Etat descriptif de division: la nature contractuelle de l'EDD relancée par l'arrêt du 6 juillet 2017 (fr)

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Auteur : Thierry Vallat, avocat au Barreau de Paris
24 juillet 20117


La nature de l'état descriptif de division (EDD) fait toujours débat, relancé par un arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de cassation du 6 juillet 2017 qui vient de préciser que l'état descriptif de division pouvait se voir conférer une valeur contractuelle par le règlement de copropriété.


Rappelons que l'EDD est un document établi par un géomètre expert, et qui opère la division d'un d'immeuble en attribuant un numéro à chaque lot qui le constitue.


L"article 7 du décret n° 55-1350 du 4 janvier 1955 précise qu"il peut être contenu dans un acte spécialement dressé à cet effet, dans un règlement de copropriété, dans un cahier des charges ou tout autre acte ou décision judiciaire.


L'article 4 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 impose que tout acte de vente ou translatif de propriété mentionne expressément que l'acquéreur a pris connaissance de l'état descriptif de division et des actes qui l'ont modifié, lorsqu'ils existent et ont été publiés.


Si la nature du règlement de copropriété est réglée par l'article 8 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 qui dispose qu’il a un caractère conventionnel, celle de l'EDD est plus incertaine.


Un arrêt du 8 juillet 1992 n°90-11.578 a finalement estimé qu’il était "dressé seulement pour les besoins de la publicité foncière" et n’avait "pas de caractère contractuel" (Cass. 3e civ., 8 juill. 1992, n° 90-11.578 : Bull. civ. III, n° 241).


Cette position de principe a été confirmée par la jurisprudence postérieure, comme cet arrêt du 7 septembre 2011 (Cass. 3e civ., 7 sept. 2011, n° 10-14.154) dans lequel la Cour de Cassation confirme que l’EDD n’a aucune valeur contractuelle.


Même publié postérieurement au règlement de copropriété, la Cour de Cassation confirme en effet qu’un nouvel état descriptif de division est dépourvu de valeur contractuelle.


Ce n'est que dans la situation dans laquelle il n'y a pas du tout de règlement de copropriété qu"une valeur contractuelle de l'état descriptif est reconnue, lorsque, faute de règlement de copropriété établi pour l'immeuble, il est le seul document de référence définissant la nature et la destination de chaque lot (Cass. 3e civ., 3 déc. 2008, n° 07-19.313).


Mais l'arrêt de la 3è chambre civile du 6 juillet 2017, 16-16.849 relance donc les débats ! Il retient en effet la valeur contractuelle d’un état descriptif de division qui viendrait ainsi compléter les dispositions d'un règlement de copropriété.


Dans cette affaire, une société Le Passage 2000, propriétaire d'un lot composé d'un appartement situé au deuxième étage d'un immeuble en copropriété, avait assigné le syndicat des copropriétaires Résidence Jean Monnet en annulation de la décision d'assemblée générale lui ayant refusé l'autorisation d'apposer des plaques professionnelles.


Reconventionnellement, le syndicat avait sollicité qu'il soit constaté qu'en vertu du règlement de copropriété, les locaux situés au deuxième étage, ainsi qu'aux étages supérieurs, ne pouvaient être occupés à titre professionnel ;


La Cour de cassation précise "l'état descriptif de division, auquel le règlement de copropriété avait conféré une valeur contractuelle et qui affectait les lots situés au-dessus du premier étage à une destination exclusive d'habitation, n'était pas en contradiction avec les stipulations du règlement selon lesquelles l'immeuble était destiné à un usage professionnel de bureaux commerciaux ou d'habitation en ce qui concernait les locaux situés aux étages et combles..."


Dès lors que les dispositions de l'état descriptif de division étaient plus précises, en ce qu'elles portaient sur chaque lot, et alors que la destination énoncée au règlement l'était de manière générale, sans distinguer les étages au-delà du premier, la cour d'appel a pu ainsi décider qu'en vertu du règlement de copropriété, les locaux situés au deuxième étage, ainsi qu'aux étages supérieurs, ne pouvaient être occupés à titre professionnel.