Procès des attentats du 13 novembre 2015 - Le Live Tweet - Semaine TRENTE SEPT

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.


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Retrouvez sur cette page tous les tweets du procès issus des Live tweets de @ChPiret Charlotte Piret et @sophparm Sophie Parmentier ; elles suivent ce procès pour France Inter et nous ont donné l'autorisation de compiler leurs tweets dans un objectif de consultation et archivage.



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Semaine TRENTE SEPT

Jour 138 – Lundi 13 juin – Début des plaidoiries des avocats de la défense

Jour 138 au procès des attentats du 13 Novembre 2015. Les avocats de la défense commencent leurs plaidoiries. Comment défendent-ils les accusés depuis 9 mois ? Comment vont-ils plaider ?

L'audience reprend. Avec Me Marie Dosé qui s'avance à la barre. "Je suis la première à plaider, à ouvrir le bal". Elle plaide pour Ali Oulkadi.

Elle était la dernière à plaider, en défense, au procès des attentats de janvier 2015, pour l'accusé Pastor Alwatik, et elle avait alors eu l'impression que les parties civiles "avaient écrasé" les accusés, "parole confisquée".

Me Marie Dosé : "On a eu peur que cette enceinte ne soit plus qu’un espace de parole, on a eu peur d’une justice réparatrice au cœur du procès, avant même que les accusés ne disent un mot. On a eu peur pour celui que nous défendons".

Me Marie Dosé : "Cette justice restauratrice a été au cœur du procès pour Ali Oulkadi. Et elle s’est poursuivie dans les couloirs, vous le savez". Oulkadi qui comparaissait libre, et lors des pauses, des victimes sont venues discuter avec lui.

Ali Oulkadi qui est jugé notamment pour avoir brièvement conduit Salah Abdeslam le 14 novembre à Bruxelles, au début de sa cavale.

Me Dosé tacle les avocats de parties civiles qui se sont comportés comme "des procureurs". Tacle entre autres Me @Gerard_Chemla qui "a mis tout le monde dans le même sac, disant que les accusés se défendent comme des vendeurs de shit" Me Dosé tacle encore Me  @Gerard_Chemla pour ces mots aux accusés : "Ils sont tous humains, parce que le mal est dans l’humanité"

Me Dosé rappelle qu'il faut individualiser. Et cite une victime qui a eu des mots si justes : "C’est pas parce qu’on souffre qu’on confond tout et tout le monde" Pour l'avocate pénaliste, "c'est peut-être le plus beau moment d'audience"

Me Dosé rappelle que depuis son arrestation dans ce dossier, "Ali Oulkadi a perdu son travail. Pour être ici chaque jour à midi et demi, il devait dormir soit à l’hôtel Formule 1, mais ça coûtait 50 euros par jour, il ne pouvait pas" re

Ali Oulkadi, qui a sa femme et ses trois enfants en Belgique, a donc choisi de loger avec Abdellah Chouaa, explique-t-elle. Tous deux accusés aux strapontins. Sous contrôle judiciaire. Viennent donc librement au procès

Marie Dosé : "Ali Oulkadi a rejoint M. Chouaa qui loue un abri de jardin. La dame qui leur loue, ils l’appellent Mamie. Elle croit qu’ils sont commis de cuisine. Elle a pas posé trop de questions. Ali Oulkadi lui a réparé son électricité, M. Chouaa lui porte ses courses".

Marie Dosé : "Je veux quand même juste que vous sachiez que son épouse, après son témoignage à la barre, elle n'a pas eu le droit de rester dans la salle. Elle n’aura jamais pu regarder le père de ses enfants, regarder ce qu’il affronte seul depuis neuf mois dans cette salle".

Marie Dosé rappelle les mots d'Oulkadi à la barre : "Il a dit ici : je voudrais remercier du fond du cœur les parties civiles qui viennent me dire bonjour, me font me sentir Ali"

Me Dosé raconte la détention provisoire qu'Ali Oulkadi a très mal vécu pendant 31 mois. Puis il a été placé sous contrôle judiciaire, en juin 2018. Peu avant, il y a eu une confrontation avec Salah Abdeslam

Abbdeslam qui en mars 2018, lors de cette confrontation était sorti de son silence pour défendre Oulkadi.

Me Dosé confie ensuite qu'au cours de ce procès, Ali Oulkadi s'est rendu pour la première fois au Bataclan. Avec H. Attou et A. Chouaa. "Ce sont des victimes qui les ont emmenés". Pour l'avocate, c'est "le plus beau pont" entre accusés et victimes.

Me Dosé qui dit qu'Ali Oulkadi a été "fracassé" par la détention. Mais "il est quelqu'un de bien", dit-elle.

La semaine dernière, les avocats généraux ont requis cinq ans de prison à l'encontre d'Ali Oulkadi. Sans mandat de dépôt.

Et Me Dosé revient sur ce qu'on lui reproche. Donc, le 14 novembre, H. Attou l'appelle, et le retrouve au café avec Salah Abdeslam qui en est au début de sa cavale.

Me Dosé : "Ali Oulkadi s'est tout de suite en voyant Salah Abdeslam qu'il y avait un problème, et le problème c'était Brahim", le grand frère de Salah.

Brahim Abdeslam était l'ami d'Ali Oulkadi. Mais Oulkadi a dit à l'audience que jamais il n'aurait pensé que son ami pouvait commettre des attaques terroristes. Quelques jours plus tôt, ils jouaient aux cartes.

Puis plus de nouvelles de Brahim Abdeslam. Alors Ali Oulkadi s'inquiète. Et quand Salah Abdeslam, le 14 novembre, lui annonce que son frère est mort, il lui dit aussi qu'il est "dans la merde".

Me Dosé s'insurge à la barre : "C'est ça le recel de terroriste ?!" Elle clame qu'Ali Oulkadi ne pouvait pas deviner que Salah Abdeslam était complice, car "il a joué les victimes" le 14 novembre, dans ce café, au début de sa cavale.

Ali Oulkadi qui a toujours dit qu'il ne se doutait pas que Brahim Abdeslam ait pu commettre des attaques terroristes.

Et Me Dosé rappelle qu'il faut juger Ali Oulkadi juste en fonction de ce qu'il savait de Brahim Abdeslam, son ami (même âge, Salah Abdeslam lui était "un petit", petit frère)

Donc toute la question est de savoir si Ali Oulkadi s'est rendu compte que Brahim Abdeslam était radicalisé au café Les Béguines où étaient projetées des vidéos de Syrie dont celle d'Abaaoud.

Me Dosé, avec humour, dit aux magistrats qu'il faut juger en imaginant ce qu'il pouvait savoir en allant aux Béguines. Elle fait un parallèle avec Les Deux Palais, le café face au palais de justice. Si on s'apercevait que le patron tenait les mêmes propos qu'Abdeslam, on irait ?

Me Dosé dit que celle qui a dénoncé Abaaoud a eu un immense courage. Mais "ce n'est pas la même histoire, elle n'apprend pas la mort de son meilleur ami dans un attentat"

Me Dosé s'insurge contre le fait que le PNAT estime que le simple fait qu'Ali Oulkadi ait fréquenté le café Les Béguines (où étaient diffusées des vidéos EI) = association de malfaiteurs terroriste. "C'est pas possible !" s'énerve-t-elle.

Car elle rappelle que Brahim Abdeslam était son meilleur ami, et que "personne le prenait au sérieux, il avait toujours un joint dans la main"

Me Dosé : "Et si A. Oulkadi était allé au commissariat dire attention, mon ami, quand il a fumé, il tient des propos inquiétants ?" Il ne se serait rien passé, dit-elle. La police ne serait pas venue, pense-t-elle.

Elle s'insurge qu'on l'accuse d'avoir dû savoir, comprendre que son ami Brahim Abdeslam était radicalisé donc, et que Salah Abdeslam avait participé aux attentats le 14 novembre

Me Dosé conclut : "Vous savez que Ali Oulkadi vomit ces attentats, vous savez qu'il ne partageait pas le "délire" de Brahim Abdeslam et ne le prenait pas. Vous allez considérer que l’intérêt de son ami pour le djihad est un élément de l'association de malfaiteurs terroriste ?"

Me Dosé reprend les mots de l'avocate générale : "la justice et le droit doivent avoir ici le dernier mot" Me Dosé estime qu'on ne peut retenir contre Ali Oulkadi, "le recel de terroristes et l’élément moral Association de malfaiteurs terroriste n’est pas constitué"

Marie Dosé se rassied. Me Dosé qui reste en dehors de ce prétoire, très engagée pour le retour des enfants de djhadistes détenus dans des camps en Syrie. Plusieurs victimes de ce procès ont le même discours qu'elle. Arguments humanistes et sécuritaires mêlés.

Me Judith Lévy arrive à la barre. Elle est l'associée de Me Marie Dosé. Judith Lévy n'a manqué aucun des 138 jours de ce procès

Me Lévy ne comprend pas la "différence de traitement entre Ali Oulkadi et Hamza Attou alors qu'ils ont fait la même chose". Attou encourt la peine la plus faible : 6 ans, pour recel de terroriste. Oulkadi risque 20 ans, mais le PNAT n'a requis que cinq ans de prison contre lui.

Me Lévy rappelle que sur le compte Facebook d'Ali Oulkadi : la photo de sa fille avec une girafe.

Me Lévy qui pensait comme Me Dosé que le PNAT renoncerait à poursuivre Ali Oulkadi pour association de malfaiteurs terroriste, "mais c'était sans compter sur ce triptyque : connaissance-complaisance-conscience"

Triptyque que Me Lévy critique, et elle critique le réquisitoire qui ne dit pas qu'on fumait du cannabis aux Béguines, "on parle juste d'un fan club de EI", mais elle estime que c'est faux

Elle rappelle qu'Ali Oulkadi à l'époque fumait du cannabis. Se fournissait aux Béguines (Hamza Attou livrait), aux Béguines où on pouvait fumer tranquille, Brahim Abdeslam lui-même fumait...

Elle rappelle que Brahim Abdeslam était le meilleur ami d'Oulkadi, mais que B. Abdeslam ne s'était jamais rendu chez lui, sa femme ne connaissait que son prénom

Me Lévy revient sur l'autre fait reproché à Ali Oulkadi, avoir accompagné Brahim Abdeslam à l'aéroport (départ en Syrie), mais dit-elle, Ali Oulkadi pensait qu'il partait en Turquie. Sans sa femme, mais il avait divorcé 3 mois plus tôt peu après le mariage au Maroc.

Méticuleusement, Me Lévy veut prouver qu'Ali Oulkadi n'aurait pas dû être jugé à ce procès 13 Novembre mais au procès ParisBis.

Me Lévy : "Ali Oulkadi n'a rien à faire ici, il est cette pièce du puzzle qui ne mène nulle part"

Me Lévy ironise : "On est dans une logique les amis de mes amis sont mes amis" Ce qu'elle conteste. Elle estime que ni l'AMT ni le recel de terroriste ne peut tenir à l'encontre d'Ali Oulkadi.

Elle estime qu'il peut être condamné que pour recel de malfaiteurs. Peine encourue trois ans de prison. "Or, il a déjà purgé sa peine". 31 mois de détention.

Elle souhaite qu'il puisse retourner à Molenbeek, libre, emmener ses trois enfants à l'école et au foot, retrouver son épouse, reprendre son métier d'électricien.

Me Lévy @DoseLevy_Avocat conclut :"Nous souhaitions cela a été un honneur pour nous de défendre Ali Oulkadi. Le président Périès annonce une suspension avant la prochaine plaidoirie. Ali Oulkadi se dirige vers la barre et ses avocats pour les remercier de leurs plaidoiries. Me Marie Dosé et l'accusé Oulkadi se prennent dans les bras l'un de l'autre. Accolade chaleureuse.

Et l'audience reprend avec la plaidoirie de Me @DelphineBOESEL l'une des avocates d'Hamza Hattou.

Hamza Hattou est le plus jeune accusé de ce procès 13 Novembre Le seul à risquer 6 ans de prison maximum pour recel de malfaiteurs terroriste. 6 ans ont été requis. Avec mandat de dépôt. Celui qui est depuis dix mois libre sur un strapontin, mais pourrait repartir en prison.

Me @DelphineBOESEL s'emporte contre les réquisitions "vengeresses" du parquet national anti-terroriste. Elle les estime injustes, pour ce "très jeune homme" qui ne "s'intéressait à rien" le soir du

Hamza Attou ne regardait pas les infos. D'après elle, ne pouvait pas deviner les attentats.

Elle raconte "ce très jeune homme" qui "a fêté ses 28 ans dans cette salle d'audience, sur un strapontin". Lui aussi a parlé à son avocate de la soeur d'une victime du #Bataclan qui lui parlait pendant le procès. "Il redevenait Hamza et pas un terroriste"

Et Me @DelphineBOESEL s'emporte contre les avocats généraux qui ont requis la peine maximale pour lui : 6 ans, en disant qu'ils n'ont pas réussi à le poursuivre pour association de malfaiteurs terroriste. Elle dit que s'il n'y a pas d'AMT ce n'est pas pour rien.

Et qu'il ne mérite la peine maximale des 6 ans pour recel.

Et elle répète maintes fois que Hamza Attou était ce 13 Novembre, "un très jeune homme", qui aimait bien conduire.

Elle égrène des voyages : Laval, pour un match de foot. L'Allemagne. "Rouler pour du foot, rouler pour fumer, rouler pour des filles, c'est pas faire du chantage psychologique que de dire que la vie d'Hamza Attou au quartier est bien éloignée de la nôtre"

Me @DelphineBOESEL: "Alors le soir du 13 Novembre, il fume. Il a des stupéfiants à livrer. C'est une soirée normale pour Hamza Attou" quand Salah Abdeslam l'appelle pour venir le chercher à Paris.

Auparavant, Salah Abdeslam a déjà appelé Mohammed Amri qui lui a dit qu'il était coincé avec son boulot au SAMU social de Bruxelles. Attou lui est dans son trafic de stup ce soir-là, "mais s'il peut aider, il aide"

Me @DelphineBOESEL: "Le fait de savoir si Hamza Attou avait connaissance des attentats avant de partir en centre, je ne vois pas ce que ça change, nous ça nous semble inconcevable qu'il n'ait pas su..."

Me @DelphineBOESEL : "Ce n'est pas tenter de vous impressionner mais rappeler la réalité de la vie. Qui peut penser qu'un très jeune homme qui deale avec ses 2 Nokia va s'intéresser à ce qui se passe"

Me @DelphineBOESEL : "Quand Hamza Attou prend la route, il pense que ça va être un voyage normal"

Me  @DelphineBOESEL : "Hamza Attou il a toujours dit qu'il avait appris l'existence des attentats sur la route, il l'a redit à votre audience".

Et elle donne des exemples de ce qu'il a révélé : par exemple qu'Abdeslam soit allé chez le coiffeur le 14 novembre 2015 : "vous ne le savez que parce qu'il le dit"

Me @DelphineBOESEL s'insurge parce qu'on aurait voulu qu'il "analyse tout", alors qu'il "était jeune, avait fumé du cannabis, était choqué" face à Abdeslam

Me @DelphineBOESEL assure que durant l'enquête, il a plusieurs fois parlé de sa peur après avoir récupéré Abdeslam le 13 Novembre

Et elle rappelle qu'à l'audience, Hamza Attou a expliqué que c'était pas si facile de se détacher d'Abdeslam le 14 novembre, de retour à Bruxelles et il a "vu comme une délivrance l'arrivée d'Oulkadi"

Me @DelphineBOESEL cite les médecins : "Hattou, naïf et influençable, un peu comme un enfant"

Elle plaide qu'on a du mal à comprendre l'attitude d'Hamza Attou, mais elle est ainsi : "On aurait presque envie de secouer Hamza Attou et de dire, mais pourquoi ?"

Elle dénonce l'audio extrait du reportage @RTBF quand la journaliste tend le micro à Abdeslam, Attou, Amri de retour de Paris quand les deux amis ramènent Abdeslam 13 Novembre Audio de quelques secondes. Que déduire de l'attitude durant ces secondes ?

Me  @DelphineBOESEL : "Il a répondu comme un gamin qui exagère, qui va plus loin". Dans ce reportage  @RTBF la journaliste demandait au trio s'ils comprenaient les barrages après les attentats. "C'est abusé", disait Attou.

Me @DelphineBOESEL s'énerve qu'on ait comparé le cousin d'Abdeslam qui refuse de venir l'aider le soir du 13 Novembre (mais un cousin lointain de Paris), "pas comparable avec Attou, 21 ans, pas en capacité cette nuit de prendre bonnes décisions entre peur, shit et fatigue"Me @DelphineBOESEL : "Qu'il est facile pour nous de se dire qu'on aurait mieux agi, fait un clin d'oeil aux gendarmes au contrôle" pour attirer l'attention sur Salah Abdeslam. Mais "quelle prétention chez celles/ceux qui pensent qu'ils auraient fait mieux"

Me @DelphineBOESEL : "On ne saura jamais ce qu'on a dans nos ventres, si on aurait été plus courageux qu'elle ("Sonia", celle qui a dénoncé Abaaoud)

Et Me @DelphineBOESEL demande à la cour de ne pas retenir la circonstance aggravante "en relation avec une entreprise terroriste". Elle dit qu'il n'y a pas de preuve. Et "qu'il n'est pas radicalisé"

Et elle laisse la place à Me Delphine Paci, avocate à Bruxelles, qui connaît Hamza Attou depuis des années et réclame "une peine juste"

Me Paci : "Monsieur Attou n'est pas radicalisé, mais du côté du ministère public, on nous dit qu'il était au courant de la radicalisation des autres, et complaisant..."

Me Paci : "Juger c'est comprendre, pas excuser mais comprendre"

Et Me Paci explique elle aussi que Hamza Attou a commencé à consommer du cannabis très jeune, puis Brahim Abdeslam lui a proposé d'être serveur au café. Sa vie tourne autour de la consommation de stupéfiants.

Me Paci : "Monsieur Attou, il a une culture religieuse proche de zéro"

Me Paci : "Toute la thèse de l'accusation est fondée sur ce fantasme du café des Béguines. Comme si pop corn pour regarder des vidéos de décapitation EI"

Me Paci : "Monsieur Attou c'était un électron libre. Il était comme l'abeille qui va à la ruche se ravitailler en stupéfants".

Et elle demande qu'un témoin, qui a beaucoup menti et qui est jugé au procès de Paris Bis, soit ici jugé comme un co-accusé.

Me Paci : "On a zéro élément que Hamza Attou savait que Brahim Abdeslam partait en

Me Paci demande quel serait le sens d'une réincarcération de Hamza Attou ? Les avocats généraux ont donc requis contre lui un mandat de dépôt et le soir du verdict, il pourrait quitter son strapontin menottes aux poignets, alors qu'il arrive libre chaque matin.

Hamza Attou a déjà incarcéré deux et mois en détention provisoire.

Me Paci : "Qui peut penser que M. Attou a besoin de retourner en prison pour être réinséré ?"

Me Paci : "Le contrôle judiciaire, je vous avoue que des fois, il n'a pas été respecté, il était dehors hors des heures du procès. Pression du procès. Il avait envie de boire et de fumer".

Elle rappelle qu'il a travaillé pendant le procès. "Chauffeur Uber le week-end et le lundi", explique Me Paci.

Elle explique aussi qu'une maladie lui a été diagnostiquée et pour laquelle il doit être suivi de près.

Me Paci : "Est-ce qu'on pense qu'on doit vraiment renvoyer Monsieur Attou en prison ?" Elle dit qu'il n'en a pas besoin pour s'amender.

Me Paci : "Monsieur Attou porte le poids de la culpabilité à jamais"

Me Paci : "Et cette peine quand elle n'est pas comprise", c'est dangereux. Elle donne l'exemple d'un homme jugé dans le dossier de ParisBis, 4 ans de prison requis or lui avait hébergé Abdeslam en mars 2016

Me Paci : "Si c'est une peine pour faire mal, alors OK"

Me Paci : "Si l'idée c'est de faire mal, alors on réinstaure la peine de mort. Mais notre justice n'est pas celle-là".

Et elle parle du procès. Venir chaque jour à ce procès, "était-ce la liberté ?" demande-t-elle.

Me Paci dit que Hamza Attou n'a jamais été radicalisé. Elle parle de sa psychothérapie et dit "qu'il a mûri".

Me Paci plaide les circonstances atténuantes pour Hamza Attou : "son jeune âge, la peur, la toxicomanie, le fait que c'est un travailleur, la détention déjà subie, sa maladie et ses regrets sincères"

Elle plaide aussi contre les 10 ans d'interdiction de territoire. Plaidant que depuis 10 mois, il est là, "pas dangereux", et que cette interdiction lui compliquerait les visites à sa famille au Maroc.

Fin des plaidoiries de la défense pour aujourd'hui.

Jour 139 – Mardi 14 juin – Suite des plaidoiries des avocats de la défense

Bonjour à tous, Jour 139 au procès des attentats du 13 Novembre 2015. Et suite des plaidoiries de la défense. Aujourd'hui, les avocats d'Abdellah Chouaa et Mohamed Amri plaident tous les quatre.

L'audience reprend. Me Gwenaël Poirier est le premier de la journée à s'avancer à la barre pour la défense d'Abdellah Chouaa, l'un des trois accusés qui comparaît libre. "Je vais vous parler d'un homme libre depuis 6 ans, d'un innocent qui, par votre décision, peut tout perdre".

Me Poitier : "Abdellah Chouaa, c'est le dernier mis en cause belge que les magistrats instructeurs vont choisir pour comparaître dans ce dossier. C'est aussi le premier mis en cause belge qui sera placé sous contrôle judiciaire"

Me Poirier : "alors oui, c'est un accusé libre. Mais c'est aussi le plus menacé par les réquisitions de la semaine dernière car c'est celui qui a fait le moins de détention provisoire."

Me Poirier : "le ministère public vous a requis de condamner un homme libre pour terrorisme en se fondant sur des lacunes et des hypothèses. Vous, mesdames et messieurs de la cour, vous allez faire cesser ce dévoiement en disant qu'en France, des hypothèses ne suffisent pas." "

Me Poirier : "qui était Abdellah Chouaa en 2015 ? C'était un homme pleinement inséré dans la société belge. Il bénéficiait d'un emploi à durée déterminée à l'aéroport de Zaventem, il louait un appartement de 100 mètres carrés était le père de Kassim, cinq ans, fraîchement séparé"

Me Poirier : "Abdellah Chouaa vous a tout dit, tout ce qu'il pouvait vous dire. Originaire d'une famille musulmane, il a été pleinement acquis que cet homme n'était pas pratiquant. Pleinement inséré, il n'avait aucune raison de basculer dans un islam radical."

Me Poirier : "rien ne vous aura été prouvé pour justifier que cet homme se soit intentionnellement associé à un quelconque objectif terroriste."

Me Poirier : " libre, Abdellah Chaouaa rencontrait sur son lieu de travail sa future épouse. On se souvient de l'avoir vue ici avec ses cheveux longs et ses talons haut. C'est avec cette femme qu'il aura deux enfants, âgés de 2 et 5 ans. Cette femme qui est là aujourd'hui"

Me Poirier: "il travaille chaque week-end sur les marchés pour assurer la location d'un cabanon de jardin à Saint-Denis et il aura déboursé pour être présent à ce procès plus de 20 000 euros. Et il est là, chaque jour, coiffé toujours à gauche, à l'heure, avec son petit calepin."

Me Poirier : "c'est aussi un accusé dont les larmes ont coulé, non pas pour se victimiser mais parce qu'éreinté, épuisé par les questions. Abdellah Chouaa vous a parlé à coeur ouvert, il n'a jamais tenté de vous tromper, de vous duper. Et pour cause : il ne le peut pas."

Me Poirier : "le ministère public a enfin reconnu qu'Abdellah Chouaa n'était pas radicalisé. Au titre de l'association de malfaiteurs terroriste qui lui est reprochée, il lui est reproché d'avoir visionné des vidéos djihadistes avec Mohamed Abrini."

Me Poirier : "cet homme a toujours contesté avoir visionné seul ces vidéos, avoir fait des recherches sur l'Etat islamique. Et il a raison. Car son ordinateur était accessible à toutes les personnes fréquentant son appartement. Et Mohamed Abrini a utilisé ce PC."

Me Poirier : "il est frappant de relever que les sites et les mots clés entrés sont précisément les mêmes que ceux retrouvés sur le portable utilisé par Mohamed Abrini."

Me Poirier : "séparons-nous quelques instants de cet ordinateur. Que vous reste-t-il pour légitimer un quelconque intérêt [pour les thèses djihadistes, ndlr] de sa part ? Aucune conversation pertinente."

Me Poirier : "du vide pour cet homme dont l'employeur attestait en procédure qu'avec Abdellah Chouaa, il n'y a rien à voir. Il est dérangeant cet accusé qui n'a aucun intérêt pour ces thèses [djihadistes, ndlr]. On a créé des hypothèses, vous mettre fin à ces lubies."

Me Poirier : "cet homme est innocent. Cet homme ne s'est jamais inscrit en connaissance de cause dans un objectif terroriste"

Me Adrien Sorrentino s'avance à son tour pour la défense d'Abdellah Chouaa : "malheureux celui qui n'a pas vu, pas su, rien compris et qui se retrouve ici. Dédaigneux ceux qui n'ont rien fait."

Me Sorrentino : "moi aussi, je vous parle très franchement, j'ai été étonné, pour celui qui se clamait innocent, de l'impossibilité manifeste d'aborder les indices judiciaires qui étaient contre lui."

Me Sorrentino : "maintenant que j'ai assisté Abdellah Chouaa, je sais avec certitude que ses maladresses sont à mettre non pas sur le terrain de la suspicion mais sur les incompréhensions d'un homme innocent."

Me Sorrentino : "je suis parfaitement sensible du fait qu'un homme innocent, originellement accusé du pire que l'histoire judiciaire française ait connu, puisse être tétanisé par l'enjeu."

Me Sorrentino : "Lui qui sera interrogé 14 fois par les juges, dans 2systèmes différents, risquant à chacune de ses réponses la réincarcération. Vous devez pouvoir admettre qu'Abdellah Chouaa est tétanisé par l'enjeu et, qu'à chacune de ses réponses, il est un peu plus mauvais."

Me Sorrentino : "on demande à monsieur Chouaa de se justifier devant l'impossible. Le 16 octobre, que faisiez-vous en allant à Charleroi, à 19h18 ? Et le 6 juillet, par quel itinéraire alliez-vous à Paris ?"

Me Sorrentino : "monsieur Chouaa lorsqu'il s'avance à cette barre, il est tétanisé. Sachez que le week-end qui a précédé son interrogatoire, il a été hospitalisé en Belgique pour une crise de panique. On ne l'a pas dit car il me l'a interdit, il ne s'agissait pas de se plaindre."

Me Sorrentino : "Abdellah Chouaa n'est pas un accusé comme ses autres, c'est le repère orthonormé du parquet. On loue la parole de monsieur Chouaa, mais on la conteste, à point nommé, pour mieux requérir."

Me Sorrentino : "s'il est un fait pour lequel j'engage ma conviction d'avocat, ma probité, devant cette salle pleine, c'est qu'Adbdellah Chouaa ne ment pas. Et je vais le prouver. Déjà, il est imparfait dans ses réponses. Il est parfois mauvais. Mais il ne ment pas."

Me Sorrentino : "vous demeurez des magistrats libres. Et je crois que c'est précisément parce que vous jugez des faits horribles, cet votre arrêt qui définira l'intention de l'association de malfaiteurs terroristes dans ce dossier. C'est votre décision."

Me Sorrentino : "car si vous condamnez Abdellah Chouaa vous direz qu'il est un terroriste, vous direz au monde entier qu'il est un rouage au massacre ignominieux qui a eu lieu."

Me Sorrentino : "quel est le but de l'association de malfaiteurs terroriste ? Soumettre à la terreur au nom d'une hégémonie radicale Abdellah Chouaa a adhéré à l'idée de soumettre les gens ? Abdellah Chouaa? "

Me Sorrentino : "l'amitié qui existe entre Mohamed Abrini et Abdellah Chouaa est reconnue et réelle depuis plusieurs années. Ils partagent le goût du casino, les filles ..."

Me Sorrentino : "Abdellah Chouaa a toujours indiqué, de manière constante, qu'il avait constaté que depuis le décès de son frère Souleimane, Mohamed Abrini était devenu plus pratiquant, plus réservé, plus triste."

Me Sorrentino : "Abdellah Chouaa n'a jamais constaté la moindre radicalité dans le comportement de Mohamed Abrini, ni une quelconque adhésion. A l'inverse, il avait, plus en amont, constaté exactement l'inverse."

Me Sorrentino : " Mohamed Abrini c'est l'homme qui à cette barre peut admettre qu'il était un candidat potentiel à la ceinture explosive le soir des attentats et dans le même temps n'est pas capable de reconnaître que ces propos s'apparentent à l'islam radical."

Me Sorrentino : "c'est l'homme qui était prêt à se faire sauter et dans le même temps signer le bail d'une location. C'est un homme à la personnalité double, limite bipolaire. C'est l'homme qui, à sa sortie de prison, va reprendre les mêmes mondanités qu'avant, aller au casino."

Me Sorrentino : "je comprends que les enquêteurs n'aient pas voulu révéler ce qu'était l'"homme au chapeau" [Mohamed Abrini, ndlr] à l'automne 2015 : un guignol dans une fête foraine. Mais c'est ce qu'a vu Abdellah Chouaa."

Me Sorrentino : "en plus de lui cacher la vérité, on va utiliser Abdellah Chouaa. Parce que c'est l'homme à qui on peut tout demander. Celui qui est plus vieux, inséré, père de famille, sérieux. Il est un gage parfait. Un gage d'innocence."

Me Sorrentino : "ce n'est pas l'homme de confiance d'Abrini comme on vous l'a dit, mais l'homme de confiance de l'institution judiciaire."

Me Sorrentino : "Abrini choisit Chouaa pour le conduire à Zaventem, non pas seulement parce qu'il dispose d'une voiture, mais parce qu'il travaille à l'aéroport et est accrédité zone aéroportuaire. Tout était bien orchestré."

Me Sorrentino : "je comprends monsieur Abrini que vous ayez répété tant de fois au cours de cette audience qu'Abdellah Chouaa n'avait rien à voir avec ce dossier. Je pense que vous auriez pu en dire beaucoup plus. Vous auriez du en dire beaucoup plus."

Me Sorrentino : " Et puis Abrini va présenter ses billets à Abdellah Chouaa : aller et retour en Turquie. Donc, au moment du départ, Abdellah Chouaa n'a aucune idée qu'en réalité, il va partir en Syrie."

Me Sorrentino : "quand Abdellah Chouaa reçoit appels de Mohamed Abrini depuis des numéros Boutan, Russie ... il n'y a pas marqué Syrie, hein. Il ne travaille pas à la SDAT, donc il ne percute pas tout de suite. Et de toute façon, il ne va pas répondre à ces appels."

Me Sorrentino : "donc Abdellah Chouaa n'a jamais su que son ami Mohamed Abrini partait en Syrie."

Me Sorrentino : "et si Abdellah accepte d'aller à Paris pour rechercher son ami, c'est d'une part parce qu'il est extrêmement soulagé que son ami revienne sain et sauf. Et d'autres part qu'il n'est pas sûr qu'il ait traversé la frontière pour aller en Syrie."

"... et Abrini va lui envoyer des photos où il est en Angleterre, aux côtés de deux Ironman. J'ai appris, monsieur le président, que c'étaient des superhéros", plaide Me Sorrentino en montrant une photo de Mohamed Abrini entouré de personnes déguisées.

Me Sorrentino : "Mohamed Abrini est tout simplement très fort. Il a dupé son monde. "

Me Sorrentino : "dans la voiture Mohamed Abrini va continuer à le convaincre en lui montrant des photos des stades, en lui parlant de poker, en lui montrant l'argent gagné. Donc Chouaa a retrouvé, non pas le terroriste qu'il aurait dû voir mais le Mohamed qu'il a toujours connu."

Me Sorrentino dénonce "une étude Mappy, à la dernière minute", faite par le parquet à l'audience. "Et vous vous êtes trompés. Ce n'est pas 75 minutes, mais 75 km. Ce n'est pas tant la Clio qui a manqué de vigueur ce jour là, monsieur l'avocat général, mais votre étude des faits."

Me Sorrentino : "la téléphonie de monsieur Abdellah Chouaa est singulière parce que c'est celui qui dans ce dossier ne change pas de numéro tous les jours. Il n'en a qu'un."

Me Sorrentino : "il est indiqué qu'Abdellah Chouaa, en dépit de ces dénégations, était à l'origine d'un mandat Western Union envoyé à Mohamed Abrini le 25 juin 2015. Comment Abdellah Chouaa aurait pu faire ce mandat avec une carte d'identité qui n'est pas la sienne ?"

Me Sorrentino : "et autre élément, sur le plan probatoire, le document de ce virement n'est pas au dossier. On n'a rien. On ne pourra donc jamais vérifier la signature, les éléments de dactylographie. Rien."

Me Sorrentino : "il ressort de tout ce que j'ai développé qu'Abdellah Chouaa ne savait pas que son ami allait en Syrie, qu'il est allé le chercher après avoir été trompé par ce dernier, qu'il n'est pas à l'origine du mandat du 25 juin."

Me Sorrentino : "Et avec rappel que le doute profite toujours à l'accusé, surtout dans un procès comme celui-ci, vous acquitterez Abdellah Chouaa. Vous l'acquitterez comme ultime barrage contre l'injustice."

Me Sorrentino : "Abdellah Chouaa a dénoncé Mohamed Abrini le 25 juillet 2015. L'ensemble des éléments est alors à la disposition des enquêteurs. Les éléments fournis ne sont pas exploités."

Me Sorrentino : "le 7 octobre 2015, un magistrat instructeur va avoir sur son bureau la dénonciation d'Abdellah Chouaa. Ce juge d'instruction, c'est Mme Isabelle Panou. Elle va va demander une enquête. Et les enquêteurs vont voir deux appels en Syrie de Mohamed Abrini"

Me Sorrentino : "en juin 2015, quand Abdellah Chouaa dénonce son ami, Mohamed Abrini, cela donne lieu à une enquête, qui aurait pu permettre, dès octobre 2015 de remonter directement à la cellule terroriste avant les attentats."

Me Sorrentino : "donc on voudrait condamner un homme qui aurait permis, peut-être de remonter la cellule. Si lui vous le condamnez, le terrorisme aura encore une fois gagné. C'est inacceptable, incompréhensible. Et moi même j'en dors pas."

Me Sorrentino : "on vous demande de condamner un ennemi du terrorisme. On aura bâti autour de lui une série d'hypothèses. Vous le condamneriez sur du vide, du vent, du néant. Et ce ne serait pas digne de la justice française."

Me Sorrentino : "madame l'avocat général, vous nous avez fait vivre un ascenseur émotionnel abominable."

Me Sorrentino : "si injuste que vous réquisitions sont devenues totalement incompréhensibles. Si bien que mon client m'a tendu un papier, pendant vos réquisitions : "s'il vous plait, dites-moi, j'ai rien compris"."

Me Sorrentino : "c'est un être humain enchaîné depuis six ans qui attend que vous le libériez. Chaque jour entrant dans cette salle, la peur au ventre, en espérant que son nom de soit pas mêlé à ceux qui prônent l'infamie."

Me Sorrentino : "priant pour que son fils Kassim ne le reconnaisse pas à la télévision le soir. Dix mois à communier avec la douleur des victimes, à les saluer le midi, à se recueillir avec certaines devant le Bataclan et les terrasses canardées."

Me Sorrentino : "pour qu'on vienne vous dire qu'il n'a pas pris de recul ! Au seul motif qu'il n'a pas avoué. Alors je défends un homme qui balbutie, qui s'exprime mal mais qui n'a jamais varié sur une chose : il est innocent."

Fin des plaidoiries pour la défense d'Abdellah Chouaa. L'audience est suspendue avant les plaidoiries des avocats de Mohamed Amri.

L'audience reprend. C'est au tour de Me Negar Haeri de plaider pour la défense de Mohamed Amri. "Il y a une série d'interrogations qui viennent assez naturellement en tête quand on étudie la situation de Mohamed Amri. Et toutes relèvent de la question de la perception."

Me Haeri : "juger non plus seulement un homme mais juger son jugement, soit un jugement au carré, cela en fait des responsabilités. Et je ne parle là que de celui qui perçoit. Que dire alors de l'objet de la perception ?"

Me Haeri : "pour vous sanctionner d'avoir franchi un périmètre interdit, il vous faut d'abord avoir perçu le dessin au sol de ce périmètre"

Me Haeri : "Et puis, et c'est mon principal désaccord avec le parquet, connaissance et volonté ne se confondent pas. Ce n'est pas parce que le sol est perçu dans son exactitude que vous allez nécessairement vouloir franchir le périmètre interdit."

Me Haeri : "sinon en en arrive à la situation absurde où un homme qui a fourni une simple bouteille d'eau, à un ami dont il sait qu'il est radicalisé, encourt aujourd'hui 30 ans de réclusion si le dit ami décide de se servir de cette bouteille d'eau pour fabriquer une bombe"

Me Haeri : "or, à supposer la connaissance par Mohamed Amri de la radicalisation des frères Abdeslam acquise, il faut encoure prouver que l'acte matériel, en l'occurrence parfaitement neutre, ait été fourni en connaissance de l'acte matériel dommageable."

Me Haeri : "je rappelle qu'on parle de cinq transports et une location d'un BM 320. Mohamed Amri n'a pas connaissance de l'adhésion des frères Abdeslam à l'idéologie islamiste."

Me Haeri : "quand bien même cette connaissance serait acquise, il n'a pas connaissance de leur volonté de passage à l'acte violent. Quand bien même cette double connaissance serait acquise, il n'a pas de volonté d'adhérer".

Me Haeri : "plus on s'enfonce dans la religion, plus on est inflexible sur les règles. Le radicalisé n'admet aucune mesure. Et lorsqu'au contraire, vous avez devant vous une personne qui commet ces comportements interdits, vous l'excluez nécessairement de la sphère radicale."

Me Haeri : "c'est un syllogisme que commet Mohamed Amri : "si celui-ci boit, fume, alors il ne peut être radicalisé. C'est un syllogisme qu'on voit chez tous ceux qui fréquentent Brahim Abdeslam."

Me Haeri : "le 16 février 2015, la police locale auditionne Brahim Abdeslam. Il dit :"je n'ai plus d'idées radicales, d'ailleurs je fume du shit tous les jours". Toujours ce lien de causalité."

Me Haeri : "aucun des enquêteurs ne détecte l'ambivalence de Brahim Abdeslam : le shit, les filles, l'alcool sont des éléments qui rassurent. Et ils ont rassurés. Il y a un classement sans suite qui est rendu."

Me Haeri : "ces enquêteurs sont professionnels, ils ont une distance, leur métier est de flairer le terrorisme. Ils ont une connaissance de la taqqya, une expertise que Mohamed Amri n'avait pas".

Me Haeri : "tant que vous n'avez pas connaissance que quelque chose existe, votre oeil n'est pas acéré pour le voir."

Me Haeri : "sauf basculement radical, la seule manière de voir l'évolution chez des proches c'est d'en prendre une distance. C'est seulement quand vous les quittez que vous pouvez percevoir qu'il y a eu évolution."

Me Haeri : "là où Mohamed Amri est encore moins condamnable qe les enquêteurs c'est que ceux-ci ont entendu Brahim Abdeslam se défendre d'être radicalisé par des mots."

Me Haeri : "Mohamed Amri, lui, et tous ceux qui se sont fait bernés l'ont vu se défendre d'être radicalisé par des comportements. Ils ne l'ont pas seulement entendu dire qu'il aimait la vie. Ils l'ont vu jouir de la vie et ont joui de la vie avec lui."

Me Haeri : "alors les vidéos [djihadistes visionnées dans le café des Béguines, ndlr] ne pouvaient pas, à elles seules, faire percevoir à Mohamed Amri le risque de ce qui se préparait."

Me Haeri : "Les Béguines, c'est un café qui est demeuré un café. Un café shiteux. Tout le monde y voyait Brahim Abdeslam regarder des vidéos [djihadistes, ndlr]. Mais tout le monde lui apportait la contradiction. Or, le radicalisé ne supporte pas la contradiction."

Me Haeri : "la contradiction est un élément essentiel. On vous demande à de juger la perception de Mohamed Amri qui voit un type seul, personne ne croit ce qu'il dit et tous lui apporte la contradiction."

Me Haeri : "c'était un café où on regardait des vidéos dégueulasses, mais une seule personne dont on doutait même de la crédibilité. C'est ça la réalité et la perception que pouvait avoir Mohamed Amri de ce qui se tramait."

Me Haeri : "Mohamed Amri n'a pas pu comprendre qu'en rendant des services à Salah Abdeslam puis à Brahim Abdeslam, il ne s'adressait ni à l'un, ni à l'autre comme de simples potes mais à de futurs membres d'une entente terroriste".

Me Haeri : "pour prendre l'exemple de l'affaire Merah, on ne peut pas ignorer qu'en donnant une arme, la personne à qui on la confie risque de donner la mort, c'est inscrit dans l'arme. Une arme c'est un acte préparatoire par nature."

Me Haeri : "nul besoin de connaître avec précision le projet final. Si on n'a pas la certitude que la mort sera donnée, on a la certitude d'un risque de mort. Pour Mohamed Amri, est-ce qu'en louant une BMW 320, il avait la certitude de faire prendre le risque ?"

Me Haeri : "comment voulez-vous qu'Amri ait pu pressentir qu'il se tramait quelque chose? Quand on demande à tous ceux qui sont au café d'aller louer des voitures ?"

Me Haeri : "Madame l'avocate générale a prononcé une phrase que Mohamed Amri attendait depuis six ans : "il est fort probable que Mohamed Amri aurait refusé s'il avait su". Elle est incroyable cette phrase. Mais elle me pose un problème juridiquement."

Me Haeri : "cela signifie que le sort pénal d'Amri n'a reposé que sur le choix d'un autre : d'utiliser, derrière son dos, ces voitures à des fins matérielles. Mohamed Amri est instrumentalisé."

Me Haeri : "et si les frères Abdeslam n'avait pas utilisé les voitures finalement. Amri aurait-il été dans le box ?"

Me Haeri : "les actes matériels qu'Amri a commis sont dans la continuité de toutes les habitudes qu'il a déjà. Mohamed Amri voyage tellement qu'il ne les compte pas."

Me Haeri : "il y a quelqu'un qui mieux que quiconque le danger quand on tente de farfouiller dans la tête de quelqu'un, c'est Victor Hugo" Elle cite alors un extrait des Misérables.

Me Haeri : Le lecteur a sans doute deviné que M. Madeleine n’est autre que Jean Valjean. "Nous avons déjà regardé dans les profondeurs de cette conscience ; le moment est venu d’y regarder encore. Nous ne le faisons pas sans émotion et sans tremblement."

Place à Me Xavier Nogueras, dernière plaidoirie de la journée : "je vais être bref. La première raison c'est que juste avant, j'ai été voir Mohamed Amri, qui m'a dit : "faut arrêter de stresser Xavier, quoi qu'il arrive, je serai fier de toi".

Me Nogueras : "la deuxième raison c'est que, devant une cour d'assises spécialement composée, on est démasqués, vous savez ce qu'on va plaider. Mes confrères l'ont fait avant, avec brio. Et je vais essayer de le faire un peu différemment"

Me Nogueras : "je plaide pour la cour, mais aussi pour vous, les avocats généraux. Parce que depuis dix ans que je fais cela, les juges changent, mais vous vous êtes là. Et il nous faut nous respecter."

Me Nogueras : "et je voudrais avoir quelques mots à l'égard de toutes les victimes qui sont venues à la barre. Et je pense aussi beaucoup à toutes ces personnes qui sont sur ces bancs et ont partagé ces neuf mois d'épreuve."

Me Nogueras : "et parce que eux aussi essuie régulièrement les mêmes questions dans leurs foyers, leurs amis, leurs familles : comment faites-vous pour défendre ces gens ? C'est la question éternelle"

Me Nogueras : "il faut que nous agissions et parlons avec beaucoup de recul, d'humilité et c'est ce que je vais essayer de faire, même si vous savez un peu de quoi je vais vous parler."

Me Nogueras : "cette matière est en mouvement, elle évolue. Et je suis un peu le témoin de cette décennie de djihadisme. On n'avait pas du tout la même manière de circonscrire cette infraction, on a évolué. Et nous avons grandi ensemble."

Me Nogueras : "vous êtes des juges libres et souverains et parfois on n'est pas là pour faire entrer des triangles dans des carrés. Et quels que soient les positionnements, vous avez la liberté de décider si Mohamed Amri avait la connaissance du but terroriste poursuivi"

Me Nogueras : "admettons que Mohamed Amri ait été en capacité de lire la loi ou comprendre les contours de la jurisprudence, il n'aurait pas été en mesure de la saisir puisqu'elle est postérieure aux actes."

Me Nogueras : "Mohamed Amri c'est le shit, Jul, Kamikaz, "Moi moche et méchant". Et de l'autre côté nous avons la désubjectivisation de la circonstance aggravante. On a nécessairement le droit de venir vous dire qu'il y a une fracture. Y a-t-il une compréhension mutuelle ?"

Me Nogueras : "l'autre élément c'est le cloisonnement. Nous sommes début janvier 2015 et une série d'attentats terribles va commencer et nous devons les analyser pour comprendre les changements opérationnels".

Me Nogueras : "au sein de l'Etat islamique, il y a un changement opérationnel. Et je ne peux pas ne pas imaginer qu'à ce moment là, Brahim Abdeslam, à son retour de Syrie, n'ait pas été mis en garde sur ce qu'il fallait faire et ne pas faire."

Me Nogueras : "il sait qu'il ne doit pas se faire prendre pour éviter les échecs. Et ça nécessairement un effet sur son comportement auprès des gens qui l'entourent. Brahim Abdeslam avait une responsabilité."

Me Nogueras : "la dernière grosse réflexion c'est la réflexion sur la complaisance. Il y a quelque chose qui m'effraie un peu qui est de l'ordre de la stigmatisation. C'est une sous-division de l'adhésion idéologique. On n'adhère pas, mais on peut soutenir. Moi, j'ai du mal."

Me Nogueras : "comment quelqu'un qui n'adhère pas peut soutenir par complaisance? J'ai du mal à trouver un exemple qui tienne. Parce que le complaisant a quand même une véritable difficulté avec l'acte terroriste."

Me Nogueras : "vous regardez les fadets de son téléphone portable. Et vous regarderez les moments de pause : cela montre qu'entre le 11 et le 14 novembre 2015 il a si peu dormi. Si peu dormi. Cela montre son état de fatigue."

Me Nogueras : "Mohamed Amri vient alors de commencer son travail. Et vous n'oublierez pas ce que c'est que les maraudes, de tendre la main, d'aller donner à manger dans la rue. Cette humanité annule toute volonté mortifère."

Me Nogueras : "vous devez mettre la personnalité de Mohamed Amri, cette abnégation au travail avec cette complaisance dont on vient vous parler."

Me Nogueras : "et donc Mohamed Amri n'a pas dormi, il est défoncé. Et il voit un Salah Abdeslam qu'il n'a pas connu : stressé, énervé. Je peux comprendre que Mohamed Amri n'ait pas eu les mots, tout de suite, pour exprimer ce qu'il a ressenti dans cette voiture."

Me Nogueras : "lorsque Mohamed Amri va apprendre que Salah Abdeslam a été sur ce théâtre là, on peut comprendre que l'état de sidération ait pu exister."

Me Nogueras : "on n'a pas besoin d'avoir un gilet pare-balle ou une arme sur la tempe pour être terrorisé. Il y a un climat de peur dans ce huis-clos de carlingue. On est dans un huis-clos terrifiant qui crée entre les jeunes Molenbeekois et Salah Abdeslam une emprise."

Me Nogueras : "si il réalise, dans ce Very bad trip qu'il n'avait absolument pas anticipé, qu'une fois que la voiture démarre, il y a soit l'arrestation, soit la mort. Alors je peux comprendre qu'on soit tétanisé."

Me Nogueras : "ça n'est pas la complaisance qui a animé Mohamed Amri sur le chemin du retour. Et puis, il y a la scène au barrage, il est en surtension. Mais les policiers vont sentir le shit et ils vont les laisser partir."

Me Nogueras : "quand ils arrivent en Belgique, il abandonne quoi Mohamed Amri ? Il abandonne ce qu'il adore. Il adore cette voiture, son bijou. Et il vous dit : "je l'abandonne parce que mon seul objectif c'est de m'éloigner de lui". Il montre Salah Abdeslam dans le box.

Me Nogueras : "j'ai envie de terminer en vous parlant d'amour. On a la chance d'avoir sur les bancs de la défense quelqu'un qui s'appelle Issa [Gultaslar, ndlr]. Il est venu parler d'amour, dire qu'il fallait s'aimer, tout simplement. Moi j'ai beaucoup d'amour dans l'humanité".

Me Nogueras : "cet amour crée des ponts entre les uns et les autres. Et c'est avec cet amour de l'humanité que je vous demande de réfléchir à l'avenir de Mohamed Amri. Et je vous demande aussi de penser à l'acquitter. Pensez-y".

Fin de la plaidoirie de Me Xavier Nogueras et de cette journée de plaidoiries de la défense. Reprise demain à 12h30.

Jour 140 – Mercredi 15 juin – Suite des plaidoiries des avocats de la défense

Bonjour à tous en ce 140e jour d'audience au procès des attentats du 13 Novembre 2015 Suite des plaidoiries de la défense pour les accusés Muhammad Usman et Adel Haddadi.

L'audience reprend. Me Karim Laouafi est le premier à s'avancer pour la défense de Muhammad Usman : "je me suis complètement planté. On s'est planté parce qu'on a cru que la longueur de cette audience, de ces débats ...."

Me Laouafi : "on a cru que le temps consacré à Muhammad Usman, à savoir 5 heures à tout casser, à l'exception de ses problèmes médicaux, que le temps consacré par le ministère public dans ses réquisitions, à savoir 10 minutes tout au plus ..."

Me Laouafi : "... on a cru que tout cela conduirait le ministère public à de pas requérir le maximum encouru. Ces réquisitions sont insignifiantes. C'est quoi, on requiert 20 ans parce que la loi ne permet pas de requérir 30 ans ? C'est ça maintenant ?"

Me Laouafi : "alors, on nous sort une vidéo comme preuve de guerre, une vidéo en langue arabe, sous-titrée en russe. Et à quelle date à été enregistrée cette vidéo ? Est-ce que le support a été altéré ? On ne sait pas. Ça pose quand même un problème."

Me Laouafi : "je ne dis pas que c'est un big fake, un montage orchestré par le Pnat et le FBI. Mais je dis que dans un procès pénal, on ne peut pas se contenter de ça."

Me Laouafi brandit une capture d'écran imprimée de la vidéo en question. "Moi je vois déjà que cet homme à des cheveux, pas Muhammad Usman. Je peux même dire que cet homme a plus de ressemblance avec un des avocats généraux qu'avec Muhammad Usman.

Me Laouafi : "on aurait aimé plus de rigueur dans la preuve mais aussi dans la personnalisation de la peine. C'est vrai que c'est compliqué car pour requérir une peine, il faut connaître la personne contre laquelle on requiert."

Me Laouafi : "ceux qui connaissent le mieux Muhammad Usman, c'est nous [ses avocats, ndlr]. Et même si le ministère n'y croit pas, il y a eu une évolution positive, un avant et un après Muhammad Usman."

Me Laouafi : "Moi, la première fois que j'ai rencontré Muhammad Usman, j'ai été étonné par la dureté de ses traits. Il y a eu un temps d'apprivoisement de part et d'autre. Tout simplement parce qu'on ne venait pas du même monde."

Me Laouafi : "C'est pas un enfant de la France, Muhammad Usman, un fils de l'Occident, quelqu'un qui a eu la chance de grandir avec des valeurs de liberté et d'humanisme."

Me Laouafi : "Muhammad Usman a grandi dans une République islamiste, avec un enseignement religieux qui a pour but de faire naître des sentiments anti-occidentaux. Et vous devez prendre en compte ce conditionnement."

Me Laouafi : "vous devez prendre en compte cette situation et considérer que le départ de Muhammad Usman vers la Syrie relève plus d'un besoin de rejoindre l"oumma" [la communauté des musulmans, ndlr]"

Me Laouafi : "si Muhammad Usman a encore des difficultés à expliquer certaines choses, depuis le début de la procédure, il a toujours cherché à s'expliquer. Ce fait là, vous devez le prendre en compte : le fait qu'un accusé ait une parole, non plus idéologique mais explicative"

Me Laouafi : "et ce que je trouve assez remarquable c'est que c'est l'humanité de notre système qui le fait adhérer : parce que le juge lui a permis d'appeler sa famille, qu'il a pu consulter un médecin. Il a vu dans notre système de l'humanité."

Me Laouafi : "on a entendu le ministère public dire que ce procès a permis de penser. Je peux vous dire que depuis six ans, Muhammad Usman pense. Et il a appris pas mal de choses. Déjà, il a appris à sourire. Il a appris à penser par lui-même et même contre lui-même."

Me Laouafi : "Muhammad Usman démontre que la réversibilité des pensées est possible. Quand je vous demande de prendre en compte son évolution, je n'ai pas l'impression de vous demander la lune. Je vous demande simplement l'application ordinaire de nos règles ordinaires"

Edward Huylebrouck poursuit à son tour les plaidoiries pour Muhammad Usman : "vous aurez noté que le 8 septembre, à 12h30, Muhammad Usman est arrivé à l'heure à son procès. Evidemment. Mais un comble pour celui qu'on qualifie de retardataire."

Me Huylebrouck : "mais pour être en retard à un rendez-vous, aussi funeste soit-il, encore faut-il qu'un rendez-vous ait été fixé. Et ce n'est pas le cas de Muhammad Usman. Ce n'est pas un retardataire, c'est l'inattendu."

Me Huylebrouck : "Muhammad Usman, c'est le passager clandestin. Et pour nous, dans le box, il l'est encore. C'est l'oublié du dernier rang. C'est l'accusé qui a été invité pour la dernière fois à prendre la parole le 25 janvier dernier. Il y a une éternité. "

Me Huylebrouck : "il fut un temps où l'audience pénale ne réprimait que les crimes tentés, consommés. Ce n'est plus le cas. Au 19e siècle, Muhammad Usman aurait été hors de cause."

Me Huylebrouck : "désormais, on condamne des actions sans victime, en pariant sur une trajectoire future. IL aurait pu, il aurait du. L'association de malfaiteur c'est la voiture balai de la justice pénale, les lignes rouges d'une justice pénale démocratique."

Me Huylebrouck : "je vais couper court à tout faux suspense : nous n'allons pas plaider l'acquittement. Muhammad Usman a séjourné en Syrie, il y a un destin criminel en France quand bien même il ait demeuré inachevé."

Me Huylebrouck : "l'infraction d'AMT [association de malfaiteurs terroriste, ndlr] est constituée. L'AMT n'est pas monobloc, elle est faite de sédiment. Ce qui est injustifié, c'est qu'on vous réclame le maximum légal."

Me Huylebrouck : "ce qui nous dérange c'est cette thèse lancinante d'un lien qui sera indivisible avec les attentats du 13 Novembre Comment peut-on le dire indissociable d'un événement qui s'est planifié à un moment où il était certain qu'il n'en ferait pas partie?"

Me Huylebrouck : "pendant 9 mois, les enquêteurs ont vécu avec l'idée fixe que les attentats du 13 Novembre avaient été préparés très en amont. Et la presse n'est pas en reste, on n'a cessé de titrer que Muhammad Usman et Adel Haddadi devaient constituer un 4e commando."

Me Huylebrouck : "et la lumière est venue de Schaerbeek avec l'exploitation de l'ordinateur de l'avenue Max Roos où l'on a compris que les cibles ont été déterminées quelques jours à peine avant les faits. "

Me Huylebrouck : "au moment où la date du 13 Novembre est retenu, Muhammad Usman est en pleine mer Egée et il n'y avait aucune chance qu'il soit à Paris le 13 novembre. En réalité, il ne fait pas partie de l'équation."

Me Huylebrouck : "Mais ce qu'on entend c'est : Muhammad Usman aurait dû se faire exploser s'il n'avait pas été arrêté. Ici on ne prédit pas l'avenir, on refait le passé si, si , si , si ... En quelques sorte, Paris est mis en bouteille dans une boule de cristal."

Me Huylebrouck : "l'Etat islamique a joué la carte du réalisme. IL ne s'emballe pas à concevoir des projets irréalistes dont il n'a pas les moyens. Il forme des vœux, puis il définit des projets en fonction des moyens du bord."

Me Huylebrouck : "Au moment où les candidats quittent le territoire syrien pour l'Europe, ni les projeteurs ni les projetés ne savent quand, comment ou contre qui ils vont frapper. Ce flux d'individus projetés à commencer bien avant Muhammad Usman et s'est poursuivi bien après".

Me Huylebrouck : "dans la BD, "La cellule" par  @soren_seelow que l'on a tous lui en plus, ou à la place, de l'ordonnance de mise en accusation, il faut aller dans l'annexe pour trouver le nom de Muhammad Usman, signe que cette histoire peut se raconter sans y faire référence."

Me Huylebrouck : "Il est faux de croire qu'il y avait une attente Muhammad Usman à Bruxelles. A Bruxelles, on attend pas Muhammad Usman comme on attend vainement Madeleine pour prendre le tram 33 et manger des frites chez Eugène"

Me Huylebrouck : "l'AMT c'est la grande zone grise entre la résolution criminelle et le commencement de l'exécution. Entre le moment où on dit oui à Ousama Atar et celui où on a le doigt sur la gâchette, il y a un gouffre : gouffre logistique, psychologique et spatio-temporel."

Me Huylebrouck : "Alors, pour trouver des actes préparatoires, le Pnat fait des tours de passe-passe. D'abord, pour qu'il ait une longue carrière de djihadiste, on vous dit que Muhammad Usman a 41 ans et non 29, sur base d'un ressenti visuel."

Me Huylebrouck : "on vous demande de croire que la date de naissance sur son faux passeport syrien serait la bonne et celle sur sa vraie carte d'identité pakistanaise erronée. "

Me Huylebrouck : "ensuite, tour de passe-passe, on vous demande de retenir une vidéo comme preuve de guerre qui n'en est pas. Vous devrez écarter une preuve qui n'en a que le nom, refuser de retenir des preuves low-cost versées en last-minute"

Me Huylebrouck : "si un ami vous demande : est-ce que tu peux me rendre un service ?" - Oui, bien sûr. S'il vous dit : "est-ce que tu peux m'aider pour mon déménagement samedi matin ?" - Euh, oui."

Me Huylebrouck : "et s'il vous dit : "il faudrait commencer à 6 heures parce que la personne de l'agence vient à 10h pour l'état des lieux ...", alors là, vous allez dire, "samedi matin, je ne suis pas sûr ..." L'hésitation s'invite à mesure qu'elle se précise et vous contraint"

Me Huylebrouck : "Muhammad Usman est influençable. Ça a été sa perte, c'est aussi sa chance. Dans un environnement favorable, il ne fait pas de doute que sa coquille peut s'ouvrir, que la mue va opérer, que la camisole du manichéisme peut se déchirer."

Me Huylebrouck : "nous avons eu, pendant ces dix mois d'audience parfois l'impression que les accusés et les victimes évoluent dans deux mondes différents, deux couloirs étanches."

Me Huylebrouck : "les uns attendent des réponses à toutes leurs questions, les autres sont bousculés par des questions qui les dépassent. Mais les cloisons de ces couloirs ne sont totalement étanches. Et l'humanité vient parfois fendiller la vitre du box. Dans le deux sens."

Me Huylebrouck : "aucun crime n'éteint totalement un homme. et s'agissant de Muhammad Usman, nous sommes convaincu que la lumière aurait pu fendre à temps les ténèbres."

Me Huylebrouck : "le 22 décembre 2017, il écrivait à sa famille : "comme la France est un pays qui protège les droits humains, les assassins n'y sont jamais pendus, il ne risquent que la prison".

Me Huylebrouck : "en France, il a aussi découvert la télévision française. Son programme favori est Quotidien de Yann Barthès. L'apprentissage de l'irrévérence est en cours."

Me Huylebrouck : "ce n'est pas parce que Muhammad Usman a été un membre de l'Etat islamique qu'il est comptable de tous les attentats commis par cette organisation, qu'il est comptable des attentats du 13 Novembre. Cela ne sauve pas sa culpabilité mais le quantum de sa peine."

Me Merabi Murgulia est le dernier à plaider pour Muhammad Usman : "est-ce que dehors c'est comme à la télé ? Ce sont les questions de Muhammad Usman qui a connu les conditions de détention les plus sévères en France."

Me Murgulia plaide sans aucune note sur la condition de détention de Muhammad Usman et son placement à l'isolement pendant trois ans "c'est-à-dire que vous ne voyez personne, une heure de promenade par jour"

Me Murgulia : "l'isolement pour monsieur Usman était double : quand il arrive en France, il ne comprend absolument rien. Comment vous faites pour demander un dentifrice? Il appartient à ce qu'on appelle les "indigents absolus". C'est 5% de la population carcérale en France."

Me Murgulia : "lorsque monsieur Usman a écrit à sa famille, il dit : tout va bien, si j'ai besoin des soins, on me les donne". Mais la réalité c'est que nous avons mis deux ans pour la prise en charge de son œil qui s'est décomposé littéralement."

Me Murgulia : "mais monsieur Usman n'est pas un robot et parfois il craque. Dans un deuxième courrier à sa famille, il écrit "dès fois mon esprit cesse de fonctionner". Quand vous n'avez personne à qui parler, maintenir l'équilibre mental est très difficile."

Me Murgulia : "monsieur Usman avait besoin de contacts pour se situer, grandir. Avec mes confrères, depuis 2016, nous nous sommes relayés. Mais les 50 UV [financement des avocats à l'aide juridictionnelle, ndlr] ce n'était même pas 4 mois de TGV pour 5 ans d'instruction. "

Me Murgulia : "personne ne sort indemne de cette audience. Sur les bancs de la défense, la tristesse inouïe des victimes, nous l'avons bue jusqu'à la lie. Et ce n'est pas la vitre du box qui protège les accusés. On vous demande l'exemplarité, ça ne veut pas dire la sévérité."

L'audience est suspendue avant les plaidoiries pour la défense d'Adel Haddadi.

L'audience reprend avec la plaidoirie de Me Simon Clémenceau pour la défense d'Adel Haddadi : "quelques mots pour vous dire la position singulière d'Adel Haddadi dans ce dossier. On avait peut-être fini par l'oublier, peut-être pas lui, mais sa position : il reconnaît les faits."

Me Clémenceau : "Adel Haddadi a parlé, il n'a peut-être pas dit grand chose mais il a parlé. Il a coopéré dans ce dossier. Son apport aux investigations est majeur. Ses déclarations faites de manière cohérente ont constitué un socle de nombreux affirmation de l'accusation"

Me Clémenceau : "et alors qu'Adel Haddadi a apporté un grand nombre d'éléments, nous avons eu de cesse de l'interroger sur ce dont on ne l'accuse pas. "

Me Clémenceau : "Adel Haddadi vous dit qu'il est parti d'Algérie en février 2015, qu'il a rejoint la zone irako-syrienne, qu'il a accepté la mission d'aller commettre un attentat en France, qu'il a utilisé un faux passeport et qu'il a pu aller jusqu'en Autriche."

Me Clémenceau : "la réalité dans ce dossier c'est qu'Adel Haddadi a éclairé les investigations. Que les déclarations d'Adel Haddadi ont précédé les investigations qui les vérifiaient et qu'il a dont largement contribué à la manifestation de la vérité".

Me Clémenceau : "c'est une démarche qui est la sienne, c'est un chemin et c'est celui d'Adel Haddadi. Aucune des déclarations d'Adel Haddadi n'a été infirmée. En revanche, de très nombreuses déclarations ont été vérifiées et jugées cohérentes."

Me Clémenceau : "je trouve que de ce point de vue là, le ministère public n'est pas allé au bout de sa logique. On nous a parlé d'une reconnaissance a minima. C'est quoi ? C'est lorsqu'on vous présente des preuves et que vous dites : "oui, je reconnais ce que vous pouvez prouver".

Me Clémenceau : "c'est ça une reconnaissance a minima. Mais c'est exactement l'inverse qui s'est produit avec Adel Haddadi. Ce sont ses déclarations qui ont servi de preuve à l'accusation."

Me Clémenceau : "Adel Haddadi a permis l'identification de personnes majeures dans cette procédure, à commencer par Oussama Atar [commanditaire des attentats du 13 Novembre 2015, ndlr]. Le 20 octobre 2016, Adel Haddadi, sur planche photographique, reconnaît Oussama Atar."

Me Clémenceau : "il y a dans le dossier ce qu'on lui reproche mais dont on ne l'accuse pas. Et donc, il y a des hypothèses. Je n'ai aucun problème avec les hypothèses, je trouve cela assez sain. Mais ce que je réprouve c'est quand l'hypothèse est présentée comme une vérité."

Me Clémenceau : "les hypothèses qui sont émises ne peuvent pas servir de conviction. L'hypothèse du fait qu'il aurait été combattant, pour lequel vous n'avez aucune preuve, et dont on ne l'accuse pas, je vous propose tout simplement de l'écarter."

Me Clémenceau : "par sa démarche qui est cohérente, constante, sincère, ce qu'Adel Haddadi veut montrer c'est qu'il peut être autre chose que ce pour quoi vous aller le condamner. C'est un élément majeur d'appréciation de la personnalité, du désengagement, de la peine."

Me Clémenceau : "vous ne pouvez pas passer sous silence le fait qu'Adel Haddadi a contribué à l'identification du cerveau des attentats du 13 Novembre 2015. Nous pensons que la capacité à s'amender, à coopérer, cela change quelque chose."

Me Clémenceau : "vous pouvez décider d'une peine qui soit juste. Jute par rapport aux faits, Juste par rapport à la personnalité. Juste par rapport à la démarche d'Adel Haddadi."

Me Clémenceau : "vous n'écrivez pas l'histoire, vous décidez l'avenir de ces accusés. Leur avenir. C'est ce qui rend l'acte de juger si lourd, si immense, si difficile pour ne pas y ajouter, en plus, le poids de l'Histoire. "

Place à Me Léa Dordilly pour la suite de la défense d'Adel Haddadi : "votre décision sur la culpabilité sera comprise et acceptée."

Me Dordilly : "mais la critique sur la qualification d'association de malfaiteurs terroriste demeure. Et il faut prendre un instant pour se souvenir de nos concessions collectives."

Me Dordilly : "Nous avons consacré une qualification juridique qui contient en soi une violation de nos principes fondamentaux. Et depuis, la justice n'a cessé de ployer. On se montre de moins en moins exigeant en terme de preuve et de plus en plus sévère en terme de peine."

Me Dordilly : "quand on vous requiert la peine maximale pour des faits qu'il aurait pu commettre mais qu'il n'a pas commis, on se base sur une prédiction."

Me Dordilly : "l'aveu, le désaveu, les regrets, la honte, le renoncement devraient être vus comme des petits pas. Vous devez considérer qu'en avouant, en dénonçant, en avouant sa honte, Adel Haddadi s'est affranchi de cet obstacle infranchissable qu'est l'engagement idéologique."

Me Dordilly : "pourquoi est-il parti en Syrie ? Pourquoi a-t-il été choisi pour une telle mission ? Pourquoi l'a-t-il acceptée ? Soyons prudents et gardons-nous de prétendre toujours tout savoir, de transposer des outils analytiques qui ne s'appliquent pas du tout à son parcours"

Me Dordilly : " car peut-être qu'on a une très vague idée de la vie qu'il pouvait mener : célibataire parce qu'on n'a pas les moyens de se marier à près de 30 ans, à vivre à 10 ans dans 40 mètres, dans un contexte de violence parce qu'il y a le quartier aussi ...."

Me Dordilly : "on peut regarder le parcours d'Adel Haddadi comme une succession de fuites où chaque départ compte finalement davantage que la destination."

Me Dordilly : "qu'est-ce que ce jeune homme affable, en léger surpoids, à la vue défaillante, viendrait faire dans un commando de kamikazes en Europe ? C'est déroutant si on s'obstine à dire que l'Etat islamique a exclusivement recruté des soldats issus d'unité d'élite."

Me Dordilly : "mais ça ce sont des choses que l'on présume, que l'on projette à posteriori au regard de l'horreur du résultat."

Me Dordilly : "certes l'Etat islamique a appris de ses erreurs et de ses ratés mais il a continué d'en commettre et on en a d'ailleurs plusieurs exemples dans le box. "

Me Dordilly : "peut-être qu'il faut accepter qu'Adel Haddadi ne soit pas à la hauteur des crimes que vous jugez et qu'il n'a pas non plus été à la hauteur de la mission qui lui a été confiée. Cette mission, il a d'ailleurs été aussi incapable de la refuser que de la remplir."

Me Dordilly : "dans toute volonté, il y a une pluralité de sentiment : le sentiment de l'état dont on veut sortir, celui vers lequel on tend et la direction elle-même. Vouloir, c'est commander en soit à quelque chose qui obéit. Et en Adel Haddadi, il y a quelque chose qui obéit."

Me Dordilly : "invoquer le hasard, comme le fait Adel Haddadi, ce n'est pas risible. C'est admettre que l'on a renoncé à agir sur le cours des choses."

Me Dordilly : " le ressort de l'agir chez Adel Haddadi c'est une faible de caractère, pas une détermination sans faille. On peut l'admettre. L'admettre c'est simplement le comprendre."

Me Dordilly : "Adel Haddadi fait quoi depuis six ans, sinon à faire des petits pas, patiemment, sur le chemin de retour vers vous ? Que peut-il faire d’autre ?"

Me Dordilly : "après la vague de témoignages qui ont tout emporté et nous ont tous dévastés, , j'ai eu un moment de vacillement. Je me suis demandé si je pouvais venir vous amener des évaluations de son stade pour dire que tout s'était bien passé. Mais évidemment que ça compte"

Me Dordilly : "je n'en veux pas du tout au parquet de ne pas s'être passionné pour le parcours d'Adel Haddadi. Mais ce qu'on ne peut pas comprendre, c'est votre indifférence, à vous. Et c'est ce qui nous effraie : est-ce qu'au-delà d'un certain point, tout est indifférent ?"

Me Dordilly : "dire le droit et la justice c'est pas seulement punir. Ce n'est pas vrai. C'est nuancer, moduler, adapter. C'est soupeser la peine. C'est prendre le temps qu'Adel Haddadi mérite, prendre en compte ses efforts."

Me Dordilly : "je vous demanderai donc simplement de faire comme d'habitude". Fin des plaidoiries et de cette 140e journée d'audience.

Jour 141 – Jeudi 16 juin – Suite des plaidoiries des avocats de la défense

Jour 141 au procès des attentats du 13 Novembre Suite des plaidoiries de la défense. Ce matin, portrait@franceinter de l'une des robes noires remarquées, durant ces neuf mois, sur les bancs de la défense : Me @NegarHaeri

Hier, ce sont Mes Karim Laouafi, Edward Huylebrouck, Merabi Murgulia qui ont plaidé pour l'accusé Muhammad Usman, et Simon Clemenceau et Léa Dordilly pour l'accusé Adel Haddadi. Que des plaidoiries brillantes.

L'audience reprend. Me Fanny Vial s'avance la première la barre, pour la défense de l'accusé Kharkhach.

Me Vial commence d'une petite voix douce. Elle lit des lettres de Farid Kharkhach, datant de janvier 2017. "Pour moi, c’est vraiment triste ce qu’il se passe". Puis, "je trouve que c'est dégueulasse ce qu'ils ont fait"

Me Vial lit d'autres lettres de l'homme qu'elle défend : "Je déteste ces gens-là, je ne veux pas être jugé pour participation aux activités d'un groupe terroriste"

Farid Kharkhach est jugé pour avoir fourni certains faux papiers à la cellule terroriste du #13Novembre Ce qu'il a reconnu. Mais il a toujours dit qu'il ne savait pas que c'était une cellule qui projetait des attentats. Donc, il ne connaissait pas l'intention. Donc pas d'AMT ?

AMT pour association de malfaiteurs terroriste. C'est toute la question pour ceux qui sont jugés pour avoir participé à cette association. Que savaient-ils vraiment ? Plusieurs avocats ont plaidé déjà la connaissance de cette AMT pour plusieurs accusés.

Me Vial estime que "c"est un costume trop grand" pour Farid Kharkhach que veut lui faire porter l'accusation.

Dans ses lettres, Farid Kharkhach avait aussi écrit : "J’ai un coeur. Ils me prennent qqn de dangereux et ça me détruit". Ou encore "les terroristes, c’est eux qui nous ont mis dans la merde".

Me Fanny Vial cite encore son client, lettre de 2018 : "Si j’avais su je n’aurais pas aidé ce Satan"

Me Fanny Vial : "Nous avons l’honneur de plaider l’acquittement pour Monsieur Farid Kharkhach, qui aura 40 ans le 2 juillet prochain, père de deux enfants de 7 et 12 ans".

Elles sont trois avocates pour défendre Farid Kharkhach : Mes Fanny Vial, Marie Lefrancq, Louise Dumont Saint Priest.

Me Vial : "Toutes les victimes qui ont témoigné nous marqueront. Il y aura un avant et un après procès . Mais nous allons vous démontrer qu'il faut accuser Monsieur Farid Kharkhach" de l'AMT.

Me Marie Lefrancq prend le relais à la barre : "Ce n'est pas simple de devoir plaider pour M. Kharkhach. Il y a une solennité qui écrase. Cette plaidoirie un moment qu'on attend, mais vertigineux, il faut être à la hauteur".

Me Marie Lefrancq : "Il ne s'agira à aucun moment de tracer un parallèle entre un accusé et des victimes, ce serait obscène. Mais mettre en évidence les traits de caractère propre d'un homme."

Me Marie Lefrancq : "A aucun moment, cette entreprise comme un stratagème. Se mettre à hauteur d'homme, c'est l'exigence absolue qui va vous permettre à vous de bien juger"

Me Marie Lefrancq : "La justice est rendue par des hommes pour des hommes". Elle plaide l'individualisation de la peine.

Me Marie Lefrancq note que "très peu de temps a été accordé à chacun des accusés. Et on a passé sous silence la singularité de chaque accusé". C'est vrai que sur neuf mois, le temps de parole des accusés n'a pas été très long.

Me Marie Lefrancq cite l'écrivain Antonin Artaud : "Pourtant, il ne faut pas se hâter de juger les hommes".

Me Marie Lefrancq : "En 2015, Farid Kharkhach c'est un père de famille, qui couvre son fils de cadeaux, un papa gâteau, qui se déguise pour faire rire son fils aux anniversaires"

Me Marie Lefrancq : "C’est un gentil, Farid Kharkhach. En 2015, il fume il boit de l’alcool, il vit à l’occidentale. Il a inscrit son fils dans une école catholique".

Me Marie Lefrancq plaide que "Farid Kharkhach a peur de tout, même regarder le journal télévisé". Donc, il n'aurait pas pu vouloir participer aux attentats, sous-entend-elle.

L'accusation qui a requis 6 ans de prison contre lui estime qu'il a participé par "cupidité". Faux papiers pour 300 euros, dit l'avocate. Somme dérisoire pour elle.

Me Lefrancq plaide les TOC de Farid Kharkhach, qui donc a peur de tout : "C'est quelqu'un qui très souvent passe la lingette sur la vitre du box", dit-elle.

Farid Kharkhach qui est cet accusé à la coiffure atypique, cheveux rasés sur le côté, mini-chignon sur le dessus. Il avait expliqué à l'audience que c'était pour "cacher une pelade", due à son stress.

Farid Kharkhach est aussi l'accusé pour qui ses avocats ont plaidé une demande de mise en liberté pendant le procès, en mettant en avant ses phobies. Phobies des insectes nuisibles dans sa cellule de prison.

Des avocats avaient d'ailleurs fait verser au dossier une petite bête sous scellé.

Me Lefrancq plaide que Farid Kharkhach n'était pas radicalisé. Elle cite un rapport du quartier d'évaluation de la radicalisation, en prison. Rapport : "une personne très angoissée et qui se dégoûte".

Elle explique qu'au QER, Farid Kharkhach a participé aux ateliers "sophrologie et Téléthon".

Me Lefrancq rappelle que Farid Kharkhach est l'accusé qui a fait un malaise dans son box le premier jour. Quelques jours plus tard, il trouve ça dur de comparaître dans ce box et refuse d'être extrait, puis arrive en pyjama. "Je pense que personne ne l'a vu mais ça l'a embêté".

Me Lefrancq rappelle que Farid Kharkhach est le premier accusé qui s'est ensuite levé de lui-même dans son box, entendant des parties civiles témoigner, deux garçons qui avaient perdu leur père. Farid Kharkhach a alors clamé comme un cri du coeur : "Mon coeur saigne".

Me Marie Lefrancq plaide d'une petite voix minuscule. Si bien que malgré le micro, on a du mal à entendre certains mots dans sa plaidoirie, très très lente.

Après une courte suspension, l'audience va reprendre.

Et c'est Me Fanny Vial qui se lève à nouveau. Cette fois, elle ne s'avance pas à la barre. Elle reste à sa place, debout au micro, le box dans son dos : "Quand les attentats se sont produits, tout le monde a été dans un état de sidération".

Me Fanny Vial : "Le volet des faux papiers c'est quelque chose qui a pu apparaître périphérique, au vu du contexte. Ce n'est pas pour critiquer les policiers".

Me Fanny Vial : "Parfois c'est la chance qui nous font remonter sur une filière. C'est ce qui s'est passé avec les enquêteurs belges pour Farid Kharkhach".

Me Vial parle du réseau Catalogue. "Quand ce réseau est démantelé, plus de 2000 cartes d'identité, il y a une question de place accordée à Farid Kharkhach, il était une petite main". Lui n'est poursuivi que pour 14 fausses cartes d'identité. Mais seulement trois selon l'avocate.

Me Vial : "Farid Kharkhach, la plupart du temps, quand je livrais dans des enveloppes et je ne regardais pas ce qu'elles contenaient"

Me Vial qui projette sur grand écran des PV et un calendrier de l'année 2015 avec des dates au stabilo. Au stabilo, décembre 2014 et septembre 2015. Dates qui concernent des faux papiers reprochés à Farid Kharkhach.

Elle tente de démontrer pour plusieurs fausses cartes qu'on "ne peut pas retenir que Farid Kharkhach était l'intermédiaire de l'intermédiaire". Pas simple de suivre son raisonnement.

Elle évoque la première fois où Farid Kharkhach est interrogé en France, en juin 2017. Il parle de cartes pour El Bakraoui, qu'il n'aurait pas su radicalisé, qu'il était prêt à collaborer avec la justice.

Elle évoque un interrogatoire dans le bureau de la juge Panou, qui aurait fait pression sur Farid Kharkhach, alors que sa femme était aussi en garde à vue, allaitant leur bébé de trois mois, une petite fille.

Me Vial plaide que Farid Kharkhach a reconnu que Khalid En Bakraoui était radical, juste pour que sa femme puisse être libéré et lui aussi, après ce premier interrogatoire.

Me Vial : "On ne pourra jamais savoir si ce que dit Farid Kharkhach est vrai".

Me Vial dénonce qu'il n'y ait pas eu de vidéo lors de cet interrogatoire de première comparution, ni d'interprète. Or, à l'époque, Farid Kharkhach parlait très peu français.

Me Vial s'interroge sur les aveux de Kharkhach dans ce contexte : "Est-ce que les aveux qu'il fait correspondent à une réalité ?"

Me Vial : "Est-ce que ce sont des aveux cohérents ?" Et elle plaide que non. Incohérence qu'elle met en avant, Kharkhach aurait avoué que Khalid El Bakraoui "à fond dans la religion" mais n'aurait pas pu le constater à ce moment-là car était au Maroc.

Me Vial plaide qu'il y a "des mensonges manifestes dans les aveux de Farid Kharkhach".

Me Vial : "Il n'y a aucun effet de manches de ma part".

Sans effet de manches, elle achève sa très lente plaidoirie en disant qu'il est en détention provisoire depuis plus de 5 ans et demi, "c'est trop".

Me Vial : "Nous voulions que Farid Kharkhach comparaisse libre".

Me Vial : "Avec l'approche minutieuse qui est la vôtre, vous ne pouvez qu'entrer en voie d'acquittement sur l'AMT. Nous vous proposons de le condamner sur les faux et la complicité" des faux papiers.

Et Me Vial achève sa plaidoirie avec ces mots : "Je remercie la cour sincèrement". Me Louise Dumont Saint Priest n'a pas plaidé.

Fin de l'audience. Reprise demain avec les plaidoiries pour l'accusé Ali El Haddad Asufi.

Jour 142 – Vendredi 17 juin – Suite des plaidoiries des avocats de la défense

Jour 142 au procès des attentats du 13 Novembre Suite des plaidoiries de la défense. Aujourd'hui, ce sont les avocats de l'accusé Ali El Haddad Asufi qui plaident.

C'est Me  @MeJonathanDeTa1 qui commence à plaider. Un sympathique avocat belge. Qui cite la magistrate belge qu'on a vue ici à la barre, la juge Panou qui disait "dans le dossier de Bruxelles, je ne prends que ce qui m'intéresse".

Me @MeJonathanDeTa1: "Avec tout le respect que je dois à madame Panou, elle s'est fourvoyée, elle s'est enlisée". Il prononce ces mots d'une voix très posée.

Me @MeJonathanDeTa1 : "La défense de Monsieur El Haddad ne dénonce pas un complot policier, loin de là"

Me  @MeJonathanDeTa1 : "Je suis certain que les enquêteurs ont voulu toucher la vérité du bout des doigts". Mais l'avocat parle de la pression des policiers, "parfois on a peut-être manqué de méthode ou de rigueur"

Me  @MeJonathanDeTa1 cite la presse,  @Mediapart qui faisait un papier sur "l'enquête sabotée sur les fournisseurs d'armes", "@lemondefr lui emboîtait le pas"

"C'est à cause du volet sur les armes que M. El Haddad est devant vous aujourd'hui, sinon il serait jugé au Petit Paris", le procès Paris bis "et il serait jugé avec Youssef El Ajmi !" 2 ans de prison requis à Bruxelles contre El Ajmi ; 16 ans de réclusion contre El Haddad.

Me  @MeJonathanDeTa1 revient sur le jour où une enquêtrice est venue parler de Rotterdam. Et il parle de l'accusé Krayem, "qui avait dit que les armes viennent de Hollande".

Krayem avait parlé avant le procès. A exercé son droit au silence à partir de janvier et les interrogatoires sur les faits.

Me @MeJonathanDeTa1 dénonce des "élucubrations et des pistes abandonnées".

Me @MeJonathanDeTa1 a de l'humour et dit qu'il se lance sur "le volet de l’homme au vélo volé". "J’essaye de détendre l’atmosphère, mais ça ne me fait pas rire car un homme est dans le box pour cette mascarade".

Me @MeJonathanDeTa1 lit un PV d'un homme arrêté en septembre 2014 "en relation avec un vol de vélo", un homme "présenté comme un trafiquant d'armes international"

Me @MeJonathanDeTa1, avec humour : "J'imagine cet homme sur son vélo volé avec dans sa besace des kalachnikovs"

Me @MeJonathanDeTa1 plaide les actes d'enquête et qu'on lui a longtemps refusés, jusqu'au témoignage de cet homme à ce procès, en visio, à l'automne 2021. "Je ne suis pas complotiste mais je me disais qu'on me cachait quelque chose"

Me @MeJonathanDeTa1 répète ce mot "mascarade" à propos de cet homme considéré comme trafiquant d'armes et à cause de qui El Haddad, son client, dans ce box...

Me  @MeJonathanDeTa1 concède juste un trafic de stup pour son client, plaisante, dit qu'il pourrait travailler pour le PNAT...

Me @MeJonathanDeTa1, décidément plein d'humour, dit que quand il entend le bruit de sabots à Bruxelles, il se dit que c'est des chevaux, pas des zèbres, "car on est pas dans la brousse".

Et il dit que le PNAT, même dans un parc européen, "voit des zèbres". Rires dans la salle. Me @MeJonathanDeTa1 dit qu'il veut soigner l'irrévérence avec modération, "je crois que je suis sur la bonne voie"

@MeJonathanDeTa1 répète qu'on "s'est fourvoyé à Rotterdam". Et il rappelle que les chargeurs que Khalid El Bakraoui aurait cherché à se procurer via El Haddad Asufi, "c'est qu'il avait déjà les kalach" sans doute.

Dans son réquisitoire, le PNAT a relevé que l'enquête n'a pas prouvé que les 31 chargeurs du 13 Novembre provenaient de là...

Me @MeJonathanDeTa1 veut évoquer "un élément de taille". Rires sur les bancs de ses confrères ou de la presse. Lui-même rit de ce jeu de mots pas fait exprès. Son style, unique à ce procès

Me @MeJonathanDeTa1, modeste : "Je ne suis pas un grand plaideur". Sa plaidoirie est pourtant très bonne. Il parle de son client, Ali El Haddad Asufi, qu'il connaît depuis 4 ans.

Après le réquisitoire, lors duquel les avocats généraux ont requis seize ans de réclusion, Ali El Haddad Asufi était "blanc comme un linge". "Il a repris des couleurs en entendant les 1ères plaidoiries de la défense".

Me  @MeJonathanDeTa1 ajoute qu'Ali El Haddad Asufi a confiance en la justice française. Et l'avocat conclut face à la cour : "Vous écrirez en lettres d’or une page de l'histoire de la justice française, en acquittant Monsieur El Haddad Asufi qui est innocent".

C'est Me  @MeArabtigrine qui prend le relais pour plaider à son tour. Elle parle de son client, depuis le 8 septembre, "sali" par le mot "terroriste".

Me  @MeArabtigrine : "L'islam, c'est quoi le problème ? Les banlieues, les mosquées ?"

Me  @MeArabtigrine compare l'immense salle d'audience à "une boîte à cauchemars"

Me  @MeArabtigrine : "Nous partons d'une croyance pour arriver à un crime, religion et droit. Vous ne maîtrisez pas le mouvement"

@MeArabtigrine : "Votre délibéré ne va pas apaiser les choses. Evidemment qu'il va continuer ce mouvement. Au début, c'est l'amour d'un Dieu, c'est l'opium du peuple, et le dernier temps de ce mouvement, c'est le terrorisme"

@MeArabtigrine : "C'est quoi la radicalisation ? C'est qui ? C'est où ? C'est quand ? "

@MeArabtigrine : "Quel comble que Ali El Haddad Asufi soit dans le box à la place de" Ibrahim El Bakraoui (logisticien, son ami)

Ibrahim El Bakraoui mort le 22 mars 2016 en kamikaze dans les attentats de Bruxelles.

L'avocate dit "une ordure" pour Ibrahim El Bakraoui. Dont son ami Ali El Haddad Asufi serait la victime, à sa place dans le box des accusés plaide @MeArabtigrine

@MeArabtigrine plaide "les principes intangibles de notre procédure pénale : intention pour l'AMT. Elle dit qu'on n'est pas resté à l'arrêt Merah de la cour de cassation de 2016"

La cour de cassation qui avait dit en somme que le co-accusé d'Abdelkhader Merah (Fettah Malki, ami de Mohamed Merah) en ayant fourni des armes à Merah, même s'il ne savait pas que pour commettre des attentats = AMT (association malfaiteurs terroriste) caractérisée.

Mais comme l'a très bien plaidé

@NegarHaeri mardi, en donnant une arme, on se doute que pour un crime, ce qui n'était pas le cas de son client, Amri, accusé d'avoir transporté les frères Abdeslam dans une simple voiture, sans conscience, en somme.

@MeArabtigrine rappelle qu'Ibrahim El Bakraoui connu désormais comme un terroriste kamikaze du 22 mars 2016, mais qu'avant, Ali El Haddad Asufi n'avait pas perçu son attrait pour l'islam radical.

@MeArabtigrine plaide : "Est-ce qu'il sait Ali El Haddad Asufi au moment où il accompagne Ibrahim El Bakraoui à l'aéroport" que c'est un voyage pour la Turquie pour la Syrie ensuite ? Elle plaide qu'il ne le sait pas.

Ce voyage date de juin 2015.

@MeArabtigrine plaide que Ibrahim El Bakraoui n'aurait jamais dit la vérité à Ali El Haddad Asufi. L'avocate lit un message de son client : "Tout le monde demande après toi ! Ça se passe comment tes vacances ? T'es où ?" Elle conclut : "waouh !"

Elle plaide donc qu'Ali El Haddad Asufi ne savait rien.

Autre voyage : la Grèce, juillet 2015. 24 heures sur place pour Ibrahim El Bakraoui cette fois avec Ali El Haddad Asufi.

@MeArabtigrine: "Comment la Grèce passage vers la Syrie ?!"

@MeArabtigrine: "Qu'est-ce qu'il lui a dit ? Je n'en sais rien, mais vous n'en savez rien non plus"

Elle plaide ensuite sur un appartement loué et des soirées playstation pizzas : "mais ce temps passé ne peut être seul élément de ce dessein criminel", plaide @MeArabtigrine

@MeArabtigrine évoque les conversations lors de ces soirées sur l'homosexualité. Rappelons qu'en Syrie sous #EI, les homosexuels jetés du haut des immeubles. Mais l'avocate dit que leurs conversations à Bruxelles juste issues de la religion...

Elle dit que "l'homosexualité interdite dans les trois religions monothéistes", "alors oui, ça nous dérange" et elle dit que son client peut-être "esprit borné", "mais y en plein les campagnes des esprits bornés, et on fait pas du droit pénal avec ça !"

Et elle plaide qu'il n'y avait pas de signe évident de radicalisation violente chez I. El Bakraoui, "on part pas du principe qu'un homme en soutane avec une croix est un pédophile parce qu'il y en a, c'est pareil pour nous", dit

@MeArabtigrine : "Que devait voir Ali El Haddad Asufi de la radicalisation de I. El Bakraoui qui ne portait pas de barbe, pas de qamis" Elle dénonce les arguments du PNAT "c'est pas parce qu'il était son meilleur ami qu'il ne pouvait ignorer" plaide-t-elle.

@MeArabtigrine qui clot sa plaidoirie sur "la paix", "le mot qu'on voudrait avoir dans votre esprit après ce qu'il s'est passé, le vivre ensemble"

@MeArabtigrine : "Vous ne condamnerez pas ceux qui sont le fruit de notre échec commun" (elle a parlé des banlieues, sentiment d'échec pour certains et pourtant école est un ciment de la République...) "et qui se sont trouvés une identité dans islam"

@MeArabtigrine plaide qu'on ne peut condamner Ali El Haddad Asufi à cause des signes qu'il n'a pas perçus comme dangereux, elle parle de la religion, elle dit que I. El Bakraoui "ressemblait aux autres, là-bas, à Schaerbeek"...

@MeArabtigrine : "Et si Ali El Haddad Asufi n'a pas vu, ce n'est pas un crime". #13Novembre

@MeArabtigrine : "Répondons-leur à tous les Français, de l'Elysée jusqu'au fin fond de la Saint-St-Denis", elle dit que la justice ne peut "sacrifier" Ali El Haddad Asufi. "Rangez les religions au placard et jugez !", conclut-elle.

C'est maintenant Me @MartinMechin qui plaide : "Pour juger, il faudra aussi vous mettre à la hauteur de l'accusé". Il rappelle la peine individuelle. "Je ne vous parlerai que de l'accusé que je défends depuis 9 mois"

Me @MartinMechin: "Quand on est accusé, on doit se défendre. Il n'y a pas une bonne ou une mauvaise manière. Que ce soit une défense de connivence, de rupture, de vendeur de shit, peu importe, l'essentiel c'est de se défendre"

Me  @MartinMechin : "Est-ce qu'Ali El Haddad Asufi aurait eu une défense de vendeur de shit parce qu'il est un vendeur de shit ? Juste un petit mec de Bruxelles, qui travaille à l'aéroport, qui deale"

Me  @MartinMechin : "Quand on dit que les accusés pas à la hauteur du procès, est-ce que ce serait pas plutôt le procès pas à la hauteur des accusés, qui en a fait trop ?"

Me @MartinMechin : "Quand on fait venir un ancien président, un ancien Premier ministre", il parle aussi des airs de "commémoration", est-ce que procès à bonne hauteur, en somme ?

Me  @MartinMechin : "Ce que je vous propose, d'imaginer un immense tamis, tamis audience, témoignages, parole des accusés. Parce que pendant six ans, comme des orpailleurs, les enquêteurs ont cherché la pépite d'or qui ferait tomber Ali El Haddad Asufi"

Me @MartinMechin : "Nous en tant qu'avocats, on vous aidé à faire ce tri, les poussières d'indices..."

Me  @MartinMechin : "Si on retire les armes, qu'est-ce qui fait encore le lien entre Ali El Haddad Asufi et les attentats du 13 Novembre ?"

Le lien : Ibrahim El Bakraoui, l'ami d'enfance. "Il estimait avoir une cause à défendre, et quand on a une cause à défendre, on peut tout sacrifier, y compris les amis, alors Ali, oui, vous avez été sacrifié"

Me  @MartinMechin rappelle qu'il est arrivé dans ce dossier à l'été 2021 avec @MeArabtigrine

"Nous avons été désignés très tardivement, nous ne pouvions maîtriser tout ce dossier" Dossier d'un million de pages.

Me @MartinMechin a cherché la "clé de lecture" pour comprendre Ali El Haddad Asufi. "La clé proposée par le PNAT, l'engagement idéologique, la clé de culpabilité de tous les accusés mais cette clé, elle n'ouvre rien"

Me  @MartinMechin : "Toute la construction de cette audience, même logique. Saucissonnage mais avec 20 accusés qui ne font pas les mêmes choses. Je ne vous propose pas un passe-partout. Une clé unique qui se sert qu'à Ali"

Me @MartinMechin : "Pendant neuf mois, vous avez cherché une clé pour le dossier" et lui propose une clé juste pour Ali El Haddad Asufi.

Pour Me @MartinMechin ce qu'on peut reprocher à Ali El Haddad Asufi rentre dans la case du délit de recel de malfaiteurs. "Le recel de malfaiteurs correspond à ce qu'a fait Ali pour son ami Ibrahim". Il lit le code pénal pour tenter de le démontrer.

Me  @MartinMechin : "Le voyage en Turquie, 1er élément. Mais il est impossible de ne pas se remettre dans contexte de l'époque. Bien sûr, le terrorisme a déjà frappé, mais pour Ali El Haddad Asufi, pas radicalisé, la Turquie ça résonne comme une destination de vacances"

Me @MartinMechin : "Quand Ibrahim El Bakraoui part en Turquie et dit que pour échapper à la police (après un braquage)", Ali El Haddad Asufi le croit selon son avocat.

Ali El Haddad Asufi écoute son 3e avocat plaider. Il a revêtu une chemise blanche, porte un masque chirurgical bleu sous le nez.

Me @MartinMechin revient dans le détail sur un voyage. I. El Bakraoui en Turquie, juin 2015. Appel à Ali El Haddad Asufi. Demande de numéro de son frère Khalid El Bakraoui. Et alors ? plaide l'avocat "il demandait pas le numéro d'un émir de l'EI"

Me  @MartinMechin note que cet appel a duré 52 minutes, "le parquet a dit ils n'ont pas parlé que de la météo !" L'avocat dit qu'ils n'ont pas pour autant parlé de terrorisme ! "Ça n'est pas suspect, appel entre deux amis d'enfance, l'un dans un centre de rétention en Turquie"

C'est Ibrahim El Bakraoui qui est passé de l'hôtel spa au centre de rétention en Turquie... Et donc pour Me

@MartinMechin il est normal qu'Ali El Haddad Asufi s'inquiète.

Me @MartinMechin : "Quel est le lien entre le fait qu'Ibrahim veuille partir en Syrie et la réalisation des attentats du# 13Novembre ?" Question jamais posée dit-il.

Me @MartinMechin : "Il faut bien comprendre qu'à ce moment-là tout le monde rentre de Syrie" pour préparer les attentats du 13 Novembre.

Me @MartinMechin: "Ali El Haddad Asufi n'est pas mis dans la confidence de cette réitération de partir en Syrie. La Turquie ça n'a pas marché (juin 2015), on va tenter la Grèce (juillet 2015)"

Me @MartinMechin dit que lors du 2e voyage, ils n'ont "évidemment pas eu le temps de rencontrer Abaaoud" Abdelhamid Abaaoud qui rentrait de Syrie en passant par la Grèce.

Quand Ibrahim El Bakraoui rentre finalement mais Ali El Haddad Asufi est en vacances au Maroc.

Puis en septembre, I. El Bakraoui demande de louer un appartement. Rue des Casernes. Un ami d'Ali El Haddad Asufi sollicité. Et Me  @MartinMechin plaide là encore l'élément constituant une association de malfaiteurs. "Voyez, elle est géniale ma clé, elle ouvre toutes les portes !"

Me @MartinMechin plaide que pas de précaution prise pour entrer dans cet appartement, rappelle que d'ailleurs une caméra de surveillance dans le hall - donc pas terrible pour une planque discrète, sous-entendu.

Me @MartinMechin plaide que "personne, aucun membre de la cellule, à part Ibrahim El Bakraoui, ne s'est rendu dans cet appartement".

Me @MartinMechin: "A ce moment, il commence à cloisonner. On ne veut plus voir Ali dans cette période au plus près des attentats"

Me @MartinMechin : "18 novembre, Ali passe dans cet appartement. Il arrive à 00h21 avec des pizzas. Il en repart à 3h32. Et là on a dit c'est bizarre, la nuit de l'assaut à St Denis. Mais à ce moment-là, personne n'a identifié l'appartement"

Me @MartinMechin conclut face à la cour : "Je vous demande de vous remettre à la hauteur de Ali El Haddad Asufi"

Me @MartinMechin : "Je suis désolé de vous le dire, mais vous ne rentrerez pas dans l'Histoire. A l’issue de ce verdict, c’est simplement l’histoire avec tout petit H, l’histoire de Ali El Haddad Asufi que vous aurez jugé"

Et Me @MartinMechin demande de l'acquitter. Ainsi s'achève cette 1ère semaine de plaidoiries de la défense. Reprise lundi à 9h30 (exceptionnellement) pour la défense des accusés Krayem et Atar. Dernières plaidoiries le 24 juin avec les avocats de Salah Abdeslam.