pour mission de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux (C. civ., art. 255-9°) ; mais également un notaire en vue d'élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager (C. civ., art. 255-10°).

Au stade de l'introduction de l'instance en divorce, à peine d'irrecevabilité, l'assignation en divorce doit comporter une proposition de règlement des intérêts pécuniaires des époux (C. civ., art. 257-2 N° Lexbase : L2822DZK). Il convient donc de rédiger un descriptif sommaire du patrimoine des époux et d'indiquer les intentions du demandeur concernant la liquidation (C. pr. civ., art. 1115 N° Lexbase : L1644H4N). Le plus souvent, ce descriptif est succinct car la consistance exacte du patrimoine des époux n'est pas toujours connue. Il permet toutefois d'inciter les époux à aborder les questions relatives à la liquidation de leur régime matrimonial dès le début de l'instance en divorce et de fonder les demandes dont sera saisi le juge du divorce en qualité de juge initiateur de la liquidation, au titre de l'article 267 du Code civil (N° Lexbase : L2834DZY).

En effet, en application de l'article 267, le JAF a le pouvoir, sur demande de l'un des époux, de trancher les désaccords persistants si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné au titre des mesures provisoires sur le fondement de l'article 255-10° contient des informations insuffisantes (C. civ., article 267).

S'il est clair que l'article 267 du Code civil impose au JAF saisi du divorce d'ordonner la liquidation et le partage, la question de la désignation d'un notaire à ce stade est plus controversée. L'ancienne rédaction de l'article 267-1 du Code civil (N° Lexbase : L2836DZ3) commandait la désignation d'un notaire au stade du prononcé du divorce. La loi du 12 mai 2009 précitée est venue modifier la rédaction de l'article 267 du Code civil et supprimer toute référence à la désignation d'un notaire.

La Cour de cassation, qui, par des arrêts rendus les 12 avril et 7 novembre 2012 (Cass. civ. 1, 12 avril 2012, n° 11-20.195, F-D N° Lexbase : A5932IIK ; Cass. civ. 1, 7 novembre 2012, n° 12-17.394, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4319IWU), le dernier étant un arrêt de principe rendu au visa des articles 267 du Code civil et 1361 du Code de procédure civile, a considéré que le JAF, juge du divorce, avait la faculté de désigner un notaire. Cela dispenserait-il les époux de saisir le JAF par voie d'assignation en partage après le prononcé du divorce ? L'assignation en divorce vaut-elle assignation en partage ? La solution de la Cour de cassation, récemment confirmée par deux arrêts des 12 juin 2013 (Cass. civ. 1, 12 juin 2013, n° 12-18.211, F-D N° Lexbase : A5719KGW) et 11 septembre 2013 (Cass. civ. 1, 11 septembre 2013, n° 12-18.512, F-P+B N° Lexbase : A1658KLY), tend manifestement à remettre en cause la distinction actuelle que font les textes entre la phase du divorce et la phase du partage judiciaire et laisse plusieurs questions en suspens.

Dans un arrêt du 5 décembre 2013, la cour d'appel d'Agen a considéré, que ce soit sous l'empire de la précédente loi ou de la loi actuelle, que l'établissement par le notaire liquidateur d'un procès-verbal de difficultés préalablement à la saisine de la juridiction n'avait jamais été une obligation et que les parties ayant toujours la possibilité d'assigner à cette fin, même si un notaire a été désigné, cette assignation n'était donc pas irrecevable (CA Agen, 5 décembre 2013, n° 13/00238 N° Lexbase : A7283KQS).

En cours d'instance, les époux peuvent conclure une convention portant sur la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux en cours d'instance en divorce en vertu de l'article 265-2 du Code civil (N° Lexbase : L2831DZU) et la soumettre à l'homologation du JAF saisi sur le fondement de l'article 268 du Code civil (N° Lexbase : L2835DZZ), par voie de conclusions.

Après l'instance en divorce, dans le cas où aucun notaire n'a été désigné au stade des mesures provisoires, ou dans le jugement de divorce comme le permettent désormais les arrêts rendus par la Cour de cassation, les époux vont contacter eux-mêmes un ou deux notaires afin de procéder à une tentative de partage amiable ; s'ils ne parviennent pas à se mettre d'accord sur la valeur d'un bien, les époux peuvent saisir le JAF en référé sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49) afin qu'il ordonne une expertise.

En cas d'échec de la tentative de partage amiable (procès-verbal de défaut, procès-verbal de difficultés, désaccords subsistants...), et dans le système légal actuel que la Cour de cassation tente de remettre en cause, les époux qui souhaitent obtenir un partage judiciaire saisissent le JAF d'une demande en partage par voie d'assignation (les règles concernant la phase judiciaire du partage sont prévues aux articles 840 (N° Lexbase : L9979HNW) à 842 du Code civil et aux articles 1359 (N° Lexbase : L6313H7X) à 1376 du Code de procédure civile.

Cette compétence a été dévolue au JAF depuis la loi du 12 mai 2009, au détriment de la compétence du tribunal de grande instance (COJ, art. L. 213-3 précité), et s'applique donc à toutes les demandes de partage formées après le 1er janvier 2010.

Le mode de saisine du JAF est double : il peut être saisi soit par voie d'assignation en partage (C. pr. civ., art. 1360 N° Lexbase : L6314H7Y) mais il semble également pouvoir être saisi par voie de requête conjointe en vertu des dispositions de l'article 1136-1 du même code (N° Lexbase : L0966IGU) qui renvoient aux règles applicables devant le TGI et donc à l'article 750 (N° Lexbase : L6966H77) qui prévoit cette double possibilité.


4.2. Liquidation de l'indivision entre partenaires pacsés et concubins

L'article L. 213-3 du Code de l'organisation judiciaire donne compétence au JAF pour connaître de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des partenaires liés par un PACS et des concubins. Les articles 1136-1 et 1136-2 (N° Lexbase : L0361IRS) du Code de procédure civile prévoient, comme pour les époux, un renvoi aux règles applicables devant le TGI (C. pr. civ., art. 750 à 754) ainsi qu'aux articles relatifs au partage successoral (C. pr. civ., art. 1358). Ainsi, les partenaires et concubins doivent d'abord procéder à une tentative de partage amiable (C. pr. civ., art. 1360) avant de saisir le juge aux affaires familiales d'une demande de partage judiciaire par voie d'assignation (C. pr. civ., art. 1360) ou requête conjointe (C. pr. civ., art 750).

La saisine par simple requête ou déclaration au greffe se heurte à une fin de non-recevoir qui doit être relevée d'office par le juge en application de l'article 125 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1421H4E) (circulaire du 16 juin 2010).


5. Les ajouts de la loi du 9 juillet 2010 : l'ordonnance de protection

L'ordonnance de protection, qui correspond à l'ancien référé "violences conjugales", a été instaurée par la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 (N° Lexbase : L7042IMR), aux articles 515-9 (N° Lexbase : L7175IMP) et suivants du Code civil.

Le JAF peut être saisi dans le cadre d'une ordonnance de protection lorsqu'une personne majeure est menacée de mariage forcé, ou de violences. Cette procédure ne peut être mise en oeuvre qu'en dehors d'une procédure de divorce.

L'article 515-9 prévoit, en effet, que "lorsque les violences exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin mettent en danger la personne qui en est victime, un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une ordonnance de protection".

La procédure est orale, et se tient en présence du ministère public qui doit pouvoir donner son avis.

Les mesures qui peuvent prises sont énumérées à l'article 515-11 du Code civil (N° Lexbase : L2932IQN) ; le juge aux affaires familiales est ainsi compétent pour :

  • interdire à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer certaines personnes spécialement désignées par le juge aux affaires familiales, ainsi que d'entrer en relation avec elles, de quelque façon que ce soit ;
  • interdire à la partie défenderesse de détenir ou de porter une arme et, le cas échéant, lui ordonner de remettre au service de police ou de gendarmerie qu'il désigne les armes dont elle est détentrice en vue de leur dépôt au greffe ;
  • statuer sur la résidence séparée des époux en précisant lequel des deux continuera à résider dans le logement conjugal et sur les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement. Sauf circonstances particulières, la jouissance de ce logement est attribuée au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences ;
  • attribuer la jouissance du logement ou de la résidence du couple au partenaire ou au concubin qui n'est pas l'auteur des violences et préciser les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement ;
  • se prononcer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et, le cas échéant, sur la contribution aux charges du mariage pour les couples mariés, sur l'aide matérielle au sens de l'article 515-4 pour les partenaires d'un pacte civil de solidarité (N° Lexbase : L7842IZH) et sur la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants ;
  • autoriser la partie demanderesse à dissimuler son domicile ou sa résidence et à élire domicile chez l'avocat qui l'assiste ou la représente ou auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance pour toutes les instances civiles dans lesquelles elle est également partie. Si, pour les besoins de l'exécution d'une décision de justice, l'huissier chargé de cette exécution doit avoir connaissance de l'adresse de cette personne, celle-ci lui est communiquée, sans qu'il puisse la révéler à son mandant ;
  • prononcer l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle de la partie demanderesse en application du premier alinéa de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique (N° Lexbase : L8607BBE).

Il faut savoir, que le non-respect des mesures ainsi ordonnées constitue un délit pénal (C. pén., art. 227-4-2 N° Lexbase : L7181IMW), puni de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Les mesures provisoires sont prises pour une durée maximum de quatre mois ; elles peuvent être prorogées au-delà si, durant ce délai, une requête en divorce ou en séparation de corps a été déposée. Le JAF peut, à tout moment, à la demande du ministère public ou de l'une ou l'autre des parties, ou après avoir fait procéder à toute mesure d'instruction utile, et après avoir invité chacune d'entre elles à s'exprimer, supprimer ou modifier tout ou partie des mesures énoncées dans l'ordonnance de protection, en décider de nouvelles, accorder à la personne défenderesse une dispense temporaire d'observer certaines des obligations qui lui ont été imposées ou rapporter l'ordonnance de protection.

Voir aussi

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