Contrat de travail, quelques points à vérifier avant de signer; Le contrat de travail constitue un acte de référence pendant toute la relation de travail, et impose donc la vigilance (fr)

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Franc Muller, Avocat au Barreau de Paris
Août 2018



Le contrat de travail est un acte juridique important, conclu entre le salarié et son employeur, qui comporte un certain nombre d’obligations, 
essentiellement mises à la charge du salarié, auquel il convient d’accorder la plus grande vigilance.


Ce contrat régit la relation de travail pendant toute sa durée et « tient lieu de loi » entre les parties, de sorte qu’il est une référence déterminante à laquelle elles se reporteront en cas de survenance d’un différend.


On ne saurait donc que trop conseiller au salarié d’accorder une attention particulière à son contenu et de ne pas hésiter à demander à l’employeur des précisions lorsque certaines stipulations lui paraissent obscures ou absconses car les litiges relatifs à l’interprétation des clauses du contrat de travail, révélant leur méconnaissance par le salarié, sont nombreux.


Certes, la faculté de négociation n’est pas toujours évidente pour celui-ci lorsque, lors de son embauche, l’employeur lui présente un contrat de travail qu’il a déjà rédigé dont il exige la signature sur le champ, mais cette façon de procéder, pour courante qu’elle soit, est inadmissible et l’employeur doit impérativement laisser au salarié le temps de compréhension et de réflexion nécessaire afin qu’il exprime librement son consentement sur ses obligations.


L’article L 1221-3 du Code du travail prévoit que le contrat de travail établi par écrit est rédigé en français.


La rédaction d’un écrit est donc préférable, étant précisé que son absence n’est pas sanctionnée.


Voici ci-dessous une liste non exhaustive des clauses qui nous semblent devoir retenir une attention toute particulière de la part des salariés.


  • Lieu de travail : La jurisprudence considère depuis 2003 que « la mention du lieu de travail dans le contrat de travail a valeur d’information, à moins qu’il ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce lieu » (Cass. Soc. 3 juin 2003 n° 01-40376').


De sorte qu’un contrat de travail se limitant à indiquer, par exemple, que le salarié exercera ses fonctions à Paris, n’est qu’informatif et rien n’interdirait ultérieurement à l’employeur de muter l’intéressé dans un autre lieu situé dans le même secteur géographique (parfois vaste) sans que celui-ci puisse valablement s’y opposer.


En outre, si le contrat de travail comporte une clause de mobilité [1], celle-ci peut s’étendre, aussi surprenant que cela paraisse, à l’ensemble du territoire français, depuis un revirement de la Chambre sociale de la Cour de cassation, l’admettant (Cass.soc. 9 juill. 2014 n° 13-11906).


Ce n’est donc que si le contrat de travail stipule expressément qu’il sera exécuté exclusivement dans un lieu déterminé (à préciser) que l’employeur ne pourra modifier ce lieu d’affectation du salarié, ou qu’il le pourra uniquement après avoir obtenu son accord.


  • Temps de travail : le contrat de travail à temps plein contient essentiellement deux modalités de durée de travail : la référence à une durée hebdomadaire de travail (35 heures) ou à un forfait horaire ou en jours [2] sur l’année.


1) Ainsi, lorsque le contrat de travail prévoit une durée de travail de 35 heures hebdomadaires, mais que le temps de travail effectif du salarié excède cette durée, il est fondé à demander à l’employeur le paiement des heures supplémentaires qu’il a réalisées.


En outre, contrairement à une idée reçue, les Cadres, exception faite des cadres dirigeants, sont assujettis à la durée légale ou conventionnelle du travail et peuvent donc prétendre au paiement d’heures supplémentaires.


2) La référence à un forfait en heures sur la semaine ou sur le mois, ou en jours sur l’année (218 jours par an) est parfaitement licite.


Elle s’applique cependant aux seuls cadres autonomes ou aux salariés non-cadres disposant d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps ('article L 3121-56 du Code du travail).


Un salarié ne relevant pas de cette définition ne peut se voir appliquer de contrat de travail de travail au forfait.


L’article L 3121-63 du Code du travail subordonne par ailleurs la validité du forfait à la préexistence d’un accord collectif (d’entreprise, d’établissement ou, à défaut, de branche).


  • Définition des objectifs : la rémunération du salarié peut comporter une partie fixe, à laquelle s’ajoutera une part variable.


Toutefois, la simple mention dans le contrat de travail de la phrase « le salarié bénéficiera d’une rémunération variable… » serait insuffisante et source de litiges.


Elle n’est pas suffisamment claire et présente le risque de s’en remettre au pouvoir discrétionnaire de l’employeur.


Il convient donc que le contrat indique précisément selon quelles modalités [3], objectives, le salarié bénéficiera de la part variable de sa rémunération, et ajoute que toute modification ne pourra valablement intervenir qu’avec l’accord écrit des parties.


Par précaution, il est également préférable de stipuler qu’en cas de départ du salarié en cours d’année, quelle qu’en soit la cause (licenciement, démission, prise d’acte…), sa rémunération variable lui sera versée prorata temporis au terme de la relation contractuelle.


  • Clause de non-concurrence : nombreux sont les salariés qui n’y accordent pas d’attention au moment de la conclusion du contrat de travail, et s’aperçoivent lors de sa rupture qu’ils y sont liés et ne peuvent aller exercer leur activité professionnelle chez un concurrent qui leur a fait une offre avantageuse.


La clause de non-concurrence [4] ne doit pas être considérée avec légèreté car elle constitue un mécanisme redoutable de protection des « intérêts légitimes de l’entreprise ».


En toutes circonstances, il y a lieu de vérifier soigneusement quelle est la durée et le territoire sur lequel s’applique la clause de non-concurrence, sachant que sa contrepartie financière sera rarement dérisoire, au sens où l’entend la jurisprudence (Cass. Soc. 28 janv. 2016 n° 14-18836).


Car si ses conditions de validité sont réunies et que le salarié quitte l’entreprise pour travailler chez un concurrent, le risque que l’employeur l’assigne devant la juridiction prud’homale pour faire sanctionner sa violation n’est pas négligeable.