Procès des attentats du 13 novembre 2015 - Le Live Tweet - Semaine DIX-NEUF

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.



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Retrouvez sur cette page tous les tweets du procès issus des Live tweets de @ChPiret Charlotte Piret et @sophparm Sophie Parmentier ; elles suivent ce procès pour France Inter et nous ont donné l'autorisation de compiler leurs tweets dans un objectif de consultation et archivage.




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Semaine DIX-HUIT / Suspension d’audience pour la semaine

Semaine DIX-NEUF

Jour 70 – Mardi 25 janvier - Interrogatoire sur les faits de l'accusé Muhammad Usman

Bonjour à tous, c'est jour de reprise au procès des attentats du 13 novembre 19e semaine, 70e jour d'audience. Et donc fin de la pause imposée par la contamination au Covid de l'accusé Ali El Haddad Asufi.

Hier, le président a annoncé aux avocats que les débats pouvaient reprendre aujourd'hui, "l'état de santé de monsieur El Haddad Asufi le permettant de nouveau". Et voici d'ailleurs les accusés qui s'installent dans le box les uns après les autres.

Aujourd'hui, l'audience doit être consacrée à l'interrogatoire sur les faits de l'accusé Muhammad Usman. Mais avant cela, un débat devrait avoir lieu le versement, par le parquet antiterroriste, d'éléments concernant cet accusé. Pièces contestées par ses avocats.

Mais avant cela, il faut compter le temps habituel des sommations d'huissier à l'accusé Osama Krayem qui refuse toujours de comparaître à l'audience. Donc (vraie) reprise dans quelques instants.

Cette fois l'audience reprend. "Je verse aux débats les documents médicaux concernant monsieur El Haddad Asufi indiquant qu'il était apte à assister aux débats", indique en préambule le président. "Tant mieux pour lui".

D'autres pièces, comme un retour de commission rogatoire internationale tunisienne par exemple, sont également versés aux débats. Les débats, justement, peuvent reprendre.

Me Edward Huylebrouck, avocat de Muhamad Usman qui doit être interrogé aujourd'hui qui se lève pour contester six pièces versées par le parquet antiterroriste. "Les informations contenues dans ces six pièces ont un point commun : elles sont toutes issues du renseignement".

"Trois pièces sont liées à la preuve de guerre [en l'occurrence une vidéo de Muhamad Usman en Syrie ndlr] et trois autres pièces sont issues du renseignement pénitentiaire", poursuit Me Huylebrouck qui rappelle qu'il s'agit d'éléments recueillis entre 2016 et 2019.

"On a l'impression d'une session de rattrapage de septembre", plaide Me Huylebrouck. "Ce sont des preuves irrégulières. Les preuves tirées du renseignement doivent obéir à un certain nombre de principes : un rôle préventif et pas de collecte de preuve de l'infraction"

Me Huylebrouck : "le renseignement n'a pas à mener de contre-enquête ou d'enquête parallèle. Et puis, les pièces ne sont recevables que dès lors qu'elle guide le processus judiciaire. Or ici, le renseignement n'est plus la boussole du magistrat, cela devient sa roue de secours".

Me Huylebrouck évoque l'une des pièces versées : une vidéo sur laquelle apparaît Muhamad Usman en Syrie : "si on regarde ce qui se passe sur le théâtre de guerre, ce sont rarement des documents de première main, qui ont circulé entre les mains de revendeurs peu scrupuleux".

Me Huylebrouck : "cette preuve de guerre est défaillante à tous les niveaux. On sait que le recueil de ces preuves se fait en violation de toutes les conventions internationales, mais on s'en accommode parce que c'est fait à l'étranger."

Me Huylebrouck : "quand on donne comme seule information sur cette vidéo qu'elle a été trouvée à Shadadi au nord-ouest de la Syrie, alors qu'en fait Shadadi se trouve au nord-est de la Syrie, on peut se poser des questions sur le reste."

Me Huylebrouck : "pourquoi cette vidéo est doublée en russe ? Pourquoi ce document se retrouve à Shadadi alors qu'il porte sur une ville irakienne ? Pourquoi est-ce qu'il y a un montage ? Et on vient devant la cour avec une vidéo qu'on présente comme aboutie."

Pour rappel, la vidéo dénoncée par Me Huylebrouck à la barre, montre Muhamad Usman lors de scène de liesse après la prise de la ville irakienne de Ramadi par Daech. Elle avait été montrée à l'audience le 23 novembre dernier.

Me Huylebrouck, avocat de Muhamad Usman conclut : "on exècre tout ce qui ressemble à la justice médiévale façon Daech alors évitons de nous en approcher avec des preuves qui n'ont de preuves que le nom".

Me Clémence Witt, avocate de parties civiles se lève à son tour contre le versement de cette vidéo : "nos clients souhaitent une décision exemplaire. Indépendamment de la violence de ce qu'ils ont traversé, ils sont restés très attachés aux standards de l'Etat de droit."

Me Clémence Witt (PC) cite ainsi un arrêt de la cour d'européenne des droits de l'Homme qui exige "d'examiner les conditions de recueil des preuves pour s'assurer de leur authenticité."

"Que risque-t-on quand on admet une preuve de guerre dont on ignore tout ? On risque une violation des engagements internationaux de la France", plaide Me Witt (PC). "Nous vous demandons aujourd'hui de ne pas permettre que ce procès soit le lieu de création de règles dérogatoires"

Me Frédéric Bibal, autre avocat de parties civiles se lève à son tour. Lui, s'oppose au rejet des pièces versées "précisément parce que nos clients veulent que chacun des éléments puisse être débattu devant vous, qu'on puisse in fine dire s'il a été obtenu de manière loyale".

Me Frédéric Bibal (PC) conclut : "enlever les pièces versées des débats c'est priver les parties civiles d'une élucidation et d'un éclaircissement sur tout ce qui n'aurait pas été conforme à votre Droit".

Sur les bancs des parties civiles, les avocats sont divisés sur le versement de ces pièces. Le débat sur la question se poursuit. "Dans un procès de terrorisme tous les coups sont-ils permis ? Non", répond ainsi un avocat de parties civiles avant de laisser la parole au parquet.

Camille Hennetier se lève pour le parquet antiterroriste : "je voudrais qu'on ne fasse pas au parquet de procès d'intention. Ces pièces ont été versées lorsque le parquet en a eu connaissance. Ces pièces sont des renseignements au sens large, c'est-à-dire des informations"

Camille Hennetier (AG) entend faire le distinguo entre "ce qui relève de l'information pénitentiaire ou du renseignement pénitentiaire". Dans la 1ere catégorie : permis de visite, les mandats, synthèses du quartier d'évaluation de la radicalisation etc." énumère la magistrate.

Camille Hennetier (AG) poursuit, au sujet des pièces versées par le parquet : "ici, il ne s'agit en aucun cas de faire état de renseignement pénitentiaire mais exclusivement d'informations pénitentiaire".

Camille Hennetier : "le Droit admet toute sorte de preuve. Et la jurisprudence de la cour de Cassation admet la preuve par le renseignement dès lors qu'elle ne soit pas la seule à asseoir la culpabilité". Au risque sinon, "de faire des zones des zones d'impunité" ajoute-t-elle.

Camille Hennetier poursuit au sujet des preuves de guerre [ici, la vidéo de l'Etat islamique dans laquelle apparaît Muhamad Usman] : "la réalité c'est que nous avons besoin de ces éléments issus du champ de bataille parce qu'ils permettent de comprendre ce qui s'est passé".

Camille Hennetier (AG) affirme qu'"à ce jour un peu plus de 2500 éléments d'identification ont été analysés par la DGSI et concerne 554 individus". Ce qui explique, ajoute-t-elle que ces éléments dont l'exploitation prend beaucoup de temps, arrivent tardivement dans les dossiers.

Parmi d'autres exemple, l'avocate générale Camille Hennetier cite le procès de Tyler Vilus, cadre de l'Etat islamique, notamment condamné en appel sur base de vidéos, preuves de guerre, versées aux débats.

"J'ai coutume de dire que les petits abandons entraînent généralement de grandes défaites", plaide en défense Me Ilyacine Maallaoui L'avocate de Salah Abdeslam, Me Olivia Ronen, dénonce quant à elle "l'espèce de bouillie pénitentiaire" que constituent les rapports versés.

Me Olivia Ronen : "je fais confiance à votre cour pour que, même en matière de terrorisme, surtout en matière de terrorisme, votre cour puisse faire la part des choses"

Pour clore ce débat, l'avocat de Muhamad Usman, Me Huylebrouck précise : "la question qui se pose est celle des droits fondamentaux." L'audience est suspendue le temps pour la cour de délibérer sur ce sujet.

Après près de deux heures de délibéré, la cour revient. Elle ne fait pas droit à la demande de la défense d'écarter six pièces versées par le parquet antiterroriste "considérant que le ministère public a le droit de produire aux débats toutes les pièces qu'il juge utile".

"Nous allons donc pouvoir continuer les débats avec l'interrogatoire de Muhamad Usman", indique le président. Il est 16h42. L'accusé se lève dans le box. Crâne rasé, barbe, masque FFP2, T-shirt noir à manches longues.

Président : "commençons par la religion en ce qui vous concerne. Vous avez fait des études dans une madrasa [école coranique, ndlr] vous êtes d'ailleurs le seul de votre famille, vos frères ont été dans une école normale ?" Muhamad Usman : "c'est mon oncle qui décidait."

Muhamad Usman, ressortissant pakistanais, bénéficie de l'aide d'une interprète en ourdou, sa langue maternelle. Mais il répond à la majorité des questions du président en français qu'il semble avoir appris en détention.

Président : "vous étiez pratiquant, vous connaissiez les cinq piliers de l’islam ?" Muhamad Usman : oui, tout à fait. - à quel moment vous commencez à vous intéresser à l'Etat islamique ? - quand j'ai fini mes études en madrasa, j'ai rencontré quelqu'un via internet.

Président : "vous commencez à vous intéresser à l'Etat islamique en 2013 ? Muhamad Usman : non, je suis entré en contact avec cette personne en 2015. Il m'a appris comment c'était l'islam. L'accusé explique encore que ce contact internet lui a transmis des livres sur le djihad.

Président : "selon les services de renseignement de votre pays, vous auriez fait partie d'un groupe pakistanais qui soutenait Al-Qaïda" Muhamad Usman : "non, je n'ai fait jamais partie de ce groupe. Mais j'étais en contact avec un groupe islamique qui ramène les gens vers l'islam.

Président : "selon les services de renseignement de votre pays, vous auriez disparu de votre pays pendant 11 à 12 ans et vous auriez rejoint ce groupe djihadiste, que vous étiez un taliban." Muhamad Usman répond à plusieurs reprises en français : "non, c'est faux."

Président : "c'est à quelle époque que vous partez en Syrie puis en Irak ?" Muhamad Usman : "2015" - quel mois ? - je n'ai pas noté mais c'était en été. - l'été au Pakistan ? Remarquez, c'est en même temps que l'été en Syrie. - c'était en été.

Président : "qu'est-ce qui vous a décidé de quitter votre pays pour aller en Syrie ?" Muhamad Usman : "c'est Abou Abad qui m'a dit que c'était le devoir de tous les musulmans. Il m'a dit que la loi islamique était appliquée en Syrie. Il m'a envoyé la preuve avec en vidéo."

Président : "vous avez été interrogé et vous avez dit "ce que j'ai pu voir là-bas c'était l'islam qui fonctionnait. Le bon islam. Les homosexuels, on les jette dans le vide. On coupe la main des voleurs. La pureté de l'islam originel." Muhamad Usman : "oui, c'était sur la vidéo."

Président : "ça ne vous a pas choqué ?" Muhamad Usman : "à l'époque, j'étais jeune. Mon cerveau ne fonctionnait pas comme maintenant. Et j'ai toujours grandi dans un environnement musulman."

Muhammad Usman évoque son recruteur de l'Etat islamique : "il a pris le contrôle de mon cerveau." Président : pourquoi vous lui faites confiance ? Vous ne le connaissiez pas. - je ne sais pas. Avant, j'étais un musulman normal. Il avait le don pour retourner le cerveau des gens.

Président : "pourquoi vous êtes choisi vous pour une mission suicide ?" Muhammad Usman : "à Raqqa, j'avais suivi deux jours d'entraînement. Pour me servir d'une kalachnikov."

La 1ere assesseure lit le témoignage d'un djihadiste indien qui a reconnu Muhammad Usman sur photo "comme un ressortissant pakistanais entraîné en Afghanistan" et qui aurait fait partie du même groupe de combattants qui lui, mais aussi qu'Ismaël Mostefai, assaillant du Bataclan.

Muhammad Usman nie en bloc : "je ne connais pas cette personne et les informations qu'il a données." Même position face aux différents éléments du dossier que lui présent la 1ere assesseure. "C'est faux". Ou "je ne me souviens pas".

L'interprète en ourdou demande à sa collègue de prendre le relais. Le président en profite pour annoncer "les dernières questions de la cour avant une courte suspension". "Est-ce que votre famille vous soutient financièrement en prison ?" - non. Je ne veux pas qu'ils m'aident.

1ere assesseure : "vous avez été amené, avant de partir pour votre mission, de procéder à une exécution ?" Muhammad Usman : non

1ere assesseure : "vous faites partie du même commando que les Irakiens du Stade de France qui apparaissent sur la vidéo de revendication en train d'exécuter quelqu'un. Pourquoi avez-vous été dispensé d'une telle exécution ?" Muhammad Usman : "je n'ai pas eu ce genre de situation"

L'audience est suspendue 15 minutes. Avant la suite des questions du parquet et des avocats. "Et on a encore un témoin à entendre", rappelle le président. L'audience s'annonce donc tardive.

L'audience reprend avec les questions du parquet à l'accusé Camille Hennetier l'interroge sur un courrier, en ourdou, adressé à Salah Abdeslam. Muhammad Usman : "je n'ai jamais écrit de courrier à Salah Abdeslam." - Si, monsieur, il a été saisi par le juge d'instruction.

Interrogé sur d'autres courriers, Muhammad Usman ne souhaite pas répondre. Pas non plus de réaction au rapport de l'administration pénitentiaire selon lequel l'accusé aurait demandé à Mohamed Abrini "de donner du courage à Salah Abdeslam" lors d'un trajet vers la prison.

Me Samia Maktouf interroge l'accusé sur l'école coranique dans laquelle il a étudié. Elle souligne que son nom comporte le mot hadith. "Qu'est-ce que le hadith selon vous ?" - C'est la parole du prophète, intervient l'accusé Mohamed Abrini.

Quelques questions plus tard, Mohamed Abrini intervient à nouveau depuis le box : "pourquoi moi, je n'ai pas été interrogé sur ça dans mon interrogatoire ?" "Monsieur Abrini, stop. Si cela continue, je vais devoir vous faire expulser, soyez correct", s'agace le président.

Mohamed Abrini se tait. Mais Muhammad Usman aussi. IL refuse de répondre aux questions suivantes de l'avocate de parties civiles. Il reprend finalement sa parole pour dire "ses conditions de détention difficiles. J'avais pas de livres en pakistanais, pas de Coran."

Interrogé sur les attentats du 13 novembre 2015, Muhammad Usman déclaré : "c'est vraiment triste ces attentats et une catastrophe pour notre humanité."

Me Seban : "vous avez dit avoir eu un entraînement à la kalachnikov. Pourquoi ne pas l'avoir dit avant ?" Muhammad Usman : "je ne connaissais pas les lois françaises. J'avais peur qu'il y ait la peine de mort en France. J'ai pensé que si je disais la vérité, on allait me tuer".

Me Seban : "vous avez dit que Daech c'était l'islam qui fonctionnait. Vous pensez ça aujourd’hui ?" Muhammad Usman : "Non." - vous pensez qu'il ne faut pas jeter les homosexuels du 6e étage ? - Moi je ne suis pas capable de faire ça. Après, chacun applique l'islam comme il veut.

Me Seban (PC) : "tout ce que vous aurait demandé l'Etat islamique vous l'auriez fait ?" Muhammad Usman : "tout ce qu'ils me disaient, je croyais que c'était ça qu'il fallait faire. - c'est pour cela que vous allez commettre des attentats en France ? - c'est ce qu'ils m'ont dit.

Me Karim Laouafi, avocat de Muhammad Usman l'interroge à son tour. "Sans Abou Obeida, tu ne serais pas parti [en Syrie, ndlr]? Muhammad Usman : non - qu'est-ce qui t'a plu chez lui ? - il avait l'air de quelqu'un de bien. Il m'envoyait des vidéos de l'Etat islamique.

Fin des questions à Muhammad Usman. Le président indique avoir "demandé au témoin qui était là depuis très très très longtemps de repousser son audition à jeudi parce qu'elle ne pouvait pas demain." L'audience est donc suspendue. Reprise demain à 12h30.

Jour 71 –Mercredi 26 janvier – Interrogatoire sur les faits de l'accusé Bakkali

Jour 71 au procès des attentats du 13 novembre Aujourd'hui sera interrogé l'accusé Bakkali, qui a déjà été condamné à 25 ans de réclusion criminelle par une cour d'assises spéciale à Paris lors du procès de l'attentat du Thalys.

L'accusé Mohamed Bakkali se lève, crâne dégarni rasé, barbe courte derrière un masque chirurgical. Le président lui annonce qu'il va lui poser des questions sur la religion. Mohamed Bakkali, voix grave et posée : "Je veux d'abord dire quelque chose"...

Mohamed Bakkali : "Je voulais pas vous couper, Monsieur le président mais... En fait, je ne suis pas en capacité de répondre à vos questions, et je veux bien expliquer pourquoi". Le ton de l'accusé Bakkali est particulièrement posé.

Mohamed Bakkali : "J’ai eu un autre procès, avec beaucoup d'espoir" (le procès de l'attentat du Thalys lors duquel il a été condamné à 25 ans de réclusion) "Je me suis expliqué très longuement, et tout ça, ça m’a cassé"

Mohamed Bakkali : "Quoi que je dise, quoi que je fasse, ma parole est toujours suspecte. Et j’ai remarqué qu'elle n’avait pas de valeur"

Mohamed Bakkali : "J'ai eu beau joué le jeu, ça n'a rien changé, j'ai eu une condamnation à laquelle je ne m'attendais pas"

Mohamed Bakkali : "Il y a eu ce début de procès compliqué pour moi, et les cinq semaines de parties civiles difficiles à encaisser, ça m'a achevé, je n'ai plus la force de me battre et de m'expliquer"

Mohamed Bakkali : "On me demande de parler de choses qui datent d'il y a plus de 6 ans, je ne sais même plus la personne que j'étais à l'époque. Je préfère faire valoir mon droit au silence"

Président Périès : "C'est votre droit le plus absolu, mais je préfère insister un peu" Mohamed Bakkali : "Le problème, c'est que quoi que je fasse, c'est toujours la même chose, on considère que c'est de la ruse". La ruse, cette taqqya souvent associée au djihad.

Mohamed Bakkali, la voix toujours particulièrement posée, et grave : "C’est pas un caprice, mais je ne suis plus en capacité. Ce que je renvoie est très différent de ce que je dis réellement"

Mohamed Bakkali : "Je l’ai fait une fois, je me suis battu, j’ai été condamné pour quelque chose que je n’ai pas fait, on a réussi à me condamner avec l’absence de preuve"

Président Périès : "Vous dites qu’on ne vous a pas écouté, c’est dommage que vous n’essayiez pas à nouveau devant une autre juridiction" Dans le procès de l'attentat du Thalys dans lequel il a été condamné à 25 ans de réclusion, Mohamed Bakkali a fait appel

Président Périès : "Je connais des dossiers où en appel, il y a eu des acquittements !" Mohamed Bakkali : "Dans des affaires de terrorisme aussi graves ?" Le président : "Bon…"

Mohamed Bakkali : "Je suis dans un cas où tout est défavorable. J'ai retourné la question. Je ne veux pas me battre. Je ne peux plus".

Président : "Est-ce que ça signifie que vous voulez l’utiliser jusqu’au bout", ce droit au silence ? Mohamed Bakkali : "Voilà, j’ai fait un certain nombre de déclarations, et c'est tout" Il faudra désormais s'en tenir aux déclarations faites durant l'instruction

Accusé Bakkali : "C’est ma décision et mes avocats n’ont rien à voir, mes avocats auraient préféré que je puisse parler"

Mohamed Bakkali : "Je suis dans un état où je suis pas bien, voilà, c’est comme ça, j’ai pas envie de me plaindre, j’ai pas envie d’entrer là-dedans" Le président lui indique qu'il va quand même poser ses questions. Accusé Bakkali : "Je peux me rasseoir ?"

Président Périès : "On aurait aimé vous entendre sur ces regrets, monsieur Bakkali ?" Mohamed Bakkali reste enfermé dans son silence.

Elle expliquait aux enquêteurs que Mohamed Bakkali faisait tout pour ses enfants, et qu'il était "respectueux" avec elle.

Elle décrit le mode de vie de Bakkali : fumer "des joints" quand il était jeune, puis du sport, en salle, et le foot, et la piscine (des piscines privées)

Elle évoque un "débrouillard", avec des ventes au noir. Elle décrit un époux "sympa, cool". Elle dit avoir appris par la presse son rôle présumé de "logisticien" des attentats du 13 novembre, "pour moi, c'est vrai sinon il ne serait pas en prison"

Des propos qu'elle a donc tenus devant les enquêteurs, en audition. Audition entrecoupée de larmes, précise le président Périès.

Elle disait aux policiers qu'elle pensait qu'il "n'aurait jamais été capable de tuer quelqu'un"

Le président annonce une suspension. Avant d'entendre un témoin, frère de Mohamed Bakkali.

L'audience reprend avec l'arrivée du grand frère de Mohamed Bakkali, électromécanicien, 38 ans. Il vit en Angleterre. Il se tient à la barre, crâne dégarni et rasé, énorme barbe brune dépassant de son masque.

Le président lui dit qu'il ne va pas prêter serment vu ses liens avec son frère, mais dire la vérité... "Evidemment", dit le frère...

Le grand frère Bakkali décrit une enfance "sans problème, une éducation magnifique, dans une petite cité pavillonnaire"

Le grand frère Bakkali dit que son frère était "très calme, même le plus calme de la famille", plus que lui-même qui était plus impulsif. Il estime que Mohamed Bakkali était "trop gentil", "ce qui l'amène à être ici"

Président Périès : "Est-ce qu'il est naïf ?" Grand frère Bakkali : "Non, pas naïf. Très intelligent. Un peu fainéant, à la fin", pas vraiment décroché de diplôme à la différence des autres membres de la famille. Le grand frère répète que Mohamed Bakkali "trop gentil"

Le grand frère dit que Mohamed Bakkali "tombé plusieurs fois dans le panneau, il faisait trop confiance" Le grand frère était au courant des ventes illégales de Mohamed Bakkali, "au bout d'un moment, on se rend pas compte de ce qu'on fait"

Le grand frère habitait Verviers en Belgique. Au 4e étage, Mohamed Bakkali, au 2e du même immeuble. Ils vivaient dans ce même immeuble quand Mohamed Bakkali a été marié à sa première épouse. Le grand frère : "au début ça allait bien", et puis histoires de couple...

Le grand frère Bakkali porte une chemise BCBG bleue, pull V gris, blouson capuche beige. Il regarde le président droit dans les yeux.

Le président : "Est-ce que vous avez remarqué des signes de radicalisation chez votre frère ?" Le grand frère Bakkali répond que pas la même perception de la radicalisation, "quelqu'un qui essaie de pratiquer mieux sa religion, faire ses prières à l'heure, est-ce un signe ?"

Président Périès : "C'est pas du tout ce que j'ai dit. La radicalisation : aller par exemple faire des recherches sur internet, la Syrie, ect..." Le grand frère Bakkali répond que lui aussi en a fait, pour s'informer, et ne se considère pas comme radicalisé.

Le grand frère, debout à la barre, a le même ton calme, la même voix grave que son petit frère Mohamed Bakkali, assis dans son box.

Le grand frère Bakkali dit qu'il ne connaissait pas les frères El Bakraoui. L'un d'eux dans l'appartement du grand frère, à son insu, dit-il. Le grand frère dit que "c'était une bêtise", qu'il n'aurait "jamais accepté" un inconnu chez lui, "je fais pas confiance"

Le grand frère Bakkali ajoute : "maintenant, il est tombé dans une affaire bien plus grande, je lui pardonne, c'est mon frère"... On comprend à demi-mots qu'il pardonne l'histoire de l'inconnu dans l'appartement à son insu.

Une autre magistrate de la cour enchaîne sur les questions. Précise que ce grand frère a quatre ans de plus que Mohamed Bakkali.

Elle fait remarquer au grand frère qu'au domicile familial, où le grand frère a vécu, on a trouvé dans l'ordinateur un dossier Mohamed avec des fichiers appelant au djihad Perquisition de 2015. Le grand frère n'y vivait plus depuis des années.

"J'ai pas connaissance de cet ordinateur-là. J'ai pas dit que ça pouvait être moi", dit le grand frère Bakkali, sous le feu des questions de la première assesseuse.

Elle rappelle des propos tenus sur Mohamed Bakkali, le grand frère disait alors de lui que "c'était un gros nounours", "avec deux mains gauches" (pour le manuel, précise-t-il à la barre)

Elle lui demande s'il a eu l'occasion de parler du 13 novembre avec lui, lorsqu'il est allé le voir en prison ? Le grand frère Bakkali : "Je lui ai posé une seule question, est-ce que tu savais ? Il m'a dit : non"

La première assesseuse lui explique que son frère Mohamed Bakkali a décidé d'exercer son droit au silence aujourd'hui lors de l'interrogatoire. Le grand frère dit qu'il ne sait pas pourquoi, "je ne connais pas le cachot"

Et il ajoute : "Par contre je peux dire quelque chose ?" Assesseuse : "Oui" Grand frère Bakkali : "C’est personnel, mais j'ai l’impression qu’on est déjà préjugé, peut-être que ce droit au silence, c’est lié à ça"

Le grand frère Bakkali parle des "questions orientées" et "du procès premier procès où on a fait venir un ami, on ne lui a posé aucune question !"

La cour se lance dans une sorte de leçon de morale au grand frère Bakkali, pour lui expliquer qu'il faut suivre un procès en intégralité pour voir comment il se tient. "Les réseaux sociaux, vous savez, c'est pas forcément fidèle !", lâche le président Périès.

Le témoin fait remarquer qu'il ne peut pas rester neuf mois dans cette salle d'audience, et qu'il n'a pas d'autre solution que de suivre le procès comme avant le Thalys "à la télé" et "sur les réseaux"

Le grand frère Bakkali répète à la cour : "Je vous donne mon impression, je juge pas, j’ai l’impression qu’on est déjà condamné"

Et les débats portent maintenant sur la taille de la barbe. Le grand frère Bakkali ayant évoqué sur PV un changement chez son petit frère Mohamed, l'ayant taillé par le passé. "Moi aussi je taille ma barbe !", qui est très épaisse et dépasse de son masque à la barre.

Le grand frère Bakkali déplore : "On est toujours soupçonnés d’être des terroristes dès qu’on porte une barbe ! On est préjugés et encore plus en France !"

La cour signale une note sur lui, en tant qu'islamiste radical. A la barre, il écarquille les yeux et s'exclame : "salafiste, je sais même pas ce que c'est !" puis reconnaît qu'il fréquentait une mosquée somalienne "prise comme centre djihadiste, mais c'est pas ça !"

Et le grand frère Bakkali dit que le prêcheur de cette mosquée "était gentil". Et il répète, en le déplorant, que "dès qu'on a une barbe, et qu'on va à la mosquée", considéré comme islamiste.

Me Topaloff, avocate de parties civiles : "Vous partagez les mêmes convictions religieuses que votre frère ? Le même islam ?" Le grand frère Bakkali répond qu'il n'y a qu'un islam, "les gens qui s’égarent, ils s’égarent"

Le grand frère Bakkali qui ajoute : "S’il y a des gens qui le détournent, c’est plus l’islam, c’est eux qui sont dans l’erreur. Est-ce que j’ai les mêmes convictions que mon frère ? Oui. Est-ce que mon frère est djihadiste et j'ai les mêmes convictions ? Non"

Le grand frère Bakkali qui explique que sa femme porte le niqab, qu'en Angleterre "le niqab ne pose pas de problème", qu'il y a aussi "des prières de rue" auxquelles il participe "sans que ça dérange personne"

Grand frère Bakkali : "Mais ici, vous avez une autre perception, pour vous, une dame qui met le niqab, c’est peut-être un homme qui l’a obligée"

Le grand frère Bakkali explique que "pratiquer l’islam c’est pas que physique" (la barbe / le niqab) "mais des valeurs morales, l'islam est dans le cœur"

Interrogé par Me Seban qui lui rappelle qu'il y a eu "130 morts le 13 novembre", le grand frère Bakkali dit : "je comprends tout à fait qu'il faut juger les coupables"

Me Seban parle du silence de l'accusé Bakkali tel "un mépris". Sur les bancs des avocats de la défense, une voix s'élève et crie : "Un droit au silence, c'est pas un mépris !"

"Merci monsieur d'être venu de si loin", remercie le président de la cour. Et le grand frère Bakkali va s'asseoir dans la salle, sur un banc, derrière des parties civiles, sous le regard des gendarmes.

"L'audience est levée", annonce le président de la cour. Le grand frère Bakkali se lève à son tour pour s'approcher du box, et les gendarmes le laissent aller parler à son frère Mohamed Bakkali. La vitre les sépare.

Et Mohamed Bakkali discute quelques instants avec son frère, au bout de ce 71e jour d'audience, jour d'interrogatoire durant lequel il a exercé son droit au silence. L'audience reprendra demain avec la suite sur le planning de son interrogatoire.


Jour 72 – jeudi 27 janvier – Suite de l’interrogatoire de l’accusé Bakkali

Bonjour à tous, C'est la 72e journée d'audience au procès des attentats du 13 novembre 2015

L'audience du jour devrait être consacrée à la suite de l'interrogatoire de Mohamed Bakkali ainsi qu'à l'audition de témoins le concernant, mais l'accusé a fait usage de son droit au silence hier et plusieurs témoins refusent de venir. Beaucoup d'interrogations donc.

L'audience reprend, en l'absence désormais habituelle de l'accusé Osama Krayem qui refuse toujours d'assister aux débats. Mais en la présence d'un témoin, directrice des services pénitentiaires, venue rendre compte de l'évaluation de la radicalisation de Muhammad Usman.

Raphaële Cade a été responsable du QER (quartier d'évaluation de la radicalisation) de Fleury-Merogis : "Le rôle du QER est un outil d'évaluation. On a évalué plus de 100 personnes, pendant 15 semaines. Il y avait une attention sécuritaire aussi mais il n'y a pas eu de problèmes"

Raphaële Cade évoque l'évaluation au QER de l'accusé Muhammad Usman : "ça a été une session particulière : du fait de la crise sanitaire, le quartier a été mis à l'isolement et les détenus n'ont pas été vus pendant deux mois. Il [Muhammad Usman] était plutôt dans l'échange."

Raphaële Cade : l'accusé Muhammad Usman "n'a pas eu de problème disciplinaire, il a été plutôt constant dans son attitude. Il était indigent, ne recevait pas de courrier. Il pouvait contacter sa famille une fois par semaine avec l'aide de l'indigence qu'il pouvait avoir."

Raphaële Cade : Muhammad Usman "avait un discours empreint de naïveté, on sentait qu'il aurait pu être une proie très facile à manipuler par l'Etat islamique. Des éclaircissements restaient à obtenir sur son comportement pendant qu'il était en Syrie."

Raphaële Cade : Muhammad Usman "prônait son désengagement total et disait son égarement par rapport à l'Etat islamique. On a pris à la fin la décision de le renvoyer en détention ordinaire."

Me Murgulia (défense) : "vous confirmez que Muhammad Usman n'est plus ancré dans l'idéologie radicale et violente ? Raphaële Cade (QER) : "il en parle comme ça. Il n'a pas été violent. C'est pour ça qu'il a été orienté en détention ordinaire. Sinon c'est retour à l'isolement."

Me Huylebrouck, autre avocat de Muhammad Usman : "avez-vous constaté du prosélytisme de sa part ?" Raphaële Cade (QER) : "non, on n'a pas eu ce retour. Je pense qu'il s'est préservé de certaines situations."

Me Huylebrouck souligne qu'à 3 reprises des éléments "que l'administration pénitentiaire estime accablants" (courriers etc.) "ont été saisis dans la cellule de M. Usman" mais pas transmis au QER pourtant chargé de son évaluation. Raphaële Cade : "il y a certainement une raison"

Me Maktouf (PC) : "madame, je me demande si vous n'êtes pas la proie de la takkya [stratégie de dissimulation prônée par les djihadistes] de monsieur Usman." Raphaële Cade : "la takkya est bien une stratégie de dissimulation, mais je n'en suis pas la proie."

Me Topaloff (PC) : "les madrasas sont des écoles coraniques d'endoctrinement. Vous savez qu'elles se félicitent d'avoir formé les cadres talibans. L'accusé a passé six ans dans une école comme celle-ci. Comment pouvez-vous penser qu'il a une faible connaissance religieuse ?"

Raphaële Cade : "cette information [sur la faible connaissance religieuse de Muhammad Usman, ndlr] nous a été transmise par l'imam qui n'est pas un intervenant du QER mais qui a l'habitude d'échanger avec nous".

Me Topaloff (PC) : "comment peut-on dire que l'on regrette d'avoir été en Syrie et en même temps refuser d'en parler ? Est-ce que l'attitude de repentir n'implique pas d'abord de reconnaître ?" Raphaële Cade (QER) : "cela va aussi avec son attitude qui est assez immature."

Me Topaloff (PC) : "je vais dire les choses autrement : vous l'avez cru ? Vous le croyez quand vous dites qu'il est dans une posture de repentir ?" Raphaële Cade (QER) : "non, c'est une hypothèse."

Camille Hennetier (avocate générale) : on comprend que cette évaluation s'est faite dans des conditions dégradées : du fait du Covid et des entretiens moins nombreux et du fait de l'absence d'interprète en ourdou pour M. Usman. C'est bien cela ? Raphaële Cade (QER) : tout à fait.

Interrogée sur les activités proposées aux détenus dans le quartier d'évaluation de la radicalisation, la directrice explique : "on a des évaluations artistiques et aussi de gestion du stress parce que certains vivent mal l'attente de leur évaluation".

Camille Hennetier (AG) : "comment on évalue la sincérité des détenus ?" Raphaële Cade : "on fait un travail avec les familles, parfois il y a des éléments transmis par les surveillants de nuit ..." - en l'occurrence avec M. Usman, il n'y avait pas de parloirs, pas de courriers"

Me Kempf, avocat de Yassine Atar : "que pensez-vous du fait que dans un procès aussi grave au moins un des accusés [en l'occurrence son client] n'ait pas été affecté au QER ?" Raphaële Cade : "ça dépendait d'où il était incarcéré et comment les choses pouvaient être organisées"

Fin de l'audition du témoin. "Merci d'être venue nous donner toutes ces explications aujourd'hui", salue le président. L'audience est suspendue avant le prochain témoin.

Jawad B. "mon cousin, on l'appelait pipelette. Il ne sait pas garder quelque chose pour lui. Une chose comme ça, il n'y aurait jamais participé, encore moins être dans la confidence. Mes cousins [les frères El-Bakraoui, logisticiens du 13 novembre ] avaient zéro confiance en lui"

Jawad B. évoque maintenant Mohamed Bakkali : "je l'ai croisé deux ou trois fois pour lui acheter des parfums, des vêtements contrefaits on va dire". Et Ali El Haddad Asufi : "on allait boire des verres, voir des filles. C'est quelqu'un qui n'est pas radicalisé du tout".

Jawad B. a grandi avec ses cousins, les frères El-Bakraoui qui ont supervisé la logistique du 13 novembre 2015 et sont morts en kamikaze le 22 mars à Bruxelles : "il a fallu que je vois ce qu'il restait des corps à la morgue pour réaliser que c'était vraiment eux."

Jawad B. au sujet de ses cousins les frères El-Bakraoui : "ils ont dissimulé tout ça [leur radicalisation et les projets d'attentats, ndlr] avec moi comme ils l'ont fait avec le reste de la famille".

Président : "vous avez participé à une tentative de braquage de banque en 2006 avec Ibrahim El-Bakraoui?" Jawad B.: "oui, on a été condamnés en 2011."

Le président poursuit : "et en 2010, une tentative de braquage dans une banque Western Union, avec Ibrahim El-Bakraoui, armé d'une kalachnikov qui a tiré sur des policiers. C'est extrêmement grave !" Jawad B. : "oui, j'ai été condamné à 8 ans [de prison, ndlr] en appel."

C'est pendant leur détention qu'Oussama Atar, autre cousin, et commanditaire des attentats du 13 Novembre 2015, va rendre visite aux frères El-Bakraoui en détention et les radicaliser. Jawad B. : "il est venu me voir aussi mais il ne m'a jamais parlé de religion".

Jawad B. : "j'ai toujours été beaucoup plus proche d'Ibrahim [El-Bakraoui, ndlr] que n'importe lequel de mes cousins. On partait en vacances ensemble. Et on a été incarcérés en même temps. On se voyait en promenade. Et pour moi, il n'était pas radicalisé."

Jawad B. au sujet de son cousin Ibrahim El-Bakraoui : "il a vu que mon caractère, mon mode de vie n'avait rien à voir avec ce que à quoi lui a prêté allégeance. Donc il savait que sur ces points-là, il ne me faisait pas confiance." Président : "mais, il n'a même pas tenté?"

Jawad B. : "en prison, moi j'étais au rez-de-chaussée, lui au 3e étage. On se voyait pas vraiment. Puis quand on est sortis, on se voyait dans les mariages, les trucs comme ça. Mais très vite, il y a eu un froid. J'ai compris après que c'était pour dissimuler leur radicalisation"

Lorsque Jawad B. évoque son parcours carcéral, il jargonne beaucoup : " on m'a révoqué ma condi, deux mois après, j'ai été libéré pour "terro", j'ai mon sursis qui est tombé ...."

Alors qu'il est entendu depuis plus de 45 minutes, le témoin s'excuse : "je ne vous ai pas précisé, mais j'ai des problèmes d'audition. Normalement, je dois porter des appareils, c'est pour cela que je vous demande de répéter".

Interrogé avec insistance sur le sujet, Jawad B. maintient qu'il n'a appris le départ en Turquie (en ensuite en Syrie) de son cousin Ibrahim El-Bakraoui qu'après les attentats : "à cette époque, j'étais en froid avec lui".

Jawad B., qui a expliqué avoir parfois acheté des produits contrefaits à Mohamed Bakkali se souvient "de sa douceur, sa voix calme. Il était souvent avec sa fille. Il était émerveillé par elle, ça m'avait marqué."

Ce moment où le témoin, Jawad B. lâche à la barre : "sur Bruxelles, en 2010, il y avait des kalachnikovs partout en fait. C'était limite si c'était pas en vente libre."

Jawad B. explique qu'en 2016, il est arrêté, soupçonné d'être mêlé aux attentats du 22 Mars à Bruxelles : "l'enquêteur m'a dit : si tu coopères, demain tu es libre. Sinon tu es parti pour dix ans. Moi j'ai dit tout ce que je savais mais j'étais pour rien là-dedans."

Selon Jawad B. : "et j'ai refait 4 ans et demi de prison pour des faits pour lesquels j'avais été condamné avant et j'avais déjà été libéré."

Jawad B. : "j'ai déjà été incarcéré par le passé. Mais c'était pas pareil. Là, dans les auditions pour terrorisme, ça crie. C'est la pression, la pression. Ils me disaient : "Paris [ce procès-ci, ndlr] t'attend". Dans les PV, ils modifiaient un mot, oubliaient une phrase"

Me Rezlan : "vous avez dit que dans les affaires de terrorisme, certaines personnes étaient prêtes à dire n'importe quoi pour sortir. Vous pensez à quelqu'un en particulier ?" Jawad B. : "je veux pas citer de nom. Je suis venu en Thalys et en métro. J'ai une famille à Bruxelles."

Me De Taye : "vos cousins appartenaient au grand banditisme. Est-ce qu'ils étaient de la catégorie des bandits qui ne parlent pas ou de ceux qui se la racontent sur tous les toits de Bruxelles ?" Jawad B. : "ils étaient très discrets. Ils ne parlaient pas dans les voitures etc."

Me Jonathan de Taye, avocat d'Ali El Haddad Asufi : "je ne voudrais pas faire une mauvaise pub à Bruxelles mais si je vous dit qu'une journaliste, qui n'est pas un braqueur de banque, s'est procurer une kalachnikov à Bruxelles en une journée, vous me croyez?" Jawad B. : "oui"

Me Jonathan de Taye (défense) : "est-ce que les frères El-Bakraoui avaient besoin d'Ali El Haddad Asufi [accusé de ce procès] pour trouver une kalachnikov ?" Jawad B. : "non, certainement pas."

Me Fanny Vial, avocate de Farid Kharkhach, revient sur les conditions de garde à vue et d'interrogatoires en Belgique évoquée par le témoin : "à monsieur Kharkhach, on a dit que s'il ne disait pas un certain nombre de choses, sa femme qui allaitait leur bébé irait en prison"

Me Fanny Vial : "Ibrahim allait tous les jours chercher un enfant à l'école. Ce qui laisse penser qu'Ibrahim El-Bakraoui avait une double vie que même sa compagne ignorait" Jawad B. : "oui, il y a eu cette rumeur. Après coup, je me suis dit que c'était vrai".

Jawad B. revient sur les fausses accusations dont il a fait l'objet : "ça m'a tellement secoué qu'en prison, j'ai eu une paralysie faciale. Et maintenant ça fait deux ans que je fais de la kiné pour rouvrir mon oeil et ma bouche. On m'a expliqué que c'était à cause du stress."

Nicolas Braconnay (avocat général) : "vous avez porté des accusations graves contre les policiers belges et les conditions de vos interrogatoires. A quoi sert votre avocat?" Jawad B. : "c'est chaque fois des avocats différents." - non, il y en a trois. - sur quatre fois.

Me Christian St Palais, avocat de Yassine Atar, (pour lequel le témoin a apporté du linge, explique le pénaliste) : êtes-vous poursuivi pour ces faits [le 13 Novembre 2015 ndlr] en Belgique ? Jawad B. : non Le témoin, pourtant, était très proche de Yassine Atar, rappelle son avocat.

: parlez-nous un peu de la personnalité de votre cousin Yassine Atar ? Jawad B. : "c'est un non-violent, un businessman qui aime faire de bonnes affaires. Il est dingue de son fils, il ne va pas rentrer dans de sales histoires."

Jawad B. : "Yassine, s'il voit qu'un braquage se monte, il va partir. Dans le passé, quand on montait des braquages avec Ibrahim, on lui disait rien, on lui faisait pas confiance. Ne fusse qu'un scanner de police, on ne lui disait pas parce qu'on savait qu'il allait le répéter."

Jawad B. :"quand on a appris pour les attentats de Bruxelles, on était effondrés, choqués. Je me souviens de Yassine [Atar, ndlr] qui pleurait devant moi. Il disait : "ça aurait pu être ma femme dans le métro". On se disait : "c'est pas possible".

Fin de l'audition du témoin. Et fin aussi de cette journée d'audience. Reprise demain à 12h30 avec l'interrogatoire de Mohamed Amri, venu chercher Salah Abdeslam à Paris après les attentats du 13 Novembre 2015.

Jour 73 – Vendredi 28 janvier – Interrogatoire de l’accusé Mohammed Amri

Semaine 19, jour 73 au procès des attentats du 13 novembre Aujourd'hui, la cour d'assises spéciale va interroger l'accusé Mohammed Amri.

Mohammed Amri est âgé de 33 ans. Il est né au Maroc. Avait décrit une enfance heureuse, lors de son interrogatoire de personnalité il y a quelques semaines. Il est arrivé en Belgique à l'âge de 14 ans, à Molenbeek. C'est là qu'il est devenu copain avec les deux frères Abdeslam

Le 13 Novembre2015, Salah Abdeslam a appelé Mohammed Amri dans la nuit, pour le rapatrier de Paris à Bruxelles. Amri est venu le chercher en voiture, accompagné de l'accusé Attou.

Pour son interrogatoire, Mohammed Amri sera défendu par de brillants avocats, Me Negar Haeri et Me Xavier Nogueras, deux anciens secrétaires de la conférence, avocats élus par leurs pairs pour leur éloquence. Il y en a beaucoup dans les affaires de terrorisme.

L'audience reprend. Jour 73. Sans l'accusé Krayem, qui refuse désormais de comparaître dans le box.

Un avocat s'approche de la barre pour demander une nouvelle constitution de parties civiles. Peu après, le président se tourne vers le box. "Ça vous fait rire, Monsieur Abrini ?" Il poursuit : "Monsieur Abrini a l'air très joyeux"

Et le président annonce une liaison vidéo avec la Belgique. La cour va commencer par entendre le père de Mohammed Amri. On le voit à l'écran. Pull beige, cheveux gris, "j'ai 66 ans, j'étais employé au SAMU social de Bruxelles"

Mohammed Amri, lui aussi, faisait des maraudes au SAMU social de Bruxelles, quand il n'était pas dans le café Les Béguines de Brahim Abdeslam. C'est d'ailleurs après une maraude qu'il est parti à Paris la nuit du 13 Novembre, alors que Salah Abdeslam l'appelait pour le rapatrier

Le père Amri décrit son fils Mohammed comme "quelqu'un de très humain, très gentil, il donnait de la nourriture aux gens qui en ont besoin, c'était quelqu'un de très très gentil"

Le père Amri, sur son fils Mohammed, accusé de ce procès : "Il est arrivé en Belgique en 2005. Après il arrêté l'école et il a commencé à travailler avec moi au SAMU social. C'était quelqu'un de très normal, très gentil, très bien quoi"

Le père Amri était arrivé en Belgique dans les années 70. Puis était retourné au Maroc (où Mohammed, 4e enfant d'une fratrie de 6, est né en 1988). Le père est retourné en Belgique "en nonante neuf". Puis il y a eu le regroupement familial en 2005.

Le père Amri : "Toute ma famille est ici en Belgique maintenant". Président : "Donc vous avez décrit votre fils Mohammed comme quelqu'un de gentil. Posé ? Ou il pouvait être impulsif ?" Le père de Mohammed Amri : "Posé. C'était quelqu'un qui parlait même pas fort"

Le président a une question sur le couple que Mohammed Amri forme avec son épouse -qu'on va également entendre en visio depuis la Belgique. Le père : "Avec sa femme, ça a toujours été, pas de conflits. Peut-être il y avait des choses que je ne savais pas"

Président Périès : "Vous connaissiez le café Les Béguines ?" Le café de Brahim Abdeslam, grand frère de Salah Abdeslam et un des kamikazes du 13 Novembre. Non, le père Amri n'en a jamais entendu parler. Seulement à la télé après les attentats.

Le père Amri explique que son fils travaillait au SAMU social : "il faisait des maraudes, en fait on fait un peu de tout, accueil, maraudes, logistique aussi". Puis le père poursuit : "Après, il est arrivé ce qui est arrivé"

Le père Amri : "Après, je connais pas ses copains, ses fréquentations, je connais pas"

Le président Périès : "Est-ce que vous aviez parlé de la Syrie avec votre fils Mohammed ?" Le père de Mohammed Amri : "Non, on n'a jamais parlé de ça avant les faits"

Président Périès : "Et qu'est-ce que vous en pensiez vous de ces départs en Syrie ?" Père Amri : "Moi personnellement, je partirais pas. Là où il y a des problèmes, j'y vais pas. Je pars en vacances n'importe où, mais pas où y a des problèmes"

Le père Amri : "Jusqu'à présent, je comprends pas ces gens qui acceptent de se faire exploser. Pour moi, c'est des assassins. Ça se fait pas de tuer des innocents"

Président Périès : "Est-ce que Mohammed avait montré une adhésion aux thèses de l'EI ?" Père Amri : "On était vraiment loin. On avait pas la tête à ça"

Père Amri : "Mohammed n'a jamais été radicalisé. Il voyait la religion normale : faire ses 5 prières. Elle nous interdit de faire quoi que ce soit à son prochain. La religion, elle a jamais dit qu'il faut tuer des innocents"

Le père de Mohammed Amri : "Allah a pas besoin de gens qui vont tuer des innocents" Le père parle depuis Bruxelles, on le voit à travers un écran. Son fils est dans le box des accusés à Paris, on le voit derrière la vitre du box.

La première assesseure demande au père s'il savait que son fils au café Les Béguines de Brahim Abdeslam. Le père répond qu'il n'y a "jamais mis les pieds". Il n'avait pas envie que son fils y aille, car il savait "qu'on y a fumait du haschich" tout ça.

Le père Amri assure que son fils Mohammed ne lui parlait pas de Brahim Abdeslam. La première assesseure se demande alors comment il savait que Mohammed avait acheté la Golf de Brahim Abdeslam ? Soupçon dans la question, comme si le père était lui aussi accusé.

Me Maktouf, avocate de parties civiles demande au père Amri pourquoi il a parlé de Salah Abdeslam dans une audition passée ? Le père : "Salah Abdeslam, je l'ai vu à la télé, c'est un criminel, un tueur, mon fils n'est pas comme ça, c'est clair"

Le père de Mohammed Amri répète : "Mohammed, c'est quelqu'un qui respecte la religion, quelqu'un de très sympa, très gentil, très humain"

Une avocate de parties civiles veut savoir si Mohammed Amri a appris l'arabe, à l'école, au Maroc. Le père répond qu'il a étudié en primaire au Maroc, "il a étudié l'arabe, la 2e langue chez nous, c'est le français". Puis il est arrivé en Belgique à l'âge de 14 ans.

Une autre avocate de parties civiles demande comment le père peut affirmer que son fils pas radicalisé puisqu'ils ne vivaient plus sous le même toit ? Le père Amri : "Je connais très bien, mon fils" L'avocate : "Mais y a pas d'éléments concrets ?"

Un certain nombre de questions d'avocats de parties civiles laissent perplexes. Ils demandent au père de répondre à des questions auxquelles il semble difficile d'avoir toutes les réponses pour le père d'un jeune adulte. En 2015, Mohammed Amri avait 27 ans.

Le père de Mohammed Amri : "Il s’est fait avoir sans le savoir. Il n’a jamais été radicalisé. C’était pas son genre, c’est clair. Mohammed, il est très gentil. Trop gentil, c’est pas bon".

Le père de Mohammed Amri : "Moi, Salah Abdeslam, s’il me demande d’aller le chercher parce qu’il est tombé en panne, je vais pas aller le chercher. Parce que mon fils, il était déjà au travail depuis 10 heures du matin. Mais mon fils, il est gentil".

Le père de Mohammed Amri : "Mon fils ne savait pas ce qui allait se passer. Il a connu ces gens-là, parce qu'il vivait dans le quartier. Il a travaillé au noir. Mais être au courant ou radicalisé, non"

Le père de Mohammed Amri : "Ces gens ont volé 6 ans de la vie de mon fils et de sa femme. Mon fils, il a pas été en France avec une ceinture d'explosion. Il a fait une erreur : aller le chercher, aller dans ce café, mais c'est une erreur de jeunesse" 

Me @NoguerasXavierl 'un des avocats de Mohammed Amri demande combien de temps il lui a fallu pour s'adapter quand il arrive en Belgique à l'adolescence ? Le père Amri :"Ça va prendre beaucoup de temps"

Me @NoguerasXavier, avocat de Mohammed Amri : "Vous êtes très proche de votre fils ? Vous le voyez en prison ?" Le père Amri : "Depuis qu'il est à Paris, je l'ai pas vu". Depuis un an, dit-il. Avant, il allait le voir tous les 15 jours dans la prison de Lille.

Me @NoguerasXavierrappelle que le père de Mohammed Amri a dit qu'il avait déjà vu son fils voler de la nourriture dans le frigo pour la donner aux nécessiteux. Le père : "Pas qu'une fois, plusieurs fois"

Me @NoguerasXavierdemande quand Mohammed Amri a commencé à prier ? Le père : "Un peu tard, comme moi aussi. On allait ensemble à la mosquée. Après, il priait chez lui"

Me @NoguerasXavier: "Est-ce que vous l'avez senti glisser en 2015 ?" Le père Amri : "Non, je connais bien mon fils. Il taillait sa barbe avec la tondeuse. Il a jamais laissé pousser une grosse barbe, ça il a jamais fait"

Me @NegarHaeril'autre brillante avocate de Mohammed Amri a une question sur le port de foulard. Elle pose toujours ses questions d'une voix très douce. Le père Amri : "chez nous, le foulard c'est normal chez une femme, mais pas obligatoire"

Et le père de Mohammed Amri explique que l'épouse de son fils a porté le foulard un certain temps, mais elle ne le porte plus.

Me @NegarHaeri demande pourquoi Mohammed Amri a arrêté très tôt l'école. "Qu'est-ce que ça dit de lui ?" Le père de Mohammed Amri : "C'est quelqu'un qui aime bien avoir des choses, une voiture, des vêtements, c'est le but du travail"

Et la visio s'achève avec le père de Mohammed Amri. Courte suspension avant d'établir une nouvelle liaison avec Bruxelles. Cette fois, on va entendre l'épouse de Mohammed Amri.

L'audience reprend. Et l'épouse de Mohammed Amri apparaît à l'écran. Elle porte de très longs cheveux bouclés sur un pull blanc. Elle paraît très jeune. Elle annonce son âge. Sourit. Rire enfantin. Elle est puéricultrice.

Elle demande à la presse de ne préserver son identité. Et commence : "Ce qui s'est passé, je trouve ça effroyable, et quand y a eu l'interpellation de mon mari, il y a eu un choc". Et elle se met à pleurer.

Entre ses larmes, elle poursuit : "pour les stupéfiants, ça m'aurait pas étonnée, mais pas pour du terrorisme !"

L'épouse de Mohammed Amri : "J'ai toujours eu peur qu'on le prenne dans des histoires de drogue, et je trouve ça tellement dommage parce qu'il vaut tellement mieux". Mais "il est tellement gentil"

L'épouse de Mohammed Amri, en larmes : "C'est moi qui faisais tourner le ménage, c'était pas facile à assumer pour lui, je pense que c'est aussi pour ça qu'il a atterri aux Béguines, avec le SAMU social"

L'épouse de Mohammed Amri, en larmes : "Je souhaitais être présente aujourd'hui, parce que je l'aime. Il est ma personne référente, avec ma maman".

L'épouse de Mohammed Amri ajoute : "Je pense qu'il est aussi anxieux que je sois là aujourd'hui, parce que je suis son petit bijou et il veut me préserver du mal de toute cette affaire. Voilà".

Interrogée par le président, elle répond à la fois qu'elle ne connaissait pas les fréquentations de son mari, mais savait qu'il allait aux Béguines, "café à la réputation exécrable", devant lequel elle passait depuis ses 12 ans, et lui donnait pas envie d'entrer.

Le président lui demande s'ils ont parlé Syrie avec son mari Mohammed Amri ? "Non, je suis pas trop politique"

Le président lui demande si elle connaissait les Abdeslam L'épouse de Mohammed Amri répond "non", sauf de nom. Elle savait que c'était Brahim Abdeslam qui avait vendu une Golf à son époux.

L'épouse de Mohammed Amri s'inquiétait qu'il vende de la drogue aux Béguines. Il lui disait qu'il ne s'occupait que des boissons. Et ne consommait que pour lui. "Pour moi, c'est juste un gros consommateur de soft drogues, beuh, shit, ect"

L'épouse de Mohammed Amri : "Je ne connaissais pas ses copains, il ne connaissait pas mes copines, on avait notre vie ensemble et nos petites vies séparées" Président : "Pas de volonté de connaître l'entourage de votre partenaire ni d'un côté ni de l'autre ?" Elle : "Non"

"Meneur ou suiveur ?"demande le président. L'épouse : "Mohammed est très introverti, très pudique, pas du tout meneur, plutôt suiveur, même à la maison. Mohammed est extrêmement gentil, trop bon" Président : "C'est pour ça qu'il travaillait au SAMU social ?"

Elle dit qu'il travaillait au SAMU social parce qu'il trouvait que "c'était gratifiant, pour amener une chaleur humaine des gens qui sont dans la rue"

L'épouse de Mohammed Amri raconte que le matin du 13 novembre il l'a déposée au boulot, est retournée la chercher et lui a dit alors qu'il devait travailler le soir au SAMU social de Bruxelles.

Le président demande si Mohamed Amri consommait beaucoup de stupéfiants à l'époque ? L'épouse : "Déjà un, moi je trouve que c'est beaucoup. Mais elle ne sait pas combien, c'est pas elle qui payait". Président : "J'imagine ! Mais on ne lui reproche pas ça aujourd'hui"

L'épouse de Mohammed Amri reparle du 13 novembre : "Il est allé me chercher à 17h, a pris une douche, est parti au SAMU social à 18h, m'avait dit qu'il finissait vers 2h du matin. Y a eu les flashs info, je lui ai dit il se passe quelque chose en France, y a eu des fusillades"

L'épouse de Mohammed Amri : "Ensuite, moi je me suis endormie parce qu'il était déjà très tard. Il m'a dit finalement, il devait travailler jusqu'à 8h du matin. Le lendemain matin, le 14 novembre, il était pas là. Il est rentré à midi, "très fatigué" 13 novembre

L'épouse de Mohammed Amri raconte son 13 novembre : "Je me rappelle qu'il y avait le match de foot, et après la finale de SecretStory". Elle sourit. Et elle pense s'être endormie devant la télé. Ne se rappelle pas ce qu'ils se sont dit au téléphone.

L'épouse de Mohammed Amri parle d'une voix particulièrement enfantine. Joues légèrement roses. Raie au milieu, cheveux très longs de chaque côté. Et rit parfois. Rire enfantin.

Le président insiste sur ce dont elle se souvient de sa conversation téléphonique avec son mari ce 13 novembre Elle a peu de souvenirs. Assure qu'elle se serait rappelée.

Elle affirme qu'elle n'a jamais vu Mohammed Amri regarder des photos d'exaction.

Une magistrate de la cour lui demande si elle voyait la couleur de l'argent que gagnait son mari ? Dans un rire : "Non", répond l'épouse de Mohammed Amri. "Je pense qu'il s'en servait pour survenir à ses besoins" (en drogues...) La magistrate écarquille les yeux.

La magistrate l'interroge sur la musique écoutée en voiture avec son mari. L'épouse de Mohammed Amri : "ça pouvait être un anasheed, mais après ça pouvait être du rap..." Il y a quelques semaines, Me @NoguerasXavier avait surtout voulu que son client parle du rap...

Et alors que Me @NoguerasXavierdemandait à Mohammed Amri ce qu'il écoutait, pour bien montrer qu'il était pas un islamiste radical et aimait la musique, Amri avait répondu contre toute attente... "le rappeur Kamikaz"

C'était lors de l'interrogatoire de personnalité de Mohammed Amri. Que France Inter avait ainsi raconté.

La 1ère assesseure note que la directrice du SAMU social a expliqué qu'il avait regardé les infos le soir du 13 Novembre puis est allé chercher un ami. L'épouse note qu'elle pouvait pas savoir de chez elle qu'il avait regardé.

L'épouse continue à brosser le portrait d'un mari gentil qui ne savait pas dire non quand on lui demandait d'être accompagné en voiture... Avec personne.

Mais l'épouse de Mohammed Amri affirme que si son mari lui avait dit qu'il allait chercher un ami à Paris, elle aurait dit non, "vu ce qu'il se passait". Et surtout si elle avait su que c'était pour aller chercher Salah Abdeslam, à cause des Béguines.

La 1ère assesseure lui parle d'une clé USB sur laquelle des recherches liées au djihad ont été effacées. L'épouse de Mohammed Amri affirme qu'elle n'était pas au courant de ces recherches.

La 1ère assesseure a une autre question embarrassante, sur une photo retrouvée dans le téléphone de l'épouse de Mohammed Amri, photo avec un couteau. Me@NoguerasXavier veut démontrer que cette photo n'a pas été téléchargée, est issue d'autres recherches internet.

Un avocat général du parquet national antiterroriste note que l'épouse de Mohammed Amri avait parlé de son mari comme ayant "beaucoup de caractère". Elle dit qu'il était surtout gentil. "Et vous aviez dit irritable ?" Elle : "Quand il n'avait pas fumé son joint..."

Le PNAT note qu'elle avait dit qu'il pouvait reprendre les voisins. "Les voisins casse-pieds si l'on peut dire". Elle dit qu'ils ont été ciblés, "parce que couple mixte, lui maghrébin, moi européenne, comme vous pouvez voir"

Le PNAT note une recherche internet : "obligation de hijra", août 2015. Elle affirme : "J'ai voulu en savoir plus c'est possible, mais on n'a jamais eu envie de partir, hijra (émigration en terre musulmane) ne veut pas dire Syrie"

Au fil des questions-réponses, on apprend qu'ils n'ont pas vécu ensemble avant de se marier. Elle dit que c'est pour ça que parfois "on pouvait se prendre la tête sur une chaussette, une chaussure. Il pouvait être blessant dans les mots même s'il ne le pensait pas"

L'épouse de Mohammed Amri : "Comme je suis son tout, ça lui fait mal de faire du mal à quelqu'un qu'il aime". Cela fait deux fois qu'elle dit qu'elle est son "tout".

Me Chemla, avocat de parties civiles, s'étonne que dans un couple uni, Mohammed Amri n'ait pas dit à son épouse qu'il avait ramené Salah Abdeslam de Paris. Abdeslam qui dit dans la voiture au retour qu'il aurait dû se faire exploser le 13 Novembre

Me Chemla insiste lourdement : "Qu'est-ce que ça vous fait ?" Et l'épouse de Mohammed Amri se remet à pleurer : "Bien sûr, bien sûr, c’est pas normal. Moi cette personne-là (Salah Abdeslam, qu'elle ne nomme pas), elle m’a pris une partie de ma vie"

L'épouse de Mohammed Amri, en larmes : "Je peux pas dire que ma peine est plus grande que ce qui s’est passé pour les familles et tout ça, mais cette personne-là, elle m’a aussi volé une partie de ma vie, et ni mon mari ni moi, on a voulu ce qu’il s’est passé"

Epouse de Mohammed Amri : "Mon mari aurait dû aller à la police ou dire "non tu montes pas dans la voiture" (à Salah Abdeslam) 13 Novembre

Epouse de Mohammed Amri : "Il aurait dû aller à la police, mais il m’en a pas parlé, peut-être pour pas me faire de la peine, me faire peur"

Me @catherineszwarc ose une question sur les oeufs que Mohammed Amri a mangés le 14 novembre 2015, à, midi, après son aller-retour Bruxelles-Paris-Bruxelles pour rapatrier Salah Abdeslam L'avocate : "il y a eu des attentats d’une intensité incroyable et il mange des oeufs !"

Soupirs dans la grande salle d'audience, face à certaines questions. Comme celle-ci.

Me Dewavrin, avocate de parties civiles, l'interroge sur leur rencontre amoureuse. Dans une fête de quartier, dit l'épouse de Mohammed Amri. Mis en contact par un ami. On sent le soupçon dans les questions, alors qu'ils n'ont pas vécu ensemble avant de se marier

L'avocate insiste. Veut faire dire à l'épouse de Mohammed Amri qu'elle pratiquait l'islam, et peut-être un islam rigoriste ? "Vous croyez que je serais habillée comme ça ?", rétorque-t-elle. Elle est en pull/jean/tête nue à l'écran, donc.

L'avocate assène une nouvelle question embarrassante : "vous pouvez me rappeler votre compte Facebook ?" L'épouse de Mohammed Amri : "Imène servante d'Allah" Et alors, elle dit qu'elle s'est convertie à l'islam quand elle avait 17 ans. Mais rien de radical, dit-elle.

Sur le banc de la défense, un avocat belge se lève et s'insurge contre le traitement fait à l'épouse de Mohammed Amri, "comme si vos larmes étaient moins importantes que d'autres et provoquées"

Me @NegarHaeri avocate de Mohammed Amri dit qu'elle comprend que son client n'ait rien dit de son 13 Novembre pour la protéger. L'épouse pleure à nouveau.

Me @NegarHaeri, avocate de Mohammed Amri : "Monsieur Amri, il voulait que vous veniez témoigner ?" Epouse : "Non, il avait honte que je le voie comme ça et tellement peur de ce qu'on pourrait dire ou me faire"

L'épouse de Mohammed Amri parle de l'importance de la voiture pour elle : "Quand on était pas encore mariés, c'est comme ça qu'on se voyait, en voiture, parce que je n'allais pas chez lui, il n'allait pas chez moi"

Me @NegarHaeri souligne que l'épouse de Mohammed Amri ne porte pas de voile. Dans une déclaration, Amri a dit qu'il aimerait que les femmes musulmanes portent le voile. L'épouse : "Il aurait pu me dire : tire-toi !", puisqu'elle ne le porte pas, "mais notre amour était plus fort"

Me @NegarHaeri souligne que les femmes de radicalisés ne sont pas du genre à ne pas porter le voile. L'épouse de Mohammed Amri s'exclame : "Ah non", pour confirmer les dires de l'avocate.

Et après des heures de questions, fin de l'audition de l'épouse de Mohammed Amri.

Me Ronen, l'avocat de Salah Abdeslam veut "attirer l'attention de chacun", elle a "l'impression que des témoins peuvent avoir l'impression d'être accusés, je souhaiterais alerter chacun sur la tonalité des questions posées"

Me Olivia Ronen déplore que des témoins soient "rudoyés", "comment parler librement dans un climat qui frôle parfois l'indignité, quand on a des personnes qui s'inventent experts conjugaux..."

Me Olivia Ronen : "Je pense que notre intérêt à tous, c'est un climat serein. Même si cette audience ne réparera rien, peut-être elle peut apaiser" Président : "Alors, je suis l'arbitre"

Le président Périès estime qu'il n'y a pas d'indignités des débats depuis le début de cette audience le 8 septembre. "On est pas là pour s'invectiver de part et d'autre, la police des débats, j'y tiens, je vous demande de respecter la contradiction"

Après une courte suspension, l'audience reprend. Avec l'interrogatoire de Mohammed Amri qui va seulement débuter.

Une avocate de l'accusé El Haddad Asufi fait une courte intervention pour dire que son client souffre d'une conjonctivite, demande qu'un médecin le voie en prison. "Aïe" dit le président Périès. Qui va faire un mail. Et l'interrogatoire de Mohammed Amri va commencer.

Mohammed Amri se lève, cheveux ras, barbe taillée, masque blanc FFP2, chemise blanche impeccable. Le président l'interroge sur la religion. L'accusé Amri : "Je ne suis pas radicalisé, le mot radicalisé, je ne le connaissais pas avant la détention, taqqya, tout ça"

Le président Périès évoque les radicalisés qui ne serraient plus la main des femmes, n'écoutaient plus de musique... "Et vous ? Vous avez continué, fumer des cigarettes, autre chose ?..." Amri, hésitant.

L'accusé Amri : "Euh, ouais, je serrais la main des femmes on va dire, je fumais, parfois je buvais de l'alcool, je faisais la bise..."

Mohammed Amri dit qu'il n'avait pas à l'époque de connaissances sur la radicalisation. "Brahim Abdeslam, pour moi, il était pas radicalisé. Radicalisé, on vient de le dire, quelqu'un qui serrait pas la main aux femmes, buvait pas, Brahim Abdeslam faisait tout ça..."

L'accusé Amri : "Est-ce qu'on peut dire que Brahim Abdeslam était radicalisé ? Pour moi non"

L'accusé Amri : "Brahim Abdeslam, je l'ai connu en 2007. Je l'ai connu sans le connaître. Je savais qu'il s'appelait Brahim, quoi. Il tenait un café" (pas Les Béguines), où on vendait du shit. Président : "déjà ?"

L'accusé Amri : "Salah Abdeslam, je l'ai connu en 2008, mais on se fréquentait pas. De vue". Puis entre 2013 et 2015, il l'a vu au café Les Béguines.

Le président lui demande quand il a travaillé au café Les Béguines de Brahim Abdeslam L'accusé Amri : "Moi, j'ai travaillé aux Béguines en avril, mai, juin 2015"

Mohammed Amri parle d'une voix lente, élocution non fluide. Et replace sur son nez son masque FFP2.

Le président Périès l'interroge sur les vidéos EI vues dans le café Les Béguines. L'accusé Amri : "Je crois pas avoir parlé d'exactions"

Président Périès : "Vous aviez dit que Brahim Abdeslam était un peu zinzin", regardant des vidéos de combats, prêches, "ça veut dire quoi un peu zinzin ?" Accusé Amri : "Un peu fou, quoi, un peu zinzin..."

L'accusé Amri précise : "Moi j'étais pas proche de Brahim Abdeslam Président : "Vous travailliez pour lui quand même ?" Amri : "Oui, mais pas proche. Vidéo EI et tout ça, peut-être qu'il en parlait avec d'autres mais pas moi"

L'accusé Amri : "Faut savoir le café il est petit, 15-20 m2, même sur un téléphone, on entend tout, et moi j'ai rien remarqué ! Président : "Justement, si c'est tout petit, vous deviez entendre ?" Amri : "Non" Le président se râcle la gorge.

Et l'accusé Mohammed Amri enchaîne les : "La vérité, je me rappelle pas"

Et l'accusé Amri assure qu'il n'a vu Brahim que regarder des vidéos de prêches et de combats. Président : "Et vous n'aviez pas vu qu'il s'était radicalisé ?"

Le président lui rappelle des propos tenus sur les personnes qui font des attentats. "Vous aviez dit, je n'ai rien à dire sur ça, chacun fait ce qu'il veut" Amri : "J'ai pas calculé, c'était la fin de l'audition, je voulais une cigarette, j'ai pas pesé mes mots"

Président Périès : "Vous confirmez ?" Amri : "Non, je condamne tout acte de violence"

Président : "Vous n'aviez pas remarqué qu'il y avait beaucoup de gens qui partaient en Syrie de Molenbeek ?" Accusé Amri : "La vérité, les gens qui partent en Syrie, ils le disent pas, après dans le quartier, on le dit"

Président Périès : "Qu'est-ce que vous en pensez ?" Accusé Amri : "Moi je dis ces gens-là, c'est des fous, ils connaissent rien à la religion"

Le président note que l'accusé Amri s'est arrêté de fumer.

Le président lui demande s'il a su que Brahim Abdeslam était allé en Syrie. Mohammed Amri assure qu'il ne l'a pas su à l'époque. Il assure aussi qu'il n'a jamais vu Abdelhamid Abaaoud, ni jamais su qu'il avait emmené son petit frère à Raqqa.

Le président s'étonne : "J'avais cru comprendre que beaucoup de choses se savaient à Molenbeek..."

Le président lui demande pourquoi il s'est rapproché de Salah Abdeslam en juin 2015, notant des appels téléphoniques. Mohammed Amri ne sait plus. Ne se souvient plus.

Mohammed Amri : "La vérité, c'était quelqu'un de bien Salah Abdeslam "

Mohammed Amri qui a dit un peu plus tôt : "J’ai jamais eu l’idée de partir en Syrie pour aller faire le djihad. Je me suis jamais intéressé à tout ça"

Le président Périès a très peu de questions pour l'accusé Amri ce soir. Il passe la parole à sa première assesseure, redoutable depuis le début des interrogatoires de ce procès

La magistrate demande à Mohammed Amri s'il confirme ce qu'a dit son épouse de lui. L'accusé Amri : "La vérité, je me rappelle pas du tout ce qu’elle a dit mon épouse"

La magistrate lui fait remarquer qu'il a souvent changé d version. Et l'accusé Amri, comme un gimmick, répète qu'il ne se rappelle pas. "Je me rappelle pas de tout"

L'avocat général Braconnay l'interroge à son tour. Sur les vidéos de EI qu'aurait vues Brahim Abdeslam aux Béguines, aux dires d'un témoin. Amri rétorque que ce témoin a dit beaucoup de mensonges.

L'avocat général fait remarquer à Amri qu'il commence toutes ses phrases par "la vérité"... "Alors ?" L'accusé Amri, de ce même ton très lent : "Moi je vous dis la vérité. J’ai rien à dire

L'avocat général lui demande pourquoi il allait aux Béguines. Amri : "La première chose, c'était à côté de chez moi, et pour fumer, y avait une ambiance entre jeunes du quartier, pour décompresser"

L'avocat général l'interroge sur des photos trouvées sur son téléphone (frères Kouachi, exécution, peut-être un égorgement). Il n'a pas d'explication autre que son avocat @NoguerasXavier sur les recherches antérieures qui aboutissent à ces photos inopinées en somme.

Mohammed Amri répète souvent : "Je sais pas, j'ai pas d'explication"

Mohammed Amri répète : "le mot radicalisé, moi, je le connaissais pas, monsieur le président. Moi, je buvais, je fumais du shit..." Une avocate de parties civiles : "fumer n'est pas le seul critère !"

Mohammed Amri, à l'avocate : "Expliquez-moi ce que c'est radicalisation, et il a du mal à dire le mot"

Mohammed Amri : "au café Les Béguines, y avait pas que des vidéos de EI "

Mohammed Amri : "Moi, ce que je peux vous dire, c'est que Brahim Abdeslam faisait ça plutôt discrètement, plutôt que ouvertement"

Une avocate de parties civiles insiste avec ces questions, et Mohammed Amri commence à s'énerver : "comment ça se fait que la police belge a pas vu la radicalisation de Brahim Abdeslam ?"

Mohammed Amri : "Et être en détention pour une chose que j'ai pas commis..." Derrière lui, Mohamed Abrini s'énerve aussi dans le box. L'avocate de parties civiles poursuit ses questions.

L'avocate lui demande en quelle langue il lit le Coran ? "En arabe", et "en français pour bien comprendre", répond l'accusé Amri. L'avocate insiste lourdement et ne comprend pas alors qu'il écoute des anasheeds s'il ne comprend pas bien l'arabe ?

Accusé Amri : "C'est comme la musique américaine, vous écoutez ? Moi j'écoute les anasheeds pour le rythme. Mais sinon, j'écoute du RAP français"

Me Topaloff, autre avocate de parties civiles, ne comprend pas la nature des relations entre Amri et les frères #Abdeslam. Sur ce, un téléphone sonne. "C'est un véritable standard téléphonique !", s'exclame le président Périès.

Me Topaloff veut savoir si Amri était plus proche de Brahim ou Salah Abdeslam "Salah, c'était quelqu'un de bien", répète pour la deuxième fois, Mohammed Amri.

Me Topaloff lui demande de revenir sur ces propos qu'il a eus, "la double peine" qu'il dit subir...

Mohammed Amri : "C’est une double peine parce que je me suis fait avoir par les frères Abdeslam Si je suis ici, c’est à cause d’eux, vous le savez ça ?"

Me Topaloff, avocate de parties civiles : "Donc vous estimez que vous avez été trahi par des gens pour qui vous aviez une certaine estime ?" Mohammed Amri : "Les frères Abdeslam font partie des terroristes qui ont commis ces attentats !"

Mohammed Amri : "Si je suis ici, aujourd’hui, c’est à cause des frères Abdeslam, qu’est-ce que vous voulez que je vous dise de plus ?" Silence, dans la salle d'audience.

Mohammed Amri, en réponse à une autre avocate sur la radicalisation et les vidéos de EI : "Y a des radicalisés méchants et des radicalisés gentils, est-ce que vous avez pas regardé des vidéos ?" demande-t-il à l'avocate...

Mohammed Amri : "Pour moi, quelqu'un de radicalisé, à l'époque, on appelait ça des barbus, les radicalisés ils boivent pas, ils se lèvent religion, ils parlent religion, ils condamnent l'EI "

Un autre avocat de parties civiles note qu'Amri a plusieurs fois dit que Salah Abdeslam "était quelqu'un de bien, et aujourd'hui ?" Mohammed Amri : "Si je suis ici, c'est à cause de lui, donc je lui en veux un peu, la vérité, mais je suis prêt à pardonner"

Mohammed Amri continue à répondre sur Salah Abdeslam : "J’ai entendu à la barre des victimes qui disaient qu’elles étaient prêtes à pardonner. Je suis quelqu'un de sensible, je suis content qu’il soit encore en vie, après c'est à la cour d'en juger"

Me Villele demande à Amri à propos de Salah Abdeslam : "Ça reste votre ami ?" Mohammed Amri, après un petit silence : "C'est un peu compliqué"

C'est au tour de son avocate Me @HaeriNegar de se lever. Mohammed Amri dit qu'il a condamné les attentats juste après le 13 Novembre, "et même dans la voiture", dit-il. Et Salah Abdeslam lui a alors répondu, dit-il : "Ferme ta gueule, qu'est-ce que tu connais de la religion ?"

Me @HaeriNegar lui demande : s'il avait su qu'il allait autant s'embourber et mettre son épouse dans cette situation aujourd'hui alors qu'ils s'aimaient, est-ce qu'il prendrait le risque de refaire ce qu'il a fait ? Elle répète. Il a du mal à comprendre la question.

Plusieurs fois, Mohammed Amri semble avoir eu sincèrement du mal à comprendre les questions qu'on lui posait.

Me @NoguerasXavier se lève à son tour, dit qu'il faut regarder tout ce qui a pu se visionner, fait remarquer à la cour qu'à cette même époque, Mohammed Amri a aussi téléchargé "Moi, moche et méchant"

Mohammed Amri répète qu'il ne savait pas ce que c'était que la radicalisation en 2015

Me @NoguerasXavier: "Vous comprenez qu'on vous reproche soit votre radicalisation, soit la connaissance de la radicalisation des Abdeslam " Amri peine à comprendre. L'audience se termine ainsi...