Site internet « www.avocat.net » : retour sur une condamnation pour pratique commerciale trompeuse ! C.Cass 11 mai 2017, 16-13.669 (fr)

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.
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Auteur : Cabinet Bruzzo Dubucq

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Date: Janvier 2019




Dans un arrêt en date du 11 mai 2017 (n°16-13.669) [1], la première chambre civile de la Cour de cassation a décidé que l’utilisation du nom de domaine « www.avocat.net » devait être interdite dès lors qu’elle prêtait à confusion dans l’esprit des internautes, qui pouvaient légitimement penser n’être en relation qu’avec des avocats, ce qui n’était en réalité pas le cas.


En l’espèce, une société spécialisée dans l’édition de supports juridiques crée un site internet dénommé « www.avocat.net » afin de mettre en relation des particuliers avec des avocats inscrits sur ce site, lequel est présenté comme le « comparateur d’avocats n°1 en France ».

De plus, le site offre l’accès à des fiches juridiques.


Le Conseil national des barreaux (CNB) mène régulièrement des actions en justice contre ceux qu’il désigne comme des « braconniers du droit », c'est-à-dire des individus ou des sociétés dépourvus de la qualité d’avocat, qui offrent des prestations de conseil juridique.


C’est dans ces circonstances que le CNB, soutenant que cette société fait un usage prohibé du titre d’avocat pour proposer des services juridiques et se livre ainsi à des pratiques trompeuses, la poursuit en interdiction de telles pratiques portant atteinte à l’intérêt collectif de la profession et en indemnisation.


La caractérisation de l'existence d'une pratique commerciale trompeuse

Une pratique commerciale est déloyale et interdite lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.


Par exemple, la pratique est trompeuse, au sens des articles L. 121-1 et L. 121-2 du Code de la consommation [2], lorsqu'elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d'un concurrent.


L'infraction de pratique commerciale trompeuse est constituée dès lors que la décision d’achat du produit par un consommateur moyen est susceptible d’être altérée de manière substantielle (V. Com., 11 mars 2014 ; Com., 1er mars 2017), peu important qu’il n’y ait pas eu confusion effective mais seulement risque de confusion (V. Com., 4 octobre 2016) et qu’il n’y ait pas eu une altération effective du comportement économique du consommateur mais seulement potentielle (V. Com., 4 décembre 2012).

Le nom de domaine « www.avocat.net » interdit

En l’espèce, la première chambre civile de la Cour de cassation accueille favorablement les prétentions du CNB.

Est caractérisée l'existence d'une pratique commerciale trompeuse, donc déloyale, de nature à altérer de manière substantielle le comportement de l'internaute moyen par rapport aux prestations offertes.


En effet, la Cour de cassation considère que l'usage de la dénomination « avocat.net », sans adjonction d'autres termes, est de nature à laisser penser à l'internaute que le site est exploité uniquement par des avocats ou que tous les services proposés émanent d'avocats, alors qu’en réalité certaines prestations sont assurées par de simples employés de la société, qui ne sont pas membres d'un barreau.


Par ailleurs, il est reproché à cette société le défaut de présentation des critères de référencement et de classement des avocats de manière claire et précise.


Enfin, d’un point de vue déontologique, la relation particulière entre le client et son avocat exclut toute comparaison à des fins commerciales.


En conséquence, la suppression du nom de domaine, déjà ordonnée par les juges du fond, est confirmée.