Que risque-t-on en cas de faux témoignage ?

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.
France > Droit privé > Droit processuel > Procédure civile  


Auteur: LFD Criminalistique[1]
Février 2022



Les fausses attestations de témoin sont plus répandues qu'on ne le croit. Que faire ? Quels sont les risques ? Comment les détecter ? Comment se défendre ?


Faux témoignage, faux en écriture et usurpation d’identité

Le témoignage est réservé, dans le domaine judiciaire à toute personne ayant connaissance d’un fait, d’un événement, sauf quelques exceptions particulières concernant les individus dépourvus de la qualité pour témoigner.


Le témoignage est un mode de preuve fragile, d’où la nécessité de lui imposer un certain formalisme légal : le serment dans le témoignage oral, ou l’identité du témoin et certaines mentions manuscrites obligatoires pour ce qui est des témoignages écrits.


L’article 202 du code de procédure civile prévoit que l’attestation écrite doit contenir les faits auxquels le témoin a assisté ou constaté personnellement.


Par ailleurs, cette attestation doit comporter le nom, les prénoms, la date et lieu de naissance, demeure et profession du témoin, même le lien de parenté avec les parties le cas échéant.


Le témoignage écrit doit faire état que le témoignage est établi en vue de sa production en justice et que le témoin est au courant des risques encourus en cas de faux témoignage.


L’attestation doit enfin être entièrement rédigée, datée et signé de la main du témoin et accompagné d’une pièce d’identité comportant sa signature.


Un modèle d’attestation a été prévu à cet effet par le Ministère de la Justice, le modèle CERFA 11527*03 – attestation de témoin [2].


Certains individus ne peuvent pas témoigner, notamment les magistrats, les jurés ou les parties civiles, si bien que celles-ci peuvent livrer sa version des faits.


Par ailleurs, les proches des parties au procès, les descendants dans le cadre d’un procès de divorce, ou les ascendants, descendants et alliés au même degré en matière pénale n’ont pas la qualité de témoin, tout comme les individus condamnés en justice à une peine d’interdictions de droits.


En ce qui concerne le faux témoignage, une déclaration mensongère faite sous serment ou par écrit risque d’être lourde de conséquences.


Le code pénal prévoit plusieurs sanctions dans le but de garantir la sincérité des témoignages. Le faux témoignage fait sous serment est un délit puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.


Ces peines peuvent aller jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 100 000 € d’amende si le témoin a bénéficié d’un don ou d’une récompense en contrepartie.


Cependant, le faux témoignage peut en échapper à ces peines en se rétractant spontanément de sa déclaration préalablement à la décision de la juridiction d’instruction ou du jugement.


Concernant les fausses attestations écrites, la falsification et l’usage d’une fausse attestation sont punis d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, tout comme la tentative d’établissement, de falsification et d’usage de ce type de faux témoignage en justice (article 441-7 du Code pénal).


Le rôle de la victime de faux témoignage

Outre le fait de l’introduction d’un faux témoignage en justice, il ne faut pas oublier que le témoin présumé n’est normalement pas au courant de la production de la fausse attestation, portant son nom et sa pièce d’identité.


Dans ce cas de figure, le témoin présumé devient victime de faux et usage de faux, ainsi que d’usurpation d’identité.


Il s’agit d’un procédé fréquent dans les tribunaux, car la victime, le témoin présumé ne découvre quasiment jamais la supercherie, sauf s’il est convoqué pour ratifier son témoignage en salle d’audience.


Les faux témoignages sont plus habituellement constatés dans la juridiction prud’homale et celle des affaires familiales, concernant les procédures en matière de droit du travail et de divorce, mais aussi au civil et au pénal plus ponctuellement.


Mais il existe une autre forme de victimisation, celle de l’individu concerné par une attestation mensongère.


La jurisprudence rappelle souvent que ne rien faire équivaut à valider l’attestation de témoin mensongère.


C’est pourquoi, la victime doit impérativement déposer une plainte pour ces faits, plainte fréquemment demandée par les juridictions pour accompagner la dénonciation d’une attestation de témoin, et notamment dans la juridiction prud’homale.


Le simple fait de déposer plainte, soit contre le témoin, soit contre la partie ayant produit la fausse attestation de témoin pourrait inciter le juge à ne pas tenir compte de l’attestation douteuse.



Comment prouver une fausse attestation en justice ?

Les fausses attestations de témoin peuvent présenter plusieurs types d’altération de la vérité.


Le faux témoignage le plus fréquent est l’attestation écrite établie à l’insu du témoin. Il n’est pas tenu au courant. Un tiers rédige, date et signe l’attestation à sa place, se servant d’une photocopie de la pièce d’identité du témoin présumé qu’il aurait obtenu dans un but différent.


Le premier réflexe de la victime est souvent de confirmer l’authenticité de l’attestation auprès de l’auteur présumé, mais ce n’est pas toujours possible. Il s’agit parfois d’un voisin, d’un proche, d’un collègue de travail qui a décidé de s’aligner du côté de la partie adverse.


Dans ce genre de situation, une expertise graphologique peut s’avérer très utile, permettant ainsi de prouver que l’écriture et la signature présentes sur l’attestation douteuse n’émanent pas du témoin présumé.


L’expert judiciaire en écritures et documents, l'expert graphologue pour le grand public va confronter l’attestation à un échantillon de référence, d’origine connue et incontestable émanant du témoin présumé, dans le but d’en déterminer la communauté de main.


Cette expertise graphologique peut être demandée à la juridiction compétente, mais elle peut aussi être réalisée de manière extrajudiciaire, avec la participation des parties au procès et dans le respect du contradictoire. Il s’agit d’une procédure expertale bien moins onéreuse et plus rapide, mais elle nécessite de la participation ainsi que de la bonne foi des parties.


Le dernier recours est toujours l’expertise graphologique privée, permettant à la victime de justifier une demande d’expertise judiciaire si les résultats sont concluants.


L’expertise en écritures et en documents, judiciaire ou privée peut s’adresser tant à l’identification du scripteur comme à la vérification de l’authenticité de la pièce d’identité fournie avec l’attestation de témoin.


Il est fréquent de retrouver des fausses pièces d’identité, voire de pièces de fantaisie étrangères accompagnant cette modalité de témoignage.


L’expertise en écritures et documents est le seul moyen de déterminer l’authenticité d’un manuscrit, d’une signature, d’une pièce d’identité, l’intégrité du témoignage, l’absence de rajouts et d’altérations frauduleuses, ainsi que le nombre de scripteurs étant intervenu dans la rédaction de l’attestation suspecte.